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Il y a le muscle épineux du dos, le grand épineux du dos, les épineux du cou, les interépineux du cou. Voyez Vertebre.

Sur l’omoplate & sur la partie supérieure de l’humérus, on remarque le sus-épineux & le sus-épineux. Voyez Omoplate.

L’artere épineuse est une branche de la maxillaire interne, voyez Maxillaire. (L)

EPINGLE, s. f. (Art. Méchaniq.) petit instrument de métal, droit & pointu par un bout, qui sert d’attache amovible au linge & aux étoffes, pour fixer les différens plis qu’on leur donne à la toilette, à l’ouvrage, & dans les emballages.

L’épingle est de tous les ouvrages méchaniques le plus mince, le plus commun, le moins prétieux, & cependant un de ceux qui demandent peut-être le plus de combinaisons : d’où il résulte que l’art, ainsi que la nature étale ses prodiges dans les petits objets, & que l’industrie est aussi bornée dans ses vûes, qu’admirable dans ses ressources ; car une épingle éprouve dix-huit opérations avant d’entrer dans le commerce.

1°. On jaunit le fil de laiton : il arrive de Suede ou de Hambourg, en bottes de 25 à 28 livres chacune, pliées en cercle comme un collier, d’où on les appelle aussi torques, & toutes noires de la forge : on les fait bouillir dans une chaudiere d’eau avec de la gravelle ou lie de vin blanc, environ une livre par botte. Un ouvrier les fesse à force de bras sur un billot de bois, avant de les faire bouillir : après une heure de feu, on les trempe dans un baquet d’eau fraîche, & on les rebat encore, observant de tremper & de battre alternativement. Ainsi dérouillées & assouplies, l’ouvrier replie le fil de laiton ébauché au-tour de son bras ; d’où il passe au tirage, après avoir séché au feu ou au soleil.

2°. On tire le fil à la bobille : cette opération se fait sur un banc ou établi, qui est une grosse table de bois en quarré, longue & fort épaisse. Voyez au bas de la Pl. I. fig. 4. Le fil s’entortille autour d’un moulinet ou devidoir 1, ou six branches enchâssées dans deux planches plates & rondes, celle d’en-bas plus grande que celle d’en-haut. Ce devidoir tourne sur un pivot qui le traverse au centre : vers l’autre extrémité est une filiere 3 ; c’est une piece de fonte d’un pié & demi de long, & d’un pouce d’épaisseur sur deux de largeur, percée à cent douze trous égaux : mais comme elle est d’une matiere malléable, on peut élargir ou diminuer les trous, selon la grosseur ou l’on veut réduire le fil à tirer. On se sert pour cela d’un poinçon 7 : après avoir battu la filiere à coups de marteau 11, & bouché ses trous avec un polissoir sur un chantier 13, on la fixe avec des coins entre deux crampons 44 de fer, panchée 3 au niveau de l’endroit de la bobille où le fil doit tourner. L’ouvrier ayant appetissé la pointe du fil avec une lime, sur un petit quarré de bois 12 qu’il appelle étibeau, il le fait passer par le trou de la filiere, & le tire d’abord avec des bequettes ou tenailles plates en dedans, & mordantes comme une lime (car elles ont des dents), jusqu’à ce qu’il puisse l’accrocher à la bobille par un ou deux petits anneaux de fer. La bobille est un cylindre de bois 2, fixé autour d’un arbre de fer qui le traverse au centre par la base : elle tourne au moyen d’une manivelle de fer, attachée à la bobille par une patte 10 avec un manche mobile de bois ou de corne. L’ouvrier (fig. 4. vignette de la Pl. I.) prend le manche à deux mains, & tourne en frotant de tems en tems le fil à l’huile avec un pinceau ou un linge, afin de le rendre plus coulant autour de la bobille. Avant de passer le fil dans le trou de la filiere, on se sert d’une jauge pour déterminer la mesure : la jauge est un fil d’archal (VIII. fig. 5. au bas de la même Planche)

qui se replie en serpentant. Elle a douze portes, six de chaque côté ; ce sont les points par où le fil d’archal se rapproche le plus : elles servent à fixer la grosseur où l’ouvrier doit reduire son fil, selon l’espece des épingles qu’il veut faire.

