quantité de salive. Il suit de ces faits, que l’écoulement de la salive n’est point un symptome particulierement propre à la perforation du canal salivaire ; & que pour tarir cet écoulement lorsqu’il vient de la glande parotide, l’application des remedes dessicatifs ou des cathérétiques, & même la simple compression, sont les moyens capables de conduire à la consolidation parfaite de l’ulcere.
La guérison du canal salivaire ne s’obtient pas si facilement ; il faut avoir recours à des moyens plus efficaces. Dans une plaie qui avoit ouvert le canal salivaire supérieur, & qui étoit restée fistuleuse, M. le Roy, chirurgien de Paris, jugeant qu’il employeroit inutilement les dessicatifs les plus puissans & les consomptifs les plus efficaces, imagina qu’il falloit ouvrir une nouvelle route, par laquelle la salive seroit portée dans la bouche comme dans l’état naturel. Il se servit d’un cautere actuel pour percer la joue du fond de l’ulcere dans la bouche, dans le dessein de causer une déperdition de substance, afin que la salive pût passer librement, sans qu’on eût à craindre l’obstruction de ce conduit artificiel avant la consolidation parfaite de l’ulcere extérieur. Et en effet, l’ouverture fistuleuse externe fut guérie en fort peu de tems & sans la moindre difficulté. Dans cette cure, la premiere que nous connoissions en ce genre, la Chirurgie a, pour ainsi dire, créé un nouveau conduit, & l’on a changé la fistule externe en une interne au grand soulagement du malade.
C’est en suivant les mêmes principes, quoique par un procédé un peu différent, que M. Monro, professeur de Chirurgie à Edimbourg, a guéri un ulcere de même nature. Le malade à chaque repas moüilloit entierement une serviette en huit doubles par la salive qui sortoit d’un petit trou qu’il avoit au milieu de la joue, à la suite de l’application d’un caustique. A l’inspection de cette maladie, M. Monro jugea qu’il falloit faire couler la salive dans la bouche par une ouverture artificielle : il pratiqua cette opération en dirigeant la pointe d’une grosse alêne de cordonnier dans l’ouverture du conduit, obliquement vers le dedans de la bouche & en-devant. Il passa un cordon de soie dans cette ouverture, & en lia les deux bouts vers l’angle de la bouche, sans serrer cette anse. Le passage dans lequel le cordon étoit engagé devint calleux ; ce qu’on reconnut, dit M. Monro, par la liberté qu’on avoit de mouvoir le seton dans cette ouverture, sans causer de la douleur au malade. Au bout de trois semaines on retira le cordon, & l’ulcere extérieur guérit en très-peu de tems. Voilà quelles ont été jusqu’à présent les ressources connues de la chirurgie moderne contre la fistule du canal excréteur de Stenon. L’obligation où j’ai été de répondre à des consultations sur cette maladie, m’a fait faire des réflexions qui m’ont ramené à une méthode plus simple, plus douce, & beaucoup plus naturelle. L’opération proposée, malgré les succès qu’elle a eu, me paroît fort éloignée de la perfection qu’on doit chercher. L’orifice supérieur de l’ouverture artificielle qu’on pratique, se trouve plus éloignée de la source de la salive, que la fistule qu’on se propose de guérir ; l’humeur doit donc avoir plus de facilité à sortir par le trou fistuleux extérieur que par l’ouverture intérieure ; & il n’y auroit rien de surprenant, si après cette opération le malade restoit avec un trou fistuleux à la joue, qui permettroit à la salive de se partager également, & de couler en partie sur la joue & en partie dans la bouche. M. Coutavoz, membre de l’académie royale de Chirurgie, m’a communiqué un fait qui prouve la vérité de cette réflexion, & dont j’ai fait usage dans une dissertation sur cette matiere dans le III. vol. des mémoires de l’académie. J’ai traité en l’année 1753, un bourgeois de Paris, qui avoit un ulcere
