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* EUPHRONE, s. f. (Myth.) déesse de la nuit. Son nom est composé de εὖ, bien, & de φρήν, conseil, c’est-à-dire qui donne bon conseil.

* EUPHROSINE, s. f. (Myth.) l’une des trois graces, celle qui représente le plaisir.

* EUPLOÉ, adj. pris subst. (Myth) surnom de Vénus, protectrice des voyageurs par mer. Il y avoit sur une montagne près de Naples, un temple consacré à Vénus Euploé.

EURE, (Géog. mod.) riviere qui prend sa source au Perche, en France ; elle se jette dans la Seine, un peu au-dessus du Pont-de-l’Arche.

EUREOS, (Hist. nat.) pierre semblable à un noyau d’olive ; elle étoit striée ou remplie de cannelures. Boece de Boot croit que c’est la même chose que ce que les modernes appellent pierre judaïque.

EVREUX, (Géog. mod.) ville de la haute Normandie, en France ; elle est située sur l’Iton. Long. 17. 48. 39. lat. 49. 1. 24.

EURIPE, s. m. (Belles-Lettr.) nom qu’on donnoit aux canaux pleins d’eau, qui ceignoient les anciens cirques. Tous ceux de la Grece avoient leurs euripes ; mais celui du cirque de Sparte, formé par un bras de l’Eurotas, acquit ce nom par excellence. C’étoit-là que tous les ans les Ephebes, c’est-à-dire les jeunes Spartiates qui sortoient de leur seizieme année, se partageoient en deux troupes, l’une sous le nom d’Hercule, l’autre sous le nom de Lycurgue ; & que chacune entrant dans le cirque par deux ponts opposés, elles venoient se livrer sans armes un combat, où l’amour de la gloire excitoit dans ce moment entre les deux partis, une animosité qui ne différoit guere de la fureur. L’acharnement y étoit si grand, qu’à la force des mains ils ajoûtoient celle des ongles & des dents, jusqu’à se mordre, pour décider de la victoire ; jamais ce combat ne se terminoit, qu’un des deux partis n’eût jetté l’autre dans l’Euripe. Il faut entendre là-dessus Cicéron, qui eut la curiosité d’aller voir ce spectacle à Lacédémone. Voici ses propres termes : Adolescentium greges Lacedæmone vidimus ipsi, incredibili contentione certantes, pugnis, calcibus, unguibus, morsu denique, ut exanimarentur priùs, quàm se victos faterentur.

Voilà comme les jeunes Lacédémoniens montroient ce qu’ils pourroient faire un jour contre l’ennemi. Aussi les autres peuples couroient à la victoire, quand ils la voyoient certaine ; mais les Spartiates couroient à la mort, quand même elle étoit assûrée, dit Séneque ; & il ajoûte, turpe est cuilibet viro fugisse, Laconi vero deliberasse ; c’est une honte à qui que ce soit d’avoir pris la fuite, mais c’en est une à un Lacédémonien d’y avoir seulement songé. Cet article est de M. le Chevalier de Jaucourt.

Euripe, (l’) s. m. Géog. petit détroit de la mer Egée si serré, qu’à peine une galere y peut passer, sous un pont qui le couvre entre la citadelle & le donjon de Négrepont. Tous les anciens géographes, historiens, naturalistes, & les poëtes même, ont parlé du flux & du reflux de l’Euripe ; les uns selon le rapport qu’on leur en avoit fait, & les autres sans l’avoir peut-être considéré assez attentivement en divers tems & en divers quartiers de la Lune. Mais enfin le P. Babin jésuite nous en a donné, dans le siecle passé, une description plus exacte que celle des écrivains qui l’ont précédé ; & comme cette description est insérée dans les voyages de M. Spon, qui sont entre les mains de tout le monde, j’y renvoye le lecteur.

