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d’un canif ou d’un petit bistouri : le sang sort par cette ouverture : sans cette précaution il auroit pû se putréfier, & causer la chûte de l’ongle. Cette petite opération n’exige aucun pansement ; il suffit au plus d’envelopper l’extrémité du doigt avec une bandelette de linge fin pendant quelques jours. (Y)

ECLAIR, s. m. (Phys.) on donne ce nom à une grande flamme fort brillante qui s’élance tout-à-coup dans l’air, & qui se répand de toutes parts, mais cesse sur le champ.

Il fait des éclairs lorsque le tems est beau & serein, & de même que lorsque l’air est couvert de nuages ; mais on en voit rarement, sans avoir eu auparavant un ou plusieurs jours chauds : ils paroissent souvent sans qu’il y ait de tonnerre.

La matiere de l’éclair est composée de tout ce qu’il y a d’oléagineux & de sulphureux dans les vapeurs qui s’élevent de la terre. La flamme est d’autant plus grande, que la quantité de matiere réunie est plus considérable. Cette matiere prend feu par le mélange des vapeurs, & c’est dans ce cas-là qu’elle peut causer quelque dommage.

Quand la flamme parcourt d’un bout à l’autre avec beaucoup de vîtesse toute la traînée de la foudre, elle pousse ou emporte avec elle certaines parties qui ne sauroient s’enflammer avec la même vîtesse : lorsqu’elle les a rassemblées, qu’elle les a en même-tems fort échauffées, ensorte qu’elles puissent s’enflammer avec l’autre matiere, tout éclate & se disperse avec une violence étonnante, & on entend alors ce bruit qui retentit dans l’air, & auquel nous donnons le nom de tonnerre, & dont l’éclair est l’avant-coureur.

On voit souvent paroître dans l’air, avant qu’il fasse des éclairs & du tonnerre, des nuées épaisses & sombres, qui paroissent s’entre-choquer & se croiser en suivant toutes sortes de directions ; par où l’on peut juger sans peine du tems qu’on doit avoir bientôt après. La matiere de la foudre vient-elle après cela à prendre feu, ces nuées se condensent encore beaucoup plus qu’auparavant, & dans l’instant elles se convertissent en gouttes d’eau qui tombent en maniere de grosse pluie. Il est rare qu’un orage accompagné d’éclairs & de tonnerre, continue quelque tems sans qu’il survienne une grosse pluie. Lorsque ces sortes d’ondées viennent à tomber, elles emportent ordinairement avec elles beaucoup de cette matiere qui produit la foudre ; ce qui fait que l’orage cesse beaucoup plûtôt lorsqu’il pleut, que lorsqu’il fait un tems sec.

La nuée est aussi quelquefois si épaisse, qu’elle empêche de voir la lumiere de l’éclair ; desorte qu’on entend alors le tonnerre gronder, sans que l’éclair ait paru auparavant. Mussch. essai de Phys. §. 1702 & suiv. Voyez Foudre, Tonnerre.

Par l’intervalle de tems qui se trouve entre l’éclair & le coup de tonnerre, on peut juger, quoiqu’à la vérité assez grossierement, à quelle distance est le tonnerre : voici comment. On examinera sur une pendule à secondes, l’intervalle qui se trouve entre l’éclair & le coup ; & pour déterminer la distance où est le tonnerre, on prendra autant de fois 173 toises, qu’il y a de secondes écoulées entre le coup & l’éclair. Ce calcul est fondé sur ce que la lumiere de l’éclair vient à nos yeux presque dans un instant, au lieu que le bruit du coup employe un tems très-sensible pour arriver à notre oreille, le son ne parcourant qu’environ 173 toises par seconde. Au reste il est visible que ce moyen de déterminer la distance du tonnerre, ne peut être qu’assez grossier, comme nous l’avons dit ; car outre qu’une petite erreur dans l’observation du tems, en produit une de plusieurs toises, ce calcul suppose que le bruit du tonnerre

vienne toûjours directement à nous, & non par réflexion, ce qui est rare. (O)

