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gué parmi les peintres, s’il n’avoit eu l’imbécillité de laisser dans ses plus beaux ouvrages des fautes grossieres, afin de modérer les loüanges qu’une trop grande perfection pouvoit lui attirer. Mais Varchi (Benoist) natif de cette ville, s’est acquis de la considération par ses poésies italiennes & par d’autres écrits. Il mourut à Florence en 1566, âgé de 63 ans. Long. 28d. 59′. Lat. 43d. 44′. (D. J.)

FIEVRE en général, s. f. (Medec.) febris, πυρετὸς ; maladie universelle très-fréquente, qui en produit plusieurs autres, cause la mort par sa violence & ses complications, procure aussi très-souvent une heureuse guérison, & est quelquefois salutaire par elle-même.

Nature individuelle de la fievre. La nature de la fievre est si cachée, qu’on doit prendre garde de se tromper en la recherchant ; ce qui peut aisément arriver, à cause du grand nombre d’affections accidentelles dont elle est fréquemment accompagnée, & sans lesquelles cependant elle peut exister, & existe effectivement.

Pour éviter l’erreur, il faut envisager uniquement les symptomes qui sont inséparables de toutes especes de fievres, & pour lors on pourra parvenir à connoître la nature individuelle de la fievre. Aujourd’hui qu’on a saisi cette sage méthode, en écartant les hypothèses, fruits de l’intempérance de l’esprit, on est convaincu que c’est l’augmentation de la vîtesse du jeu des arteres qui constitue la fievre, & que la chaleur qui accompagne cette maladie, est l’effet de l’action accélérée des vaisseaux. La cause prochaine de la vélocité du pouls, est une plus fréquente contraction du cœur ; c’est donc l’effort que fait la vie, tant dans le froid que dans la chaleur, pour éloigner la mort.

Puisque la fievre consiste dans l’excès de l’action organique des arteres, c’est-à-dire dans cette action accélérée au-delà de l’état naturel, on peut, pour marquer toute l’étendue de son méchanisme, la définir avec M. Quesnay, une accélération spasmodique du mouvement organique des arteres, qui est excitée par une cause irritante, & qui augmente la chaleur du corps au-delà de celle de l’état naturel. Nous disons que dans la fievre l’accélération du mouvement des arteres est spasmodique, pour la distinguer de la simple accélération du pouls & de l’augmentation de chaleur excitées par des mouvemens véhémens du corps, qui s’exercent volontairement & sans altérer la santé.

Symptomes de la fievre. Les vrais symptomes ou les dépendances essentielles & inséparables dans toute fievre dont le méchanisme s’exerce librement, sont 1°. l’accélération de la vîtesse du pouls ; 2°. celle de la force du pouls ; 3°. le surcroît de chaleur ; 4°. l’augmentation du volume du pouls ; 5°. la respiration plus prompte ; 6°. le sentiment pénible de lassitude qui s’oppose aux mouvemens du corps.

Les trois premiers symptomes peuvent être regardés comme les symptomes primitifs de la fievre, desquels les trois autres résultent ; & quant au sentiment pénible de lassitude, il n’est sensible qu’aux malades même, le medecin ne le connoît que par leur récit. Ajoûtons que quoiqu’il n’y ait point de fievre dans lesquelles ces six symptomes ne se rencontrent, cependant la vîtesse du pouls est la seule chose qu’on observe en tout tems de la fievre, depuis le commencement jusqu’à la fin. Si le contraire arrive, c’est que la fievre n’est pas simple, & qu’elle est troublée par d’autres affections étrangeres, qui s’opposent à ses opérations salutaires.

Je n’ose mettre le frisson au rang des symptomes inséparables de la fievre, parce que cette maladie peut s’allumer & subsister indépendamment d’aucun frisson, sans qu’elle soit alors une maladie incomplete.

Il est bien vrai que la fievre existe avec le frisson, & qu’elle naît pour ainsi dire avec lui, mais c’est qu’alors la fievre n’a pas encore acquis son état parfait, puisqu’elle est au contraire empêchée par une autre affection spasmodique toute opposée, qui subsiste jusqu’à ce qu’elle l’ait dominée & dissipée.

Cours de la fievre. Quoi qu’il en soit, voici le cours de presque toute fievre qui procede des causes internes. Elle commence d’abord par un sentiment de froid & d’horripilation, lequel est plus grand ou plus petit, a plus ou moins de durée, est interne ou externe, selon les divers sujets, les différentes causes & la différente nature de la fievre. Alors le pouls devient fréquent, petit, quelquefois intermittent ; la pâleur, la rigidité, le tremblement, le froid, l’insensibilité saisissent souvent les extrémités ; on voit succéder ensuite une chaleur plus ou moins grande, qui dure peu ou beaucoup de tems, interne, externe, universelle, locale, &c. enfin dans les fievres intermittentes, ces symptomes se calment & se terminent par une parfaite apyrexie.

Affections morbifiques accidentelles à la fievre. Plusieurs medecins ont entierement défiguré le caractere essentiel & individuel de la fievre, en y joignant diverses affections morbifiques qui se trouvent quelquefois, mais non toûjours, avec la fievre, & qui par conséquent ne constituent point son essence. Les affections morbifiques dont je veux parler, sont les contractions, la foiblesse, les irrégularités du pouls, les angoisses, la débilité, les agitations du corps, les douleurs vagues, la grande douleur de tête, le délire, la sueur, l’assoupissement, l’insomnie, le vertige, la surdité, les yeux fixes ou hagards, le vomissement, le hoquet, les convulsions, la tension du ventre, des hypochondres, l’oppression, les exanthèmes, les aphthes, la soif, le dégoût, les rots, le froid, le tremblement, l’ardeur, la sécheresse, la couleur pâle & plombée de la peau, les mauvaises qualités des urines, leur suppression, le diabetes, les sueurs immodérées, la diarrhée, les hémorrhagies, &c.

Mais quelque nombreuses, foibles ou considérables que soient ces affections morbifiques, elles ne naissent point de la fievre ; elles sont produites par différentes causes, qui sont même opposées au méchanisme de la fievre ; par conséquent on doit les regarder comme des symptomes étrangers à cette maladie. Les medecins qui ont voulu les établir comme des signes pathognomiques de la fievre, n’ont fait qu’introduire une multitude d’erreurs pernicieuses dans la pratique de la Medecine.

Causes de la fievre. La cause prochaine de la fievre reconnoît elle-même une infinité d’autres causes immédiates, qu’on peut néanmoins diviser en causes particulieres à chaque cas, & en causes communes à plusieurs. Les dernieres dépendent ordinairement de l’air, des alimens, d’un genre de vie commun, & on les nomme causes épidémiques.

Les causes particulieres peuvent se réduire à neuf ou dix classes capitales ; 1°. aux mixtes sensibles qui renferment naturellement des hétérogenes qui nous sont pernicieux ; je rapporte à cette classe les remedes actifs employés à contre tems ou à trop grande dose, car ils peuvent exciter ou augmenter la fievre, & produire d’autres accidens plus fâcheux ; ce sont même de véritables poisons entre les mains des medecins qui suivent de fausses routes dans la cure des maladies.

2°. Aux matieres acres prises en aliment, en boissons, en telle abondance qu’elles irritent, suffoquent, obstruent & se corrompent. Nos alimens sont même exposés à être dépravés, lorsqu’ils sont reçûs dans l’estomac & dans les intestins.

3°. A l’application extérieure de matieres acres qui piquent, corrodent, déchirent, brûlent, enflamment.