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adherent, avec beaucoup plus de soin & d’exactitude que de toute autre mine. Il n’est donc pas étonnant que le flux attaque promptement l’étain, & le vitrifie en conséquence de la dissipation du phlogistique occasionné par un feu continué beaucoup plus long-tems qu’il ne convient, sans compter que l’étain devient d’autant plus mauvais, qu’il est exposé plus long-tems à l’ardeur du feu. Néanmoins on peut juger de l’exactitude ou de l’inexactitude de l’opération par la perfection ou l’imperfection des scories salines, la dissémination des grains métalliques dans ces scories ou par les scories, provenant du métal détruit & réductible qui se trouve principalement dans le voisinage du culot. On peut inférer de tout ce qui vient d’être dit, qu’il faut avoir recours à une autre méthode par laquelle on puisse voir ce qui se passe dans les vaisseaux pendant l’opération. Elle consiste à placer un creuset dans un fourneau de fusion, à y jetter en deux ou trois fois rapprochées, quand il sera d’un rouge de cerise, le mêlange de mine & de flux, & de le recouvrir ; quelque minutes après, on en éloigne les charbons avant que de le découvrir. Alors si l’on voit le flux en fonte bien liquide & bouillant paisiblement sans écume, il faut l’ôter & le laisser refroidir. On le casse pour en avoir le culot.

La mine de fer se grille comme celle du plomb, mais plus fortement, & on la torréfie une seconde fois. On la mêle exactement avec trois parties de flux, composé d’une partie de verre pilé, d’une demi-partie de fiel de verre & de poussiere de charbon on couvre le tout de sel commun. On place le creuset dans le fourneau à vent : on le casse quand il est refroidi pour en avoir le culot.

Quoique la torréfaction enleve la plus grande partie du soufre & de l’arsenic à la mine de fer, néanmoins il en passe encore dans le bouton une quantité qui l’aigrit. C’est pour lui enlever ces dernieres portions qu’on mêle aux mines de fer des absorbans terreux dans les travaux en grand, & qu’on forge ensuite la fonte, comme aussi pour lui enlever la terre non métallique qu’elle contient. Cet article est de M. de Villiers.

ESSAIM, s. m. (Hist. nat. Insectolog.) volée d’abeilles qui sortent d’une ruche ou d’un tronc d’arbre pour aller se loger ailleurs ; c’est ce qu’on appelle un essaim ou un jetton. Les essaims quittent la ruche en différens tems, relativement à la température du climat ou de la saison. Dans ce pays-ci c’est au plûtôt à la mi-Mai, & au plus tard après la mi-Juin. On sait qu’une ruche est en état d’essaimer, c’est-à-dire de donner un essaim, lorsqu’on y voit des abeilles mâles que l’on nomme faux-bourdons. S’il y a une très grande quantité d’abeilles dans une ruche, & si on en voit une partie qui se tienne au-dehors contre la ruche ou sur le support, il est à croire qu’il en sortira un essaim ; mais ce signe est équivoque : la plus grande certitude est lorsque les abeilles ne sortent pas de la ruche pour aller dans la campagne en aussi grand nombre qu’à l’ordinaire, alors on peut compter sur un essaim pour le jour même.

Dans les ruches qui doivent bien-tôt essaimer, il se fait pour l’ordinaire un bourdonnement le soir & pendant la nuit ; quelquefois dans la même circonstance on n’entend, même en écoutant de près, que des sons clairs & aigus qui semblent n’être produits que par l’agitation des ailes d’une seule mouche. Ordinairement les essaims ne paroissent pas avant les dix ou onze heures du matin, ni après les trois heures du soir, selon l’exposition de la ruche. La chaleur que les mouches y produisent par leur grand nombre étant augmentée par l’ardeur du soleil, oblige l’essaim à sortir ; quelques heures d’un tems chaud & couvert ne sont pas moins efficaces pour cet effet,