Eclair, (Chymie métall.) lumiere ou fulguration vive & ébloüissante que donne l’argent en bain, dans l’instant où il perd son état de fluidité. Pour donner une juste idée de ce phénomene, on ne peut mieux le comparer qu’aux derniers traits de feu dardés par une lumiere ou un charbon prêt à s’éteindre. Il est à présumer qu’il est dû à des particules ignées pures, s’échappant avec rapidité hors du corps embrasé, soit par leur élasticité, soit par le rapprochement des parties de ce même corps ; & passant à-travers des pores, dans lesquels elles souffrent plusieurs réfractions, ainsi qu’on peut s’en convaincre dans un fourneau dont le feu est animé par le jeu de l’air. Si l’on y examine un espace étroit formé par l’écartement de trois ou quatre charbons, ou même l’extérieur de certains charbons en particulier, on y voit la même chose de la part des rayons de feu lancés à-travers la couche legere de cendres qui revêtent leur surface. On conçoit aisément que l’éclair est plus sensible dans un gros bouton que dans un petit, & quand l’argent est pur, que quand il contient encore quelques portions de cuivre ou de plomb. Le cuivre fait aussi son éclair, mais d’une autre façon que l’argent. On appelle ainsi les belles couleurs d’iris qui circulent rapidement à sa surface, quand il est raffiné & sur le point de se congeler. Quant aux circonstances qui précedent, accompagnent & suivent l’éclair, voyez les articles Essai, Affinage & Raffinage de l’argent. (f)

Eclair ou Jet de flamme, espece d’Artifice dont voici la composition.

Toutes les liqueurs spiritueuses & sulphureuses, comme l’eau-de-vie, l’esprit-de-vin, & plusieurs autres, étant jettées sur le feu d’une chandelle, ou encore mieux d’une lance à feu, s’allument en l’air si subitement, que la flamme s’étend dans tout l’espace où elle se trouve dans l’instant qu’une de ses parties touche le feu, & se consume avant qu’elle ait eu le tems de retomber, ce qui produit l’effet d’un éclair ; ainsi pour en faire paroître un sur un théatre d’artifice, il n’y a qu’à en pousser une bouffée avec une seringue par-dessus des lances à feu.

Il est une sorte d’eau plus propre à cet effet, qu’on appelle pour cette raison eau ardente, dont voici la composition.

On met dans une cornue ou dans un vase bien lutté, deux pintes de bon vinaigre, avec une bonne poignée de tartre de Montpellier, & autant de sel commun, & l’on fait distiller ce mêlange pour en tirer l’eau ardente. Quelques-uns y ajoûtent du salpetre, sans cependant qu’on s’apperçoive d’un plus grand effet ; mais on peut en diversifier la flamme, en mêlant dans la composition, de l’ambre & de la colophone.

On prend de cette eau dans une seringue, & on la jette de loin sur des lumieres de feu, de quelqu’espece qu’elles soient ; elle s’enflamme en l’air, & dis paroît dans un instant, comme un éclair.

ECLAIRCIE, s. f. (Marine.) on donne ce nom à ces intervalles de lumiere, ou même à ces espaces du ciel qui se découvrent & qui passent avec vîtesse, dans des tems de brume & de nuages. (Z)

ECLAIRCIR, EXPLIQUER, DEVELOPPER une matiere, un livre, une proposition, &c. synon. (Gram.) On éclaircit ce qui étoit obscur, parce que les idées y étoient mal présentées : on explique ce qui étoit difficile à entendre, parce que les idées n’étoient pas assez immédiatement déduites les unes des autres : on développe ce qui renferme plusieurs idées réellement exprimées, mais d’une maniere si serrée, qu’elles ne peuvent être saisies d’un coup d’œil. (O)