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qu’on nomme calx nativa, & que c’est improprement qu’on lui donnoit le nom de gypsum. Voyez le traité des pierres de Théophraste, avec les notes de M. Hill, pag. 209. & suiv. de la traduction tranç. & Plinii hist. nat. lib. XXXVI. cap. xvij.

Les gypses varient pour la couleur & pour la figure ; ce qui fait qu’on en compte plusieurs especes. La plus connue & la plus ordinaire est celle qu’on nomme pierre à plâtre ; elle se divise en masses d’une figure indéterminée : au premier coup-d’œil elle a quelque ressemblance avec de la pierre à chaux, & quelquefois avec le grès. Elle paroît remplie de points luisans, qui la font en quelque sorte ressembler à du sucre brut ; elle est ou blanche, ou d’un gris clair, ou semée de taches, ou rougeâtre, ou verdâtre, &c. On en trouve de cette espece à Montmartre & dans plusieurs autres endroits des environs de Paris, où on la nomme pierre a plâtre, ou moilon de plâtre.

Le gypse feuilleté, qui s’appelle aussi pierre spéculaire & miroir des ânes, est une pierre formée par l’assemblage de plusieurs feuillets très-minces & transparens, placés les uns sur les autres, & qui se séparent aisément. Ces feuillets sont quelquefois presque aussi transparens que du verre ; quelquefois ils sont colorés, ce qui fait que leur assemblage forme une pierre jaunâtre, ou brune & luisante, sur laquelle on voit des iris ou les couleurs de l’arc-en-ciel. Ce gypse ressemble beaucoup au talc, qu’on nomme glacies mariæ, ou verre de Russie : voilà pourquoi plusieurs auteurs l’ont confondu avec lui, quoiqu’il en differe par les propriétés. Le gypse feuilleté devient blanc, & perd sa transparence dans le feu ; au lieu que le talc n’y éprouve aucun changement. Ce gypse a aussi de la ressemblance avec le spath feuilleté & rhomboïdal ; mais ce dernier est une pierre calcaire. On trouve aussi de la pierre spéculaire ou du gypse feuilleté dans les carrieres de Montmartre ; on regarde le plâtre qui en est fait, comme le plus pur. Il y a du gypse dont les lames ou feuillets sont disposés confusément : quelques auteurs le nomment gypse ardoisé. Il ne differe de l’autre que par l’arrangement de ses parties, qui font qu’il est plus ou moins opaque. Quelquefois les lames du gypse feuilleté se réunissant par une de leurs extrémités, forment différens angles plus ou moins aigus ; comme on peut le remarquer dans le gypse feuilleté de Montmartre ; souvent l’espace compris entre les deux angles, est rempli d’une substance étrangere qui est calcaire.

Le gypse strié est une pierre formée par un assemblage de filets ou d’aiguilles, paralleles les unes aux autres ; ce qui fait qu’elle ressemble parfaitement à de l’asbeste, ou à de l’amiante : quelques auteurs l’ont abusivement nommé alun de plume.

Les gypses crystallisés sont des pierres dont la figure varie ; elle est tantôt rhomboïdale, tantôt par filets, tantôt en pyramides de différentes grandeurs ; mais le plus souvent en colonnes, assez semblables aux crystaux du sel de Glauber : ces crystallisations gypseuses se reconnoissent aisément à leur peu de consistence & de dureté. C’est improprement que quelques auteurs ont donné le nom de sélénite à cette espece de gypse.

Le gypse solide est une pierre dont les parties sont liées si étroitement, qu’on a de la peine à distinguer la figure des parties qui la composent : cette pierre a de la transparence, & ressemble assez à de la cire blanche. On en fait en Allemagne des figures assez agréables.