qu’un coup de soleil très-chaud : au contraire des jours trop froids pour la saison empêchent la sortie des essaims. Lorsque l’essaim est prêt à prendre l’essor, il se fait un grand bourdonnement dans la ruche, & plusieurs mouches en sortent : mais l’essaim ne subsisteroit pas s’il ne s’y trouvoit une reine, c’est-à-dire une abeille femelle. Dès qu’elle quitte la ruche, elle est suivie d’un grand nombre d’abeilles ouvrieres, & en moins d’une minute toutes celles qui doivent composer l’essaim s’élevent en l’air avec la reine, elles voltigent, & quelques-unes se posent sur une branche d’arbre pour l’ordinaire, d’autres s’y rassemblent ; la reine se tient à quelque distance de ce grouppe, & s’y joint lorsqu’il a grossi à un certain point. Alors toutes les abeilles s’y réunissent bientôt ; & quoiqu’elles soient à découvert, elles y restent en se tenant cramponnées les unes aux autres par les jambes : on ne voit voltiger autour du grouppe, qu’autant de mouches qu’il s’en trouve autour d’une ruche dans un tems chaud : mais lorsqu’il n’y a point d’abeille femelle dans un essaim, il revient bien-tôt à l’ancienne ruche.

S’il ne se trouve pas auprès des ruches quelques arbres nains auxquels les essaims puissent s’attacher, s’il n’y a que des arbres élevés, l’essaim prend son vol si haut & va si loin qu’il est souvent difficile de le suivre. Le meilleur moyen pour l’arrêter, est de jetter en l’air du sable ou de la terre en poudre qui retombe sur les mouches, & les oblige à descendre plus bas & à se fixer. On est aussi dans l’usage de frapper sur des chauderons ou des poëles, sans doute pour effrayer les abeilles par ce bruit comme elles le sont par celui du tonnerre qui les fait retourner à leur ruche lorsqu’elles se trouvent dans la campagne ; mais il ne paroît pas que le bruit des chauderons fasse beaucoup d’impression sur les abeilles, car celles qui sont sur des fleurs ne les quittent pas à ce bruit.

Lorsque le soleil n’est pas trop ardent, on peut mettre l’essaim dans une ruche une demi-heure après qu’il est rassemblé, & que ses plus grands mouvemens ont été calmés ; on peut aussi attendre jusqu’à une heure ou deux avant le coucher du soleil. Mais si l’essaim étoit exposé à ses rayons, il pourroit changer de place, & se mettre dans un lieu où il seroit plus difficile à prendre : dans ce cas il n’y a pas de tems à perdre. Lorsqu’il se trouve fixé sur une branche d’arbre peu élevée, il est aisé de le faire passer dans une ruche. On la renverse, & on la tient de façon que l’ouverture soit sous l’essaim, on secoue la branche qui le soûtient, & il tombe dans la ruche ; il suffit même que la plus grande partie de l’essaim y entre dès qu’on a retourné la ruche & qu’on l’a posée à terre près de l’arbre, le reste y vient bientôt. Mais si plusieurs mouches retournoient sur la branche où étoit l’essaim, il faudroit la frotter avec des feuilles de sureau & de rue dont elles craignent l’odeur ; y attacher des paquets de ces herbes, ou enfin y faire une fumigation avec du linge brûlé, pour faire fuir les mouches & les obliger à aller dans la ruche.

Lorsque l’essaim est sur un arbre si élevé ou dans des branches si touffues qu’on ne puisse pas en approcher la ruche, on le fait tomber sur une nappe, & on l’enveloppe pour le descendre ; en développant la nappe, on pose la ruche sur l’endroit où il se trouve le plus de mouches, & par des fumigations on oblige les autres, s’il est nécessaire, à entrer dans la ruche. On peut aussi emporter l’essaim en coupant la branche à laquelle il tient, les mouches ne se disperseront pas si on attend pour cette opération que le soleil soit couché. Lorsque l’essaim est entré dans le trou d’un arbre ou d’un mur, on peut en retirer les mouches avec une cuillere, & les jetter dans la