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dont il s’agit est froide ou prise, sont le défaut ou la difficulté du mouvement, quelquefois la douleur que l’animal ressent, & la difficulté du mouvement tout ensemble, selon la différence des causes de la froideur. Les symptômes du desséchement sont une inégalité manifeste, & qui frappe dès qu’on examine les deux bras en même tems ; & leur diminution apparente & sensible, ainsi que l’impossibilité de les mouvoir, lorsque l’une & l’autre s’atrophient, ce qui n’arrive que rarement.

Il est certain que si l’on prévient les progrès de ces maladies par des résolutifs spiritueux & aromatiques, & par un exercice modéré, on pourra attirer dans ces parties les sucs qui les entretiennent & qui les nourrissent, & elles seront bientôt ranimées ; mais dès que le mal est ancien, nos tentatives sont infructueuses. On ne peut, en effet, se livrer raisonnablement à l’espoir de faire circuler des liqueurs dans des vaisseaux totalement obstrués & oblitérés. J’ai dit que la nutrition s’exécute dans les dernieres & dans les plus petites ramifications. Imaginons donc une partie privée depuis long-tems de la faculté d’agir, la circulation s’y rallentira ; & les liqueurs ne parvenant plus dès-lors dans les dernieres series des canaux, ces mêmes canaux, naturellement élastiques & disposés par conséquent à la contraction, se resserreront insensiblement & s’oblitéreront à la fin. Or par quel moyen r’ouvrira-t-on aux fluides cette voie, qui, une fois fermée, leur est à jamais interdite ? C’est assûrément tenter l’impossible & faire profession d’ignorance, que de l’entreprendre.

L’épaule ou l’omoplate peut être portée en-avant, en-arriere, en-haut ; elle peut être encore rapprochée des côtes. A l’égard du bras ou de l’humerus joint avec l’omoplate par une articulation très-libre, c’est-à-dire par genou, il peut se mouvoir en tout sens, en-avant, en-arriere, en-dedans, en-dehors, & en rond, en maniere de pivot, & en maniere de fronde. La libre exécution de tous les mouvemens permis à l’une & à l’autre de ces parties, est sans doute ce que tous les auteurs qui ont écrit sur le Manége, & principalement le duc de Newkastle, ont appellé la souplesse des épaules.

La nécessité de les faciliter à l’animal a été regardée, avec raison, par cet écrivain illustre, comme la base de toutes les actions auxquelles nous pouvons solliciter l’animal ; & ce n’est sans doute qu’à la force & à la solidité de cette maxime, toûjours présente à son esprit, que nous devons une foule de répétitions sur ce point, qui rendent son ouvrage prolixe sans le rendre plus instructif. Je tâcherai d’éviter ce défaut, & de ne pas mériter ce reproche.

Dès que nous connoissons les mouvemens dont l’épaule & le bras sont capables, & dès que nous sommes convaincus, qu’assouplir les parties d’un cheval quelconque n’est autre chose que leur faire acquérir par l’habitude la liberté de se mouvoir dans tous les sens qui leur sont possibles, il est aisé de juger par les effets qui peuvent résulter des leçons que nous donnons à l’animal, de celles qui sont les plus propres & les plus convenables à notre objet.

Toute action en-avant, en-arriere, & par le droit, opere nécessairement la flexion, l’élévation, l’extension, l’abaissement, & le port en-arriere des omoplates & des humerus, qui sont les principaux & les uniques agens d’où dépend réellement la translation de l’animal d’un lieu à un autre (voyez Manége). Ainsi le pas, le reculer, & principalement le trot déterminé & délié, qui excite ses parties à de grands mouvemens, sont des moyens très-efficaces pour les dénoüer & pour en faciliter le jeu dans les uns & dans les autres de ces sens ; ces allures sur des cercles, ou quoi qu’il en soit en tournant pour reprendre d’autres lignes droites, influe encore sur el-

les relativement au mouvement circulaire dont le

bras est doüé ; mais elles ne suscitent pas ce même mouvement dans toute son étendue ; & leur impression n’étant que foible & legere, & ne pouvant animer tous les ressorts qui l’effectuent, l’animal ne sauroit acquérir l’entiere facilité par cette voie.

