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voient faire affirmer devant eux les gens des villages afin de ne les point traduire à la ville ; ceci confirme bien ce qui a déja été dit de la jurisdiction qu’avoient dès-lors les élus. L’on doit aussi remarquer à cette occasion, que les collecteurs avoient alors entant qu’asséieurs des tailles une portion de jurisdiction, puisqu’ils faisoient prêter serment devant eux aux gens de la campagne, par rapport à la déclaration de leurs facultés.

Il y eut en conséquence de l’ordonnance dont on vient de parler, des députés ou élus commis par les états dans chaque diocèse, & notamment en la ville de Paris, tant pour la ville que pour tout le diocèse.

Ces commissaires députés des états pour la ville & diocèse de Paris, donnerent le 20 Mars 1355, sous leurs sceaux une instruction pour les commis qu’ils envoyoient dans chaque paroisse de ce diocèse ; elle est intitulée, ordinatio per deputatos trium statuum generalium data : & à la marge il y a, declaratio subsidii, & personarum quæ tenentur ad subsidium. La piece commence en ces termes ; les députés pour faire lever & cueillir en la ville & diocèse de Paris le subside dernierement octroyé ; à tel, &c. & plus loin il est dit, pour ce est-il que par vertu du pouvoir à nous commis ; vous mandons & commettons que tantôt & sans délai ces lettres vûes, vous appelliez avec vous le curé de..... & par son conseil élisiez ou preniez trois ou quatre bonnes personnes de bon état de ladite paroisse avec lesquels vous alliez dans toutes les maisons demander la déclaration de leur état & vaillant ; c’est ainsi que se faisoit l’assiete de ces sortes d’impositions.

Le roi Jean par la même ordonnance dont on a déja parlé, établit aussi des élus pour le fait des monnoies ; il dit en l’article vij. nous par le conseil des superintendans élus par les trois états, élirons & établirons bonnes personnes & honnêtes, & sans soupçon pour le fait de nos monnoies, lesquelles nous seront serment en la présence desdits superintendans que bien & loyaument ils exerceront l’office à eux commis. Ces commissaires ou députés furent établis par lettres du 13 Janvier 1355.

Les députés particuliers sur le fait des aides furent qualifiés d’élûs dans une ordonnance que Charles dauphin de France, qui fut depuis le roi Charles V. donna au mois de Mars 1356, en qualité de lieutenant général du royaume pendant la captivité du roi Jean.

Il ordonne d’abord par le conseil des trois états, afin que les deniers provenans de l’aide ne soient point détournés de leur destination, qu’ils ne seront point reçûs par les officiers du roi ni par les siens, mais par bonnes gens sages, loyaux & solvables à ce ordonnés élus & établis par les gens des trois états tant ès frontieres qu’ailleurs où besoin sera ; que ces commis & députés généraux lui prêteront serment & aux gens des trois états ; que les députés particuliers feront de même serment devant les juges royaux des lieux & que l’on y appellera une personne ou deux de chacun des trois états. Il paroît que ces députés devoient avoir la même autorité que ceux qui avoient été établis dans les provinces par l’article ij. de l’ordonnance du 28 Décembre 1355.

Il devoit y en avoir trois dans chaque diocèse, cependant la distribution de leurs départemens étoit quelquefois faite autrement : en effet on voit par une commission donnée en exécution de cette ordonnance, que le diocèse de Clermont & celui de S. Flour avoient les mêmes élus. Cette même commission les autorisoit à assembler à Clermont, à S. Flour, ou ailleurs ; dans ces diocèses, tous ceux des trois états desdits diocèses que bon leur sembleroit pour raison de l’aide.

Le dauphin Charles promit que moyennant cette aide, toute taille, gabelle, & autres impositions cesseroient.

Et comme il avoit eu connoissance que plusieurs sujets du royaume avoient été fort grevés par ceux qui avoient été commis à lever, imposer & exploiter la gabelle, imposition & subsides octroyés l’année précedente ; que de ce que les commis levoient, il n’y en avoit pas moitié employée pour la guerre, mais à leur profit particulier ; pour remédier à ces abus, faire punir ceux qui avoient malversé, & afin que les autres en prissent exemple, le dauphin ordonna par la même loi que les élus des trois états par les diocèses sur le fait de l’aide, lesquels il commit à ce, verroient le compte des élus, impositeurs, receveurs, collecteurs de l’année précedente ; qu’ils s’informeroient le plus diligemment que faire se pourroit, chacun en leur diocèse, de ce qui auroit été levé de ces impositions, en quelle monnoie, & par qui, & le rapporteroient à Paris le lendemain de quasi-modo par-devers le roi & les gens des trois états, pour y pourvoir le mieux qu’il seroit possible.

Il est encore dit par la même ordonnance, que comme ceux qui étoient venus à Paris aux dernieres assemblées d’états, avoient encouru la haine de quelques officiers qui s’étoient efforcés de les navrer, blesser ou mettre à mort, & qu’il en pourroit arriver autant à ceux qui viendroient dans la suite à ces sortes d’assemblées, le prince déclare qu’il prend ces personnes sous la sauve-garde spéciale du roi son pere & de lui, & leur accorde que pour la sûreté & défense de leur vie, ils puissent marcher avec six compagnons armés dans tout le royaume toutes fois qu’il leur plaira. Il défend à toutes personnes de les molester, & veut qu’au contraire ils soient gardés & conservés par tout le peuple, & enjoint à tous juges de les laisser aller eux & leur compagnie par tout où il leur plaira, sans aucun empêchement pour raison du port d’armes, & de leur prêter main-forte en cas de besoin s’ils en sont requis, pour les causes dessus dites. On voit par-là que le port d’armes étoit dès-lors défendu. Cette ordonnance paroît aussi être la premiere qui ait établi la distinction des asséeurs & des collecteurs d’avec les élus.

L’instruction qui fut faite par les trois états de la Languedoïl sur le fait de cette aide, porte qu’il y auroit en la ville de Paris dix personnes, & dans chaque évêché trois personnes des états élus tant par les gens de Paris que des évêchés & diocèses autorisés de M. le duc de Normandie, (c’étoit le dauphin.)

Les bonnes villes & paroisses doivent élire trois, quatre, cinq, ou six personnes (qui sont en cet endroit les asséeurs) comme bon leur semblera, qui assoiront par serment ladite cueillete.

Il est aussi ordonné qu’il sera établi par les trois élus un ou plusieurs receveurs ès villes & évêchés de leur département (ce sont les collecteurs), qui recevront l’argent de ce subside en la maniere & au lieu ordonné par les élus.

Que les élus feront aussi-tôt publier que les gens d’église & les nobles ayent à donner la déclaration de leurs biens. Que les maires & échevins, & autres officiers des communes, ou les curés dans les lieux où il n’y a pas de commune, leur donneront aussi la déclaration du nombre de feux ; que les élus prendront note des bénéfices & de leur revenu, du nom des nobles & de leurs possessions, du nombre de feux de chaque lieu.

Enfin que les élus feront contraindre toutes lesdites personnes par leurs commis & députés, comme pour les propres dettes du roi, savoir, les gens du clergé vivans cléricalement, par les juges ordinaires de l’église ; & il semble par-là que les élus