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mes dans l’ouvrage où il y a déjà des matieres en fusion, font sortir ces matieres par le devant de la thuyere : c’est ce qu’on appelle cracher. Des mines liées d’arbue, attachées au-dessous de la charge, ayant laissé un vuide entre elles, & les matieres qui descendent venant à tomber sur les matieres inférieures, la rapidité de l’air qui s’échappe & la prodigieuse & subite expansibilité de l’humidité, jettent hors la derniere charge. On connoît la proximité de ces accidens, par la flamme qui concentrée se jettoit fort en-devant, & y manque tout-à-coup quand il se trouve un passage libre pour la chûte des matieres. Quand les ouvriers s’en apperçoivent, la fuite est le plus expédient.

L’éruption générale ne peut venir que de la raréfaction de l’eau, quand les conduits se trouvent bouchés. La preuve négative est que dans les fourneaux bien voûtés dont on a soin de nettoyer les conduits & dont le fond est bien au-dessus des eaux, jamais cet accident n’est arrivé.

Parvenu à acquérir quelques connoissances sur le mélange le plus avantageux pour la fusion des mines, je suis obligé d’avouer qu’on n’est point parvenu à savoir ce qui, à travail égal, distingue les fers entre eux. On se contente de dire en général que les mines sont de différentes especes, & que conséquemment leur produit doit être différent.

Je ne croirois rien hasarder de dire que les mines ont entre elles une qualité de configuration distinctive, qu’elles ne perdent pas même dans le rafinement du fer. Un ouvrier, dit-on, fait du fer cassant ; un autre le fait doux : disons de bonne-foi, qu’un ouvrier ne change point la qualité du fer ; mais qu’avec un tel degré de chaleur ou de travail, le fer peut s’épurer ou s’altérer. Travaillez également les différentes especes de mines ; réduites en fontes, elles produiront toûjours suivant leur nature, les unes des grains, les autres des prismes, des lames plus ou moins fines & longues, &c. En fer les mêmes qualités se trouvent. Le travail peut affermir ou appauvrir le nerf, la liaison, y laisser trop ou pas assez de remplissage, comme nous l’avons détaillé ; poussez le feu & le travail trop loin, vous détruisez. On diroit que ce ne sont pas les particules de mines qui ont été en fusion, mais les corps qui les rassemblent, ou qui y sont mêlés ; & que purifier ce métal, n’est proprement, comme nous le verrons au travail de la forge, que lui laisser les parties convenables de nerf & de remplissage, & cela suivant la qualité de chaque espece de mines.

Planches. Des fourneaux, figure 1. ouvrier qui travaille à son fourneau : 2. 3. & 4. ouvriers qui mettent hors une gueuse, à l’aide de roulets : 5e fondeur qui pese une gueuse : I pié de chevre : X romaine : λ la gueuse : 6e, chargeur qui avec une broüette voiture les scories sur le crassier u u : o est le pont pour arriver à la halle : q bêtes chargées de sacs de charbon : p halle.

Fig. 2. ouvrier qui casse la mine riche en roche : 2e, ouvrier passant avec un panier de mine ou charbon sur le pont KK, pour arriver à la bune GG, & charger le fourneau par l’ouverture E : AAA sont les batailles : HSS la couverture sur les soufflets : P la roue qui fait mouvoir les soufflets R R : T massif en maçonnerie, sous lequel passe l’eau de la roue, & s’échappe par l’ouverture C : Q chevalet du tourillon de l’arbre des soufflets : DD liens de fer ou bois qui embrassent le dessus du massif M : L halle à charbon.

Planches suivantes. Total d’un devant de fourneau, avec ses murs extérieurs. Fig. 1. le fondeur après avoir coule une gueuse : 2e, un chargeur qui a apporté l’arbue pour le bouchage : 3e, autre chargeur

qui apporte un panier de menus charbons pour garnir le devant, & sous la tympe.

Fig. 2. A A les piliers : BBB les marastres : D le taqueret : CC la tympe en fer : G le bouchage : F la dame : H la gueuse : IK un tuyau d’évaporation.

Fig. 3. représente la position des soufflets : 99 les piliers : 6 le pont pour aller à la bune.

Des fontes marchandes. On appelle fontes marchandes, toutes celles qu’on dispose à rendre d’autres services, que celui d’être converties en fer : pour cet effet aulieu de les forger on se sert de leur état de liquidité, dans la fusion, pour les jetter en moule. Les services que les fontes nous rendent dans cette partie, sont d’autant plus précieux qu’ils sont en grand nombre, d’un usage ordinaire, & d’un prix médiocre.

La premiere maniere de couler les fontes a été de faire les moules de terre, la plus industrieuse de les faire en sable. Sans entrer dans l’énumération de tous les ouvrages qu’on peut faire en fonte, nous nous contenterons d’en décrire quelques-uns, qui mettront à portée d’imaginer ce qu’on peut faire de mieux & de nouveau.

Les canons principalement pour la marine, de petites cloches, des bombes, se coulent en terre dans des moules préparés, & amplement détaillés aux articles Canon, Cloche, Bombe. Nous observerons qu’on ne fait point de cloches de fonte au-dessus de deux cents livres. On s’est imaginé qu’elle ne vaudroit rien que pour les grosses pieces, comme les canons. On a deux fourneaux accolés & en travail, pour ne pas manquer de métal. Les bombes qui peuvent se couler en sable, valent beaucoup mieux en terre.

C’est encore en terre que se coulent les gros mortiers, & de gros tuyaux pour la conduite des eaux.

Pour faire le moule en terre d’un tuyau, ce qui servira à faire entendre ceux des autres pieces, il faut une table de bois solide, du dessus de laquelle partent deux barres de fer entaillées de distance en distance, pour recevoir une broche de fer débordant la table : cette broche équarrie dans un des bouts pour recevoir une manivelle, au moyen de laquelle, de la corde, & du marche-pié, l’ouvrier peut faire tourner la broche. Pour de grosses pieces il faut un compagnon. On corroie fortement de l’arbue, mélée avec de la fiente de cheval, & on en environne la broche. Cette premiere couche séchée, on y en met une seconde, & ainsi jusqu’à la grosseur nécessaire. Cette partie s’appelle le noyau, qui doit être de la dimension du vuide intérieur du tuyau. Pour lui donner cette exactitude & la forme nécessaire, l’ouvrier a son échantillon, qui n’est autre chose qu’un morceau de planche entaillé, qu’il laisse frotter contre le noyau. Ce noyau fait & séché, ou le saupoudre par-tout de cendres, & on le couvre de terre préparée de l’épaisseur que doit être le métal : cette partie dressée a l’échantillon, séchée & saupoudrée de cendres, est couverte d’une couche de terre préparée, épaisse, relativement à la grosseur du tuyau. Cette partie s’appelle la chape. La chape pour être enlevée, se coupe longitudinalement en deux avec le couteau ; on casse & détache la part que le métal doit occuper, & ayant resserré & affermi la chape autour du noyau, on ensable un ou plusieurs moules à portée de la coulée du fourneau. Dans les grosses pieces on ménage un évent, dont on casse la bavure au sortir du moule.

Pour un moule de marmite à piés & oreilles, le noyau se bâtit sur une planche, tant pour le corps du pot que les oreilles ; s’enduit de la partie que le métal doit occuper, & de la chape. Au dessus du cul du pot dans la chape, on ménage l’ouverture de la coulée, & dequoi loger les moules des piés qui sont à part ; on coupe en deux la chape, &c. si ce sont