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la continuation de la vis, sans qu’il soit besoin d’appuyer davantage. Les copeaux que l’V coupe, sortent par une ouverture latérale X, fig. 6. pratiquée au corps de la filiere vis-à-vis de la gorge de l’V ; comme on le voit en pm, fig. 7. En une seule opération la vis est achevée. Pour faire les écrous, on se sert de taraux d’acier, semblables à ceux dont on se sert pour le fer & le cuivre décrits ci-dessus, lorsque les écrous sont petits ou médiocres : mais lorsqu’ils excedent deux, trois ou quatre pouces en diametre, comme ceux des presses & pressoirs, dont quelques-uns ont jusqu’à dix-huit ou vingt pouces de diametre ; l’usage des taraux de fer est impossible, tant à cause du grand poids dont ils seroient, que de la longueur excessive des tourne-à-gauche, dont il faudroit alors se servir ; & aussi du danger qu’il y auroit d’éclater & faire fendre les pieces de bois les plus massives, en forçant les taraux dans les trous destinés à devenir des écrous. C’est un exemple entre mille autres, qui peut faire connoître combien on s’écarteroit de la vérité, en concluant qu’une opération qui réussit très bien dans le petit & le médiocre, devroit avoir le même succès en grand.

Pour réussir à faire les grands écrous, & parer les inconvéniens dont il est fait mention, on a inventé une sorte de taraux fort ingénieux, représentés dans la même Planche, qui consistent en un cylindre de bois, fig. 13. de même grosseur que le corps de la vis, non compris le filet, & dont la partie supérieure est gravée d’une hélice concave, formée par un trait de scie, & dont on trouve l’épure en divisant la circonférence du cylindre, en un grand nombre de parties égales, par des signes paralleles à l’axe, & la longueur, par des cercles paralleles aux bases, que l’on trace sur le tour à des distances égales entre eux, & égales à la distance des filets de la vis. On divise ensuite l’intervalle compris entre deux cercles paralleles, en autant de parties égales que l’on a tracé de lignes verticales ; & portant successivement, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, &c. parties sur les verticales, à compter toûjours d’un même cercle, on a les abscisses de l’hélice, auxquelles les portions de circonférence comprises entre les lignes verticales paralleles à l’axe, servent d’ordonnées : par ce moyen, on a un très-grand nombre de points de la courbe, que l’on grave ensuite par un trait de scie. On peut aussi tracer cette courbe par le moyen exposé à l’art. Etau.

On perce dans la partie inférieure une mortoise perpendiculaire à l’axe, dans laquelle on place un fer de grain d’orge, fig. 14. que l’on y assujettit avec un coin, comme les fers des outils des Menuisiers : ce fer doit être d’une telle longueur, qu’il n’y ait que sa pointe qui excede un peu la surface du cylindre ; & le tarau est achevé.

La figure 14. représente le guide, qui n’est autre chose qu’une planche quarrée, percée dans le milieu d’un trou, de calibre au cylindre, sur le bord duquel on a adapté un plan incliné de biais rstu, dont la hauteur vu est égale à la hauteur ou distance des filets de la vis. Ce plan incliné est recouvert d’une plaque de forte tole rst, assûrée avec des vis à bois, & dont l’arête interne saille en dedans du trou. Pour former cette plaque, on décrit deux cercles concentriques ; le diametre de l’extérieur est égal au diametre extérieur du plan incliné, & l’intérieur égal au diametre du tarau, figure 13. moins deux fois la profondeur du trait de scie qui forme l’hélice du tarau ; on perce ensuite cette plaque de tole, ne reservant que la couronne comprise entre les deux cercles concentriques, que l’on coupe suivant un rayon, afin de pouvoir élever une partie en v, & abaisser l’autre en t sur le plan incliné du guide où on la fixe, comme on a dit, par des vis. La planche ABCD est encore percée dans les quatre coins, pour laisser passer des

clous qui servent à fixer le guide sur la piece de bois que l’on veut tarauder.