fistuleux au canal de Stenon : il en sortoit une quantité considérable de salive, sur-tout lorsqu’il parloit ou qu’il prenoit ses repas : son tempérament s’altéroit par la perte excessive de cette humeur. Je sondai le canal depuis la fistule jusqu’à la bouche, & je le trouvai parfaitement libre. La salive étoit portée dans ce conduit jusqu’auprès de son orifice dans sa bouche, où elle étoit arrêtée par le coude que le conduit salivaire fait à son extrémité ; car en pressant legerement la joue depuis la commissure des levres vers la fistule, j’en faisois sortir une certaine quantité de salive. La résistance de l’embouchure du canal dans la bouche, déterminoit la sortie constante de la salive par l’ouverture de la fistule, qui ne présentoit aucun obstacle. Je me déterminai à rétablir l’usage naturel du conduit en le dilatant avec une meche composée de six brins de soie. Un fil en anse passé, au moyen d’une aiguille d’argent flexible, de l’orifice de la fistule dans la bouche, me servit à tirer cette meche. Cette opération ne causa pas la moindre douleur. Dès le jour même que le seton fut placé, il servit de filtre à la salive, il n’en coula plus sur la joue que quelques gouttes pendant que le malade mangeoit. Les jours suivans je passai legerement la pierre infernale sur les chairs de l’ulcere, parce qu’elles étoient fort molles. Cessant d’être abreuvées, elles devinrent bien-tôt fermes & vermeilles. Le dixieme je supprimai deux brins de la meche à l’occasion d’un peu de tension le long du canal. Le lendemain j’ôtai les autres. La salive continua de passer par la route naturelle, & la consolidation fut parfaite au bout de quelques jours. Le seton avoit augmenté le diametre du canal & redressé son extrémité, & l’on sait que la seule dilatation des orifices des conduits excréteurs, suffit pour procurer un écoulement abondant de l’humeur au passage de laquelle ils servent. La lecture de cette observation à l’académie royale de Chirurgie, a rappellé à M. Morand, qu’il avoit traité il y a quinze ans, un homme, lequel à la suite d’un abcès à la joue, portoit depuis un an une fistule au canal salivaire. M. Morand essaya de sonder le canal depuis la fistule jusque dans la bouche, & l’ayant trouvé libre, il y passa quelques brins de fil déroulés en forme de seton : cette pratique a eu le plus parfait succès. Ce fait confirme la doctrine que j’avois établie.
Les fistules urinaires viennent de l’écoulement de l’urine.
La perforation contre nature des parties qui servent à son séjour ou à son passage ; les pierres retenues dans les reins, occasionnent quelquefois des abcès à la région lombaire, dont l’ouverture laisse passer l’urine. L’extraction de la pierre est absolument nécessaire pour pouvoir guérir ces conduits fistuleux. Voyez Néphrotomie. M. Verdier ancien professeur & démonstrateur royal d’Anatomie aux écoles de Chirurgie, rapporte dans un mémoire sur les hernies de la vessie, qu’un chirurgien de campagne avoit ouvert la vessie dans l’aine, croyant ouvrir un abcès. La sortie continuelle de l’urine par la plaie, ne laissa aucun doute sur le vrai caractere de la maladie primitive. Pour guérir une fistule de cette nature, il suffit de déterminer le cours des urines par la voie naturelle, au moyen d’une algalie. L’expérience a montré qu’il étoit utile dans ce cas, de faire coucher le malade du côté opposé à la plaie de l’aine. Voyez le mémoire de M. Verdier, dans le second volume de l’académie royale de Chirurgie. L’usage de la sonde est absolument nécessaire dans les plaies du corps de la vessie, pour empêcher l’épanchement de l’urine dans la capacité du bas-ventre ; ce qui seroit une cause de mort. Barthelemi Cabrol, chirurgien de Montpellier & anatomiste royal de la faculté de Medecine, a vû en 1550 à Beaucaire, une fille de