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Decisiones Burdigalenses, sont des arrêts du parlement de Bordeaux donnés par Boarius. (A)

Décisions de la Chapelle de Toulouse, sont un recueil des jugemens rendus dans la chapelle archiépiscopale de Toulouse, sous le titre de decisiones capellæ Tolosanæ : l’auteur est Jean Corserius official de Toulouse ; son recueil contient 501 décisions qui regardent principalement les matieres ecclésiastiques, & la forme de procéder dans les cours d’église : il y a aussi quelques autres questions de droit qui y sont traitées, mais légerement. Aufrerius professeur de droit, official de Toulouse, & conseiller au parlement, a fait des additions sur presque toutes ces décisions. Voyez la préface de M. Bretonnier, dans son recueil de questions, & l’hist. littéraire de Lyon, par le P. Colonia, tome II. vers la fin, à l’article de M. Bretonnier. (A)

Décisions du Conseil, sont les résolutions prises au conseil des finances sur les requêtes, mémoires, & placets qui y sont présentés. Ces décisions sont des arrêtés sommaires, qui se mettent au bas du mémoire ou placet sans rendre de jugement en forme. (A)

Décisions de Justinien, sont les cinquante ordonnances que cet empereur fit après la publication de son premier code, par lesquelles il décida les grandes questions qui partageoient les jurisconsultes. (A)

Décisions de la Rote, sont les jugemens rendus par le tribunal de la rote à Rome : il y en a un recueil sous le titre de decisiones rotæ novæ & antiquæ, imprimé en 1515. Voyez Rote. (A)

DECISOIRE, adj. (Jurisp.) signifie ce qui sert à la décision d’une contestation.

Les moyens litis décisoires, sont ceux qui servent à la décision du fonds. On suit à cet égard la loi du lieu qui régit les parties ou les biens ; au lieu que dans les choses qui ne concernent que la forme ou l’instruction appellée litis ordinatoria, on suit l’usage du siége où l’on procede.

Serment décisoire, est celui duquel dépend la décision de la contestation. Voyez Serment. (A)

DECIZE, (Géog. mod.) ville de France, au Nivernois, proche la Loire. Long. 21. 6′. 18″. lat. 46. 50′. 24″.

* DECLAMATEUR, s. m. On donne ce nom à tout orateur boursouflé, emphatique, foible de pensée, & bruyant d’expression. L’éloquence sera nécessairement foible ou déclamatoire, toutes les fois que le ton ne sera pas convenable à la chose. Voyez l’article Déclamation, (Belles lettres.)

DÉCLAMATION, s. f. (Belles lettres.) c’est l’art de rendre le discours. Chaque mouvement de l’ame, dit Cicéron, a son expression naturelle dans les traits du visage, dans le geste, & dans la voix.

Ces signes nous sont communs avec d’autres animaux : ils ont même été le seul langage de l’homme, avant qu’il eût attaché ses idées à des sons articulés, & il y revient encore dès que la parole lui manque ou ne peut lui suffire, comme on le voit dans les muets, dans les enfans, dans ceux qui parlent difficilement une langue, ou dont l’imagination vive ou l’impatiente sensibilité repugnent à la lenteur des tours & à la foiblesse des termes. De ces signes naturels réduits en regle, on a composé l’art de la déclamation.

Comme cet art ne convient décemment qu’au théatre, nous ne croyons devoir en appliquer les regles qu’à la déclamation théatrale. Porter en chaire ou au barreau l’artificieux apprêt du ton, du geste, & du visage, c’est donner à la vérité le fard du mensonge, & à la justice le manége de la séduction. En

un mot, l’orateur qui compose sa déclamation, est un comédien qui s’exerce. Voyez Prononciation.

Déclamation théatrale. La déclamation naturelle donna naissance à la Musique, la Musique à la Poésie, la Musique & la Poésie à leur tour firent un art de la déclamation.

Les accens de la joie, de l’amour, & de la douleur sont les premiers traits que la Musique s’est proposé de peindre. L’oreille lui a demandé l’harmonie, la mesure & le mouvement ; la Musique a obéi à l’oreille ; d’où la mélopée, Pour donner à la Musique plus d’expression & de vérité, on a voulu articuler les sons donnés par la nature, c’est-à-dire, parler en chantant ; mais la Musique avoit une mesure & un mouvement reglés ; elle a donc exigé des mots adaptés aux mêmes nombres ; d’où l’art des vers. Les nombres donnés par la Musique & observés par la Poésie, invitoient la voix à les marquer ; d’où l’art rythmique : le geste a suivi naturellement l’expression & le mouvement de la voix, d’où l’art hypocritique ou l’action théatrale, que les Grecs appelloient orchesis, les Latins saltatio, & que nous avons pris pour la Danse.

C’est là qu’en étoit la déclamation, lorsqu’Eschyle fit passer la tragédie du chariot de Thespis sur les théatres d’Athenes. La tragédie, dans sa naissance, n’étoit qu’une espece de chœur, où l’on chantoit des dithyrambes à la loüange de Bacchus ; & par conséquent la déclamation tragique fut d’abord un chant musical. Pour délasser le chœur, on introduisit sur la scene un personnage qui parloit dans les repos. Eschyle lui donna des interlocuteurs ; le dialogue devient la piece, & le chœur forma l’intermede. Quelle fut dès-lors la déclamation théatrale ? Les savans sont divisés sur ce point de littérature.

Ils conviennent tous que la Musique étoit employée dans la tragédie : mais l’employoit-on seulement dans les chœurs, l’employoit-on même dans le dialogue ? M. Dacier ne fait pas difficulté de dire ; c’étoit un assaisonnement de l’intermede & non de toute la piece ; cela leur auroit paru monstrueux. M. l’abbé Dubos convient que la déclamation tragique n’étoit point un chant, attendu qu’elle étoit réduite aux moindres intervalles de la voix : mais il prétend que le dialogue lui-même avoit cela de commun avec les chœurs, qu’il étoit soumis à la mesure & au mouvement, & que la modulation en étoit notée. M. l’abbé Vatri va plus loin : il veut que l’ancienne déclamation fût un chant proprement dit. L’éloignement des tems, l’ignorance où nous sommes sur la prosodie des langues anciennes, & l’ambiguité des termes dans les auteurs qui en ont écrit, ont fait naître parmi nos savans cette dispute difficile à terminer, mais heureusement plus curieuse qu’intéressante. En effet, que l’immensité des théatres chez les Grecs & les Romains ait borné leur déclamation théatrale aux grands intervalles de la voix, ou qu’ils ayent eu l’art d’y rendre sensibles dans le lointain les moindres inflexions de l’organe & les nuances les plus délicates de la prononciation ; que dans la premiere supposition ils ayent asservi leur déclamation aux regles du chant, ou que dans la seconde ils ayent conservé au théatre