Pour se servir de ces taraux ; après avoir percé le trou qui doit devenir écrou, on fixe la piece de bois sur un établi de menuisier, par le moyen d’un valet, comme on peut voir fig. 16. & après avoir passé le tarau dans son guide, on attache ce dernier sur la piece de bois, au moyen de trois ou quatre clous ; & ayant adapté ensuite une manivelle ou un tourne-à-gauche, on fait tourner le tarau, dont le grain d’orge ou fer grate ou coupe le bois de la surface interne du trou, & commence à y former une hélice concave ; puisqu’à mesure que le tarau tourne, la plaque de fer du guide qui est engagée dans le trait de scie du tarau, le contraint de descendre. Par cette premiere opération, l’écrou n’est que tracé. Pour achever de le former entierement, on releve le tarau, auquel on donne plus de fer, c’est-à-dire que l’on fait sortir davantage le grain d’orge, qui en tournant le tarau, élargit & approfondit le filet concave de l’écrou, que l’on acheve par ce moyen, en réitérant cette opération autant de fois qu’il est nécessaire.

On peut, comme nous avons dit, avec cette machine faire de très-gros écrous sans y employer une force considérable, puisque l’on est maître de prendre plus ou moins de bois, en donnant plus ou moins de fer : d’ailleurs on ne court jamais de risque de fendre la piece de bois que l’on taraude, & dont on doit observer d’évaser un peu l’entrée avant d’y appliquer le guide. (D)

Filiere, terme de Tireur d’Or, morceau de fer ou d’acier, percé de plusieurs trous inégaux, par où l’on tire & fait passer l’or, l’argent, le fer, & le cuivre, pour le réduire en fils aussi déliés que l’on veut. Ces trous, qui vont toûjours en diminuant, se nomment pertuis ; leur entrée est appellée embouchure, & la sortie œil ; & selon leurs différens usages on nomme ces morceaux ou plaques de fer, calibre, ou filiere, ou ras, ou prégaton, ou fer-à-tirer. On fait passer le lingot par environ quarante pertuis de la filiere, jusqu’à ce qu’on l’ait réduit à la grosseur d’une plume à écrire ; après quoi on le rapporte chez le tireur-d’or pour le dégrossir, par le moyen d’un banc scellé en plâtre qui est en maniere d’orgue, que deux hommes font tourner : là on le réduit à la grosseur d’un ferret de lacet, en le faisant passer par vingt pertuis, ou environ, de la filiere, qu’on appelle ras. Cela fait, & le fil d’or ayant été tiré sur un banc, appellé banc à tirer, on le fait passer par environ vingt pertuis de la filiere appellée prégaton, jusqu’à ce qu’il soit en état d’être passé avec la petite filiere appellée fer à tirer. On ouvre alors un pertuis appellé neuf ou fer à tirer, & on y passe le fil d’or ; puis on retrécit ce même pertuis avec un petit marteau, sur un ras d’acier ; & ensuite non-seulement on le polit avec de petits poinçons d’acier fort fins, mais on le rabat & repolit de la même sorte, jusqu’à ce que le fil d’or ne soit pas plus gros qu’un cheveu, ensorte qu’on puisse le filer sur de la soie. Lorsqu’il est en cet état, on l’écache entre deux rouleaux d’un petit moulin. Ils sont d’acier fort polis, & fort serrés sur leur épaisseur qui est d’un bon pouce, & ils en ont trois de diametre. On met le fil d’or entre deux, & l’on en tourne un avec la manivelle. Ce rouleau fait tourner l’autre ; & c’est ainsi que le fil s’écache : après quoi il est en état d’être filé sur la soie, pour les différens ouvrages où l’on a dessein de l’employer. Voyez Ductilité. Chambers.

Filiere, terme de Fauconnerie ; c’est une ficelle d’environ dix toises, qu’on tient attachée au pié de l’oiseau pendant qu’on le reclame, jusqu’à ce qu’il soit assûré.

Filiere, terme de Blason, qui se dit quelquefois du diminutif de la bordure, lorsqu’elle ne contient que la troisieme partie de la longueur de la bordure ordinaire. Dict. de Trévoux.