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entrent ensuite dans le duodenum. Le mélange de ces deux biles est peut-être utile pour la parfaite digestion : quoi qu’il en soit, elles sont bien différentes l’une de l’autre ; car celle de la vésicule du fiel est plus jaune, plus épaisse, & plus amere que celle du conduit hépatique, ce qu’on ne peut vraissemblablement attribuer qu’au séjour de la bile dans la vésicule du fiel.

Il est très-vraissemblable 1° que la bile du foie coule quelquefois dans la vésicule ; 2° qu’elle acquiert la qualité de bile cystique en croupissant dans la vésicule ; 3° que son amertume vient peut-être aussi des glandes qui sont placées dans la membrane de cette vésicule, & qu’arrosent les arteres cystiques, comme il arrive dans la membrane du conduit auditif ; 4° tous les canaux qui du foie & du pore hépatique se rendent à la vésicule du fiel, & y portent sans cesse le suc hépatique, ont été justifiés par les découvertes de Glisson, de Verheyen, de Perrault, & de Bianchi. Consultez-les.

Observations particulieres. Il s’est trouvé plusieurs fois des pierres ou des concrétions pierreuses dans la vésicule du fiel : ce sont des faits très-connus. Hildanus a vû une de ces pierres de la grosseur d’une noix. Hoffman rapporte avoir trouvé dans la vésicule d’un fourbisseur, extrèmement élargie & aggrandie, trois mille six cents quarante-six grains de bile coagulée & pétrifiée. En effet toutes les concrétions pierreuses qu’on a remarquées par hasard dans la vésicule du fiel, sont formées par l’épaississement & le desséchement de la bile, ce qui est prouvé par la nature de ces pierres ; car elles conservent la couleur & le goût de la bile, & elles s’enflamment lorsqu’on les met sur le feu : on a vû même de ces pierres qui ayant traversé le conduit cystique & le cholidoque, sont parvenues jusqu’à l’intestin duodenum, & le malade les a rendues par les selles.

Jeux de la nature. L’anatomie nous apprend que la vésicule du fiel manque quelquefois dans l’homme, comme dans les animaux. L’histoire de l’académie des Sciences (année 1705, pag. 33), en fournit un exemple. Dans un enfant de neuf jours, mort d’un polype qui fermoit l’embouchure du ventricule droit, comme auroit fait un bouchon de figure conique, M. Littre n’a trouvé nulle apparence de vésicule, quoique le foie fût d’ailleurs très-bien formé, ainsi que les autres parties du bas-ventre. Les deux arteres qui doivent se distribuer à la vésicule, se distribuoient au foie à l’endroit où elles auroient dû être ; & le canal hépatique beaucoup plus gros que de coûtume, se terminoit à l’ordinaire par un seul tronc dans l’intestin duodenum.

Mais si la vésicule du fiel manque quelquefois, ne se trouve-t-elle point aussi d’autres fois double ? Il est vrai qu’il y a dans les ouvrages des Anatomistes plusieurs observations, qui disent qu’on a trouvé au foie deux vésicules du fiel : cependant malgré ces attestations, on doit regarder ce jeu de la nature comme un des plus rares, au cas même qu’il ait existé. Il est certain qu’on rencontre souvent dans les vaches & les veaux, la vésicule du fiel fourchue ; mais trouver dans un homme deux vésicules du fiel bien distinctes, c’est un phénomene qui demande des témoignages irréprochables pour pouvoir être cru. Si l’on trouvoit deux vésicules, il y auroit aussi en même tems deux canaux cystiques, sans quoi l’on ne pourroit soûtenir que la vésicule du fiel fût entierement double. Toutes les vésicules du fiel que Ruysch a eu occasion de voir, étoient fourchues & n’avoient qu’un seul canal cystique. Article de M. le Chev. de Jaucourt.