Le docteur Placentia, dans son Egeo redivivo, dit que l’Euripe a des mouvemens irréguliers pendant dix-huit ou dix-neuf jours de chaque mois, & des mouvemens réguliers pendant onze jours, & qu’ordinairement il ne grossit que d’un pié, & rarement de deux piés. Il dit aussi que les auteurs ne

s’accordent pas sur le flux & le reflux de l’Euripe ; que les uns disent qu’il se fait deux fois, d’autres sept, d’autres onze, d’autres douze, d’autres quatorze fois en vingt-quatre heures : mais que Loirius l’ayant examiné de suite pendant un jour entier, il l’avoit observé à chaque six heures d’une maniere évidente, & avec un mouvement si violent, qu’à chaque fois il pouvoit faire tourner alternativement les roues d’un moulin. Hist. nat. génér. & part. tom. I. pag. 489. Voyez Goufre.

J’ajoûterai seulement que S. Justin & S. Grégoire de Nazianze se sont trompés, quand ils ont écrit qu’Aristote étoit mort de chagrin de n’avoir pû comprendre la cause du flux & du reflux de l’Euripe ; car outre que l’histoire témoigne que ce philosophe accusé faussement d’impiété, & se souvenant de l’injustice faite à Socrate, aima mieux s’empoisonner que de tomber entre les mains de ses ennemis ; il n’est pas plus vraissemblable qu’un homme tel qu’Aristote soit mort de la douleur de n’avoir pû expliquer un phénomene de la nature, qu’il le seroit que cette raison abrégeât les jours d’un petit-maître-L’ignorance éclairée & l’ignorance abécédaire ne troublent pas plus l’une que l’autre la tranquillité de l’ame. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

* EURIPIDE, s. m. (Hist. anc.) coup de dés qui valoit quarante. Cette dénomination vient ou d’Euripide qui fut un des quarante magistrats qui succéderent aux trente tyrans, & qui l’institua ; ou de ses collegues, qui par affection pour lui donnerent son nom à ce coup de dés victorieux.

EUROPE, (Géog.) grande contrée du monde habitée. L’étymologie qui est peut-être la plus vraissemblable, dérive le mot Europe du phénicien urappa, qui dans cette langue signifie visage blanc ; épithete qu’on pourroit avoir donné à la fille d’Agénor sœur de Cadmus, mais du moins qui convient aux Européens, lesquels ne sont ni basanés comme les Asiatiques méridionaux, ni noirs comme les Africains.

L’Europe n’a pas toûjours eu ni le même nom, ni les mêmes divisions, à l’égard des principaux peuples qui l’ont habité ; & pour les sous-divisions, elles dépendent d’un détail impossible, faute d’historiens qui puissent nous donner un fil capable de nous tirer de ce labyrinthe.

Mais loin de considérer dans cet article l’Europe telle que l’ont connue les anciens, dont les écrits sont parvenus jusqu’à nous, je ne veux dire ici qu’un seul mot de ses bornes.

Elle s’étend dans sa plus grande longueur depuis le cap de Saint-Vincent en Portugal & dans l’Algarve, sur la côte de l’Océan atlantique, jusqu’à l’embouchure de l’Obi dans l’Océan septentrional, par l’espace de 1200 lieues françoises de 20 au degré, ou de 900 milles d’Allemagne. Sa plus grande largeur, prise depuis le cap de Matapan au midi de la Morée jusqu’au Nord-Cap, dans la partie la plus septentrionale de Norwege, est d’environ 733 lieues de France de 20 au degré pareillement, ou de 550 milles d’Allemagne. Elle est bornée à l’orient par l’Asie ; au midi par l’Afrique, dont elle est séparée par la mer Méditerranée ; à l’occident par l’Océan atlantique, ou occidental, & au septentrion par la mer Glaciale.

Je ne sai si l’on a raison de partager le monde en quatre parties, dont l’Europe en fait une ; du moins cette division ne paroît pas exacte, parce qu’on n’y sauroit renfermer les terres arctiques & les antarctiques, qui bien que moins connues que le reste, ne laissent pas d’exister & de mériter une place vuide sur les globes & sur les cartes.

Quoi qu’il en soit, l’Europe est toûjours la plus petite partie du monde ; mais, comme le remarque