Le duc de Newkastle est le premier qui nous en a ouvert une, en nous indiquant diverses leçons à donner sur les cercles larges & d’une piste ; je ne me propose ici, ni de les extraire, ni d’apprécier sa méthode. M. de la Gueriniere, à l’imitation de la Broue, a préféré les leçons données sur les quarrés, & admet celles des voltes, qu’il blâme d’ailleurs, parce qu’il croit qu’elles mettent le cheval sur le devant, dans la circonstance, ou pour éviter la trop grande sujétion de ce qu’il nomme l’épaule en-dedans, l’animal y porte trop cette même épaule ou y jette la croupe ; ainsi, d’un côté il improuve la pratique des cercles, & de l’autre il la présente comme une ressource dans le cas où la pratique des quarrés porte l’animal à se défendre. C’est sans doute d’après sa propre expérience, que M. de la Gueriniere a connu que la tête dedans, la croupe dehors, contraint & asservit beaucoup moins le cheval qui trace une figure ronde, que la tête dedans & la croupe dehors sur des lignes droites ; & c’est apparemment aussi d’après cette vérité dont il s’est convaincu, qu’il veut bien permettre de recourir au cercle pour procurer aux chevaux la premiere souplesse. Sans m’abandonner à l’examen de tous les raisonnemens auxquels il se livre, & sans perdre un tems précieux à marquer les contradictions qui en résultent, il me suffit que l’action sur la volte soit moins pénible, moins difficile à l’animal, pour que je lui donne la préférence sur toute autre.

On ne doit point oublier que mon unique intention est d’assouplir l’omoplate & l’humerus, & que je ne dois avoir à présent d’autre but que de solliciter le mouvement en rond, dont le bras principalement, ou son articulation sphéroïde, est susceptible ; penétré de l’importance dont il est de ne travailler d’abord toutes les portions dont la machine entiere est formée, que séparément & non ensemble (voyez Encolure) ; mon premier soin sera de diviser en quelque façon celles que j’ai déjà mises en jeu, & celles que je me propose de dénoüer ici, des côtes & de la croupe, sur lesquelles je ne dois rien encore entreprendre directement, & que je ne contraindrai dans mes opérations, qu’autant que leur connexion avec la tête, l’encolure, & les épaules pourra m’y obliger.

Les leçons par lesquelles j’ai provoqué les flexions latérales du cou & le port de la tête de côté & d’autre, m’offrent tous les moyens de parvenir à mes vûes. Je trouve en elles non-seulement l’avantage que je desire, eu égard à l’action circulaire, mais celui d’augmenter la facilité du pli, dont ces deux premieres parties ont déjà contracté l’habitude ; & c’est ainsi qu’une seule route me conduit à tout, assûre toûjours de plus en plus mes succès, & que j’ôte, en un mot, tout prétexte & toute idée de défense à l’animal, puisque je ne le soûmets à l’obéissance que par la liberté que je lui donne d’obeir.

Détournez legerement, au moyen du port de la rene de dehors en-dedans, & de l’approche de la jambe de ce même dedans, si la rene déterminante a besoin de ce secours, le cheval dont l’encolure est pliée, & qui par le droit & au pas regarde dans le centre (voyez Encolure), à l’effet de lui faire décrire des cercles d’une étendue proportionnée à son plus ou moins de disposition & de volonté. Aussi-tôt qu’il a quitté la ligne droite sur laquelle il cheminoit, augmentez subitement l’action de la rene de dedans à vous, & maintenant la rene de dehors dans un degré de tension, non aussi fort, mais seulement en rai-