Fiel, (Econ. anim.) c’est l’humeur jaune, onctueuse, & amere, qu’on trouve dans une petite vessie attachée à la partie concave du foie. Voy. Foie, & l’article précédent. C’est une sorte de bile qui, ou-

tre les qualités qu’elle a contractées par la secrétion

qui s’en est faite dans les vaisseaux du foie propres à cet effet, en a acquis de nouvelles par son séjour dans cette vessie, où elle est retenue comme dans un reservoir.

Cependant comme la bile n’est en quantité remarquable que dans ce reservoir, qu’elle se présente moins dans les pores biliaires, dans les conduits hépatiques & cholidoques, qu’elle n’est pas sans mélange dans le canal intestinal ; on ne fait communément point de distinction entre le fiel & la bile proprement dite, c’est-à-dire telle qu’elle est dans ses conduits excrétoires, avant d’avoir contracté aucune sorte d’altération étrangere à la secrétion qui s’en est faite du sang de la veine-porte, & à l’élaboration qu’elle reçoit dans ses colatoires : c’est pourquoi les Grecs n’avoient qu’un nom commun χολὴ, pour désigner ces deux sortes d’humeurs qu’ils confondoient l’une avec l’autre.

La distinction entre le fiel & la bile n’est admise que par les Anatomistes & par les Physiologistes, qui donnent le nom de fiel à la petite portion de la bile, qui est continuellement portée & déposée dans la vésicule, & qui y contracte par son séjour des qualités qui lui sont propres ; savoir la couleur jaune, l’amertume, l’acrimonie, l’alkalescence, & la consistance, que n’a point la plus grande partie de la bile, c’est-à-dire celle qui coule tout de suite & sans interruption vers le conduit cholidoque, à mesure qu’elle est séparée dans le foie, pour être de ce conduit versée dans les intestins. Voyez Bile, Foie, (Physiol.).

Ainsi ces deux biles, quoique de la même nature dans leur origine, dans leurs vaisseaux secrétoires, étant devenues si différentes par le cours continuel de l’une, & la stagnation de l’autre, sont conséquemment destinées à opérer des effets différens, qui décident de leur usage respectif. Il est donc très-important de ne pas confondre ces effets, soit relativement aux fonctions auxquelles ils servent dans l’état de santé, soit par rapport aux symptomes qui en sont produits, & aux signes diagnostics & prognostics qu’on peut en tirer dans les maladies.

Il conviendroit encore que dans les expériences, les analyses chimiques, faites pour en tirer des conséquences sur la nature de la bile, on ne se bornât pas à n’opérer que sur la bile cystique, ou sur son mélange avec la bile hépatique, pris dans le canal cholidoque, ou à la sortie de ce canal. Il faudroit tâcher de ramasser assez de chacune des deux biles séparément, pour pouvoir les soûmettre à l’examen chacune à son tour ; en recueillir & en comparer les résultats : ce qui seroit d’une grande utilité pour la théorie & pour la pratique de la science médicinale. Voyez Foie, (Pathol.) (d)

Fiel des Animaux, (Pharm. & Mat. méd.) ce n’est autre chose que la bile cystique, desséchée à l’air dans sa propre vésicule. Voyez Bile.

Le fiel de bœuf a été mis autrefois au rang des médicamens qu’on gardoit dans les boutiques, & qu’on faisoit entrer dans quelques préparations officinales, destinées à l’usage extérieur.

Il entre dans la composition de l’onguent d’arthanita, qui est un de ceux de la pharmacopée de Paris. Je ne lui connois d’ailleurs aucun usage, soit extérieur, soit intérieur. C’est ici une matiere qui pourroit bien être négligée mal-à-propos, & dont il seroit très-raisonnable, ce semble, d’essayer les propriétés, principalement dans certains vices de digestion. (b)

Fiel, (pierre de) Peinture. La pierre de fiel se trouve dans les amers ou fiels des bœufs plus ou moins grosse, ronde ou ovale ; étant broyée sur le porphyre très-fine, elle fait un jaune doré très-beau : elle