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Il faut au-dessus du massif deux chevalets, ou autres points d’appui mobiles, à la hauteur de six piés, avec une traverse qui porte un plomb tombant sur le point du milieu, afin qu’avec cette ligne vous soyez assûré de faire un quarré au-dessus E, répondant à celui du bas. Dans les dimensions dont nous allons parler, & qui seront désignées par les cordeaux, qui partiront des angles de la maçonnerie du bas du côté de la thuyere, & passeront sur les points d’appui ; & de même des angles du côté du contrevent, vous arrêterez ces cordeaux aux points d’appui par des clous plantés de chaque côté ; de façon néanmoins qu’ils puissent se mouvoir aisément de haut en-bas, & seront arrêtés aux angles du bas par des coins percés & fourrés entre les pierres, dans le trou desquels vos cordeaux passés, ils seront tendus par des pierres attachées à leurs extrémités, de façon que l’ouvrier puisse les remuer de tems-en-tems, pour les faire suivre exactement à sa maçonnerie. Vous terminerez le dessus GG à trois piés plus haut que le massif P, & les fausses parois (cet excédent s’appelle la bune), dont la hauteur est marquée à un des cordeaux par une épingle qui le traverse.

Dans notre hypothèse, l’ouverture du dessus répondant à celle d’en-bas, formera un quarré, dont les côtés de la thuyere & du contrevent auront vingt-six pouces, & la rustine vingt-deux.

Nous aurons donc un vuide pyramidal de quinze piés d’élévation, sans compter les trois du bas montés perpendiculairement, dont la base a de deux côtés soixante pouces terminés à vingt-six, & des deux autres cinquante-quatre terminés à vingt-deux. Suivant cette proportion, les parois auront la pente rentrante d’un peu plus de treize lignes par pié de deux côtés, & d’un peu moins de treize lignes des deux autres.

Les fourneaux se chargent par l’ouverture de dessus E, du côté de la rustine ; & c’est la raison pour laquelle en élevant ces parois, on tient ce côté droit & uni, pendant qu’on ceintre les autres de deux à trois pouces de profondeur, à commencer au-dessus des échelages, & finissant insensiblement au-dessous de la charge. La charge est l’espace supérieur d’environ trois piés & demi de profondeur, qu’on remplit de nouveaux alimens, quand les précédens sont descendus à cette diminution.

Les parois élevées jusqu’à la hauteur prescrite, on fait l’ouvrage.

Le fond E est la premiere pierre qui se pose bien de niveau, & capable seule de remplir l’étendue de l’ouvrage & du devant. Nous avons dit que le fond seroit à un pié au-dessus de la voûte de la croisée ; mais négligeant le plus ou le moins en cette partie, le fond doit être posé treize pouces sous la véritable position de la thuyere.

Le fond posé, du milieu des dessus vous laissez tomber un plomb, & vous tracez un point sur le fond. Du milieu du dessus du côté de la rustine, vous laissez encore tomber le plomb, & du point qu’il donnera avec celui que vous avez, vous ferez une ligne droite qui fait l’angle du reste.

A six pouces & demi de cette ligne, du côté de la thuyere & du contrevent, vous en tracez deux autres paralleles CC.

Vous avez deux blocs de pierre préparés, de la longueur de trois piés & demi ou quatre piés, sur douze à treize pouces de hauteur appellés costieres, que vous placez de chaque côté à fleur de ces deux dernieres lignes qui laissent entr’elles un espace E de treize pouces ; à six pouces & demi du milieu vous placez une autre pierre D ou plusieurs, bien maçonnées faisant une pareille épaisseur, terminant le quarre du côté opposé au-devant, & qui s’appelle la rustine. Sur les costieres qui doivent affleurer le devant

du fourneau, à treize pouces du point du milieu, vous tracez une ligne pour placer une pierre taillée qu’on appelle tympe. Avant de la poser, vous placez à l’extrémité des costieres, sur le devant, un morceau de fer D de quatre pouces en quarré, qu’on nomme aussi tympe ; & sur ce morceau de fer, une plaque de fonte qu’on appelle taqueret, qui termine le dessus de l’ouvrage en-dehors ; ce qui doit aller jusqu’à la premiere marastre B, contre laquelle il appuie : vous posez ensuite la tympe en pierre qui doit exactement remplir l’espace depuis les treize pouces jusqu’à la tympe en fer. Vous renforcez extérieurement le bout des costieres de deux petits murs CC, de façon que vous avez à découvert le devant de l’ouvrage.

La thuyere M se pose sur sa costiere répondant précisément au point du milieu, & sur une plaque de fer battu mise bien de niveau ; c’est à cette partie qu’il faut employer les meilleurs matériaux, & faire une maçonnerie qui indépendamment de la thuyere se trouve à treize pouces du fond.

Depuis la thuyere on éleve la maçonnerie MK tout-autour également d’environ deux piés de hauteur ; puis on travaille en retraite KP en plan incliné, pour joindre les parois à la hauteur de six piés P, à compter du fond L ; à cette hauteur on a soin de tracer une ligne pour servir de regle. Cette maçonnerie se nomme étalage ou échelage.

Toute la partie dont nous venons de parler LMKP se nomme l’ouvrage, terminé en-devant de la largeur de sept pouces, par de l’arbue pétrie qu’on appelle bouchage C ; & le reste est fermé d’une grosse pierre F, ou ancienne enclume de forge qu’on nomme la dame. La position de la dame est bonne quand entre elle & les tympes CD, on peut commodément travailler avec des ringards dans toutes les parties inférieures de l’ouvrage & supérieures, jusqu’au-devant de la thuyere. On éleve ou baisse la dame suivant le besoin.

La thuyere est un morceau de fer battu comme de la tole, recourbé en demi-cercle concentrique, dont celui de dehors donne quinze à vingt pouces d’ouverture, & celui contre l’ouvrage deux pouces : cela est assez ressemblant à une hure de sanglier. Cette partie pose sur une plaque de fer battu, le tout scellé dans la maçonnerie ; de façon néanmoins que dans un besoin extrème, on peut le réparer sans endommager la maçonnerie, que pour cet effet nous avons dit devoir se soûtenir par elle-même.

Au-dessus & sur le bord extérieur des trois côtés du massif, on bâtit de la hauteur de sept à huit piés, un mur de dix-huit ou vingt-quatre pouces d’épaisseur, qui s’appelle bataille AAA : le quatrieme côté P est pour le passage des ouvriers. Les batailles set vent à rompre l’effort des vents, & à en mettre à l’abri la bune & les ouvriers. Quelques-uns profitent de ces murs pour élever une espece de lanterne de pierre choisie ou de brique en façon de dôme : la méthode en est très-bonne. Il faut que les chargeurs puissent passer commodément dessous ; & que le milieu répondant à la bune, laisse libre sortie à la flamme & aux vapeurs. A ce défaut on éleve sur la moitié de la bune un mur de garantie pour les ouvriers.

Les outils pour le travail sont de gros & petits ringards, des crochets T pour le devant, un plus petit & une spatule V de fer à longue queue pour la thuyere ; des paniers pour porter le charbon & la mine ; des pelles de fer ; un bout de planche triangulaire S, avec un manche dans le milieu appellé charrue, pour tracer le moule de la gueuse ; une plaque de fer & un marteau pour sonner les charges, afin d’avertir le maître ou commis ; une romaine X, avec ses crochets Z, & un pié de chevre r ; des roulets pour transporter les gueuses.