Un très-grand nombre de naturalistes dont l’autorité est d’ailleurs respectable, mettent l’albâtre au rang des gypses ; mais cela demande une explication. Ces auteurs semblent avoir donné le nom d’albâtre à

une pierre qui, à la vérité, lui ressemble beaucoup, tant par son tissu que par sa blancheur, par les veines & les couleurs qu’on y remarque. Cette pierre, qui est un vrai gypse, se trouve sur-tout en différentes parties de l’Allemagne, & c’est sur elle que M. Pott a fait toutes ses expériences pour découvrir la nature de la pierre gypseuse : mais le véritable albâtre, & sur-tout celui que nous connoissons sous le nom d’albâtre oriental, dont on fait des tables, des colonnes, des manteaux de cheminées, & d’autres ouvrages, doit être regardé comme une pierre calcaire, puisqu’il fait effervescence avec les acides, & se change en chaux par la calcination. Ferrante Imperato regarde l’albâtre comme une stalactite, & il y a toute apparence que c’est le marbre qui produit cette stalactite. On peut voir plusieurs de ces albâtres en stalactite, dans le cabinet du jardin du Roi à Paris. Ainsi la pierre que MM. Wallerius & Pott nomment albâtre, & qu’ils placent parmi les gypses, n’a rien de commun, sinon la ressemblance extérieure, avec ce que nous entendons par albâtre.

M. Wallerius met aussi la pierre phosphorique, appellée pierre de Bologne, au rang des gypses ; mais de son aveu même elle est calcaire, puisqu’il dit qu’elle fait effervescence avec les acides. Le même auteur dit dans ses remarques, que tous les gypses acquerent par la calcination la propriété de luire dans l’obscurité, tout comme les pierres calcaires & les marbres ; mais M. Pott nous apprend que ses expériences lui ont fait voir le contraire. M. Wallerius met aussi la pierre néphrétique au rang des gypses, tandis qu’il lui attribue de même la propriété d’être soluble dans les acides. Voyez la minéralogie de Wallerius, tome I. pag. 98. & suiv. de la traduction françoise.

Le célebre M. Pott, dans sa lithogéognosie, fait une classe particuliere des gypses ; au lieu que d’autres auteurs pensent qu’on ne doit en faire qu’une soûdivision des pierres calcaires ; qu’elles n’en different qu’accidentellement & par des qualités qui ne sont point de l’essence de la pierre : ainsi ils regardent le gypse comme une pierre calcaire modifiée. M. de Justi est de ce sentiment, dans son plan du regne minéral, §. 410. & suiv.

M. Macquer regarde le plâtre comme une chaux grossiere, & croit que le gypse n’est point composé de parties homogenes, comme la pierre à chaux ; mais qu’il entre deux especes de pierres dans sa composition, dont l’une est calcinable, & l’autre ne l’est point ; il dit que c’est pour cela que le plâtre prend corps avec l’eau, & se durcit avec elle sans addition de sable, parce que le plâtre est une chaux qui porte déjà son sable avec elle. Voyez les mémoires de l’académie royale des Sciences, année 1747, page 65. & suiv.

Quoi qu’il en soit de tous ces sentimens, voici les différences qui se trouvent entre le gypse & la pierre à chaux. 1°. Le gypse, soit cru, soit calciné, ne fait point d’effervescence avec les acides, tels que l’eau-forte, l’esprit de sel, &c. au lieu que toute pierre calcaire s’y dissout très-promptement & avec effervescence, soit avant, soit après la calcination. Quand une pierre gypseuse fait effervescence, c’est une preuve qu’elle n’est point pure, mais mêlangée avec quelque substance calcaire. Cependant M. de Justi prétend, dans sa minéralogie, que les gypses se dissolvent dans les acides lorsqu’ils ont été divisés & atténués, & qu’il y en a même qui se dissolvent avec une effervescence plus considérable que le marbre. Il faut que cet auteur ait été trompé par des pierres calcaires qui ressembloient à du gypse, ou par des pierres gypseuses, mêlées de parties calcaires. 2°. La pierre à chaux calcinée donne une substance qui s’échauffe fortement lorsqu’on la mêle avec de