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celle de 1572 ; & il cite une autre observation ancienne, par laquelle il paroît qu’on avoit vû une nouvelle étoile dans le même endroit en 1264.

Keill prétend que c’étoit la même étoile, & ne doute point qu’elle ne reparoisse de nouveau dans 150 ans.

Fabricius a découvert une autre nouvelle étoile dans le cou de la Baleine, qui parut & disparut différentes fois dans les années 1648 & 1662. Son cours & son mouvement ont été décrits par Bouillaud.

Simon Marius en a découvert une autre dans la ceinture d’Andromede en 1612 & 1613 : Bouillaud prétend qu’elle avoit déjà paru dans le quinzieme siecle. Kepler en a apperçû une autre dans le Serpentaire, & une autre de la même grandeur dans la constellation du Cygne proche du bec, en l’année 1601, qui disparut en 1626 ; qui fut encore observée par Hevelius en 1659, jusqu’en l’année 1661 ; & qui reparut une troisieme fois en 1666 & en 1671, comme une étoile de la sixieme grandeur.

Il est certain par les anciens catalogues, que plusieurs des anciennes étoiles ne sont plus visibles à présent : cela se remarque particulierement dans les Pleyades ou sept étoiles, dont il n’y en a plus que six que l’œil peut appercevoir : c’est une observation qu’Ovide a faite il y a long-tems, témoin ce vers de cet auteur :

Quæ septem dici, sex tamen esse solent.

Ce qu’il y a de plus remarquable, c’est qu’il y a des étoiles dont la lumiere, après s’être affoiblie successivement & par degrés, s’éteint enfin absolument pour reparoître ensuite ; parmi ces dernieres étoiles, celle du cou de la Baleine est célebre parmi les Astronomes. Il arrive pendant huit ou neuf mois qu’on cesse absolument de voir cette étoile, & les trois ou quatre autres mois de l’année, on la voit augmenter ou diminuer de grandeur. Quelques philosophes ont cru que cela venoit uniquement de ce que la surface de cette étoile est couverte, pour la plus grande partie, de corps opaques ou taches semblables à celles du Soleil ; qu’il n’y reste qu’une partie découverte ou lumineuse ; & que cette étoile achevant successivement les révolutions ou rotations autour de son axe, ne sauroit toûjours présenter directement sa partie lumineuse : ensorte que nous-devons l’appercevoir tantôt plus, tantôt moins grande, & cesser de la voir entierement, lorsque sa partie lumineuse n’est plus tournée vers nous. Ce qui a fait soupçonner que c’étoient des taches qui causoient principalement ces changemens, c’est qu’en diverses années l’étoile ne conserve pas une régularité constante, ou n’est pas précisément de la même grandeur : tantôt elle égale en lumiere les plus belles étoiles de la seconde grandeur, tantôt celles de la troisieme ; en un mot l’augmentation ou la diminution de sa lumiere, ne répond pas à des intervalles égaux. Elle n’est visible quelquefois que pendant trois mois entiers : au lieu qu’on l’a vûe souvent pendant quatre mois & davantage. Cependant cette opinion des Philosophes sur l’apparition & la disparition des étoiles n’est guere vraissemblable, si on considere que nonobstant quelques irrégularités, l’étoile de la Baleine paroît & disparoît assez régulierement dans les mêmes saisons de l’année ; ce qu’on ne doit pas raisonnablement soupçonner dans l’hypothèse des taches qui peuvent se détruire ou renaître sans observer d’ordre, soit pour les tems, soit pour les saisons : il est bien plus simple de supposer, comme a fait M. de Maupertuis dans son livre de la figure des astres, que ces sortes d’étoiles ne sont pas rondes comme le Soleil, mais considérablement applaties, parce qu’elles tournent sans doute très-rapidement autour de leur axe. Cette supposition est d’autant plus légitime, que l’on voit