3°. On dresse le fil, (Pl. II. fig. 2. vignette). Sur une grosse. table à deux ou trois piés, est un moulinet autour duquel on met le fil qui sort de la bobille. A un pié de distance est un engin d, c’est-à-dire un morceau de bois plat & quarré fixé sur la table, & garni de sept à huit clous sans tête, placés de suite, mais à deux distances, de façon à former une équerre curviligne. Voyez dans la figure 17, au bas de la même Planche, le moulinet G, & l’engin avec les clous HK. Le dresseur fait passer le fil à-travers ces clous, devant le premier, derriere le second, &c. de façon qu’il prend une ligne droite, dont il ne peut s’écarter, à moins que les clous ne plient de côté ou d’autre ; mais alors on les redresse avec un marteau. Cette opération est d’autant plus délicate, que le moindre défaut rend le fil tors & inutile. Le dresseur saisit le fil avec des tenailles tranchantes, & recule en-arriere à la distance de 18 piés environ ; puis il revient cueillir sa dressée, c’est-à-dire trancher son fil avec les tenailles, pour commencer une seconde dressée de la même longueur.

4°. On coupe la dressée. L’ouvrier prend une boîte ou mesure de bois traversée ou terminée par une petite plaque de fer. Cette boîte a différens numeros, selon les diverses especes d’épingles ; il ajuste sa boîte à la dressée, & la coupe avec des tenailles tranchantes appellées triquoises, en autant de tronçons ou parties aliquotes, qu’elle contient de fois la longueur de la mesure, prenant 10 à 12 dressées à-la-fois ; puis il met les tronçons dans une écuelle de bois, g, fig. 3. vignette de la même Planche.

5°. On empointe. Un homme (fig. 6. même vign.) tourne une grande roue de bois, telle qu’on en voit chez les Couteliers, autour de laquelle est une corde de chanvre ou de boyau, aboutissant à la noix d’un arbre qui porte une meule dentelée. Cette meule est enchâssée dans un billot de bois, f, quarré & creux par le milieu. L’empointeur (figure 5.) se place les jambes repliées en croix contre les cuisses, sur une sellette en pente devant la meule ; prend une tenaillée, c’est-à-dire 12 à 15 tronçons à-la-fois ; les place entre les deux index & les pouces, l’un au-dessus de l’autre (fig. 16. au bas de la même Planche) ; applique les tronçons rangés en ligne sur la meule ; tire en baissant, & les faisant tourner au moyen des deux pouces qu’il avance & retire alternativement, afin que la pointe aille en s’arrondissant : c’est ainsi qu’il empointe les deux extrémités des tronçons l’une après l’autre.

6°. On repasse, c’est à-dire que la même opération se répete sur une meule voisine (fig. 7 & 8. vignette de la même Planche), plus douce que la premiere, afin d’affiler les pointes qui ne sont qu’ébauchées. C’est en quoi les épingles de Laigle & des autres villes de Normandie, sont préférables à celles de Bordeaux, où l’on ne donne qu’une façon à la pointe. Les meules sont d’un fer bien trempé, d’un demi-pié de diametre environ : elles sont couvertes de dents tout-autour, qu’on a taillées avec un ciseau sur des lignes droites tracées au compas. On remet les meules au feu, quand elles sont usées ; on polit la surface à la lime, & l’on y taille de nouvelles dents. L’axe des meules est un fuseau de fer, dont les extrémités pointues entrent dans deux tapons du bois le plus dur, qui servent de pivots ou de soûtien à la meule. L’empointeur appuie plus ou moins legerement, selon que sa pointe est avancée.

7°. On coupe les tronçons. Le coupeur prend une boîte de fer (fig. 15. au bas de la seconde Planche) ; il