parmi nos planetes celles qui tournent le plus rapidement autour de leur axe, être bien plus applaties que les autres. Jupiter, selon l’observation de M. Picard faite en 1668, & selon les mesures de MM. Cassini & Pound, est considérablement applati ; ce qu’on ne peut pas dire des autres planetes : aussi Jupiter tourne-t-il très-rapidement sur son axe. Pourquoi donc ne seroit-il pas permis de supposer des étoiles fixes plus ou moins applaties, selon qu’elles tournent plus ou moins rapidement ? d’ailleurs comme de grosses planetes peuvent faire leurs révolutions autour de ces étoiles, & changer à notre égard la situation de l’axe de ces corps lumineux, il s’ensuit que selon leur inclinaison plus ou moins grande, ils paroîtront plus ou moins éclatans, jusqu’à ne nous envoyer qu’une très-petite quantité de lumiere. Voy. la figure des astres de M. de Maupertuis, chap. vij. pag. 114. seconde édition.

Montanari dans une lettre qu’il écrivit à la société royale en 1670, observe qu’il y avoit alors de moins dans les cieux deux étoiles de la seconde grandeur dans le navire Argo, qui ont paru jusqu’à l’année 1664 ; il ne sait quand elles commencerent à disparoître, mais il asiure qu’il n’en restoit pas la moindre apparence en 1668 : il ajoûte qu’il a observé beaucoup d’autres changemens dans les étoiles fixes, & il fait monter ces changemens à plus de cent. Nous ne croyons pas cependant que ces prétendues observations de Montanari méritent beaucoup d’attention, puisqu’il est vrai, selon M. Kirch, que les deux belles étoiles que Montanari prétend avoir perdu de vûe, ont été apperçûes continuellement depuis Ptolomée jusqu’à ce jour à un signe au-delà, ou 30 degrés loin de l’endroit du ciel où on les cherchoit. Ces étoiles, dit Montanari, sont marquées β & γ dans Bayer, proche le grand chien. L’erreur des cartes de Bayer vient sans doute de ce que cet auteur s’en est rapporté aux traductions latines du texte de Ptolomée ; au lieu que l’édition greque de Basle nous apprend qu’il falloit chercher ces étoiles dans le vieux catalogue vers le 15 degré du Lion, & non pas au 15 de l’Ecrevisse.

Comme il y a des étoiles qui ne se couchent jamais pour nous (voyez Circonpolaire), il en est d’autres qui ne se levent jamais ; ce sont celles qui sont à une distance du pole austral, moindre que notre latitude. M. Halley en avoit déjà dressé un catalogue (voyez Constellation) ; M. de la Caille dans son voyage récent au cap de Bonne-Espérance, assûre avoir avoir déterminé en peu de tems la position de plus de 9800 étoiles comprises entre le pole austral & le tropique du capricorne ; il a construit un planisphere de 1930 de ces étoiles ; le tems en apprendra l’exactitude.

Nature des étoiles fixes. Leur éloignement immense ne nous permet pas de pousser bien loin nos découvertes sur cet objet : tout ce que nous pouvons en apprendre de certain par les phénomenes, se réduit à ce qui suit.

1°. Les étoiles fixes brillent de leur propre lumiere ; car elles sont beaucoup plus éloignées du Soleil que Saturne, & paroissent plus petites que Saturne : cependant on remarque qu’elles sont bien plus brillantes que Saturne ; d’où il est évident qu’elles ne peuvent pas emprunter leur lumiere de la même source que Saturne, c’est-à-dire du Soleil. Or puisque nous ne connoissons point d’autre corps lumineux dont elles puissent tirer leur lumiere, que le Soleil, il s’ensuit qu’elles brillent de leur propre lumiere.

On conclut de-là 2°. que les étoiles fixes sont autant de soleils : car elles ont tous les caracteres du Soleil ; savoir l’immobilité, la lumiere propre, &c. Voyez Soleil.

3°. Qu’il est très-probable que les étoiles ne sont pas plus petites que notre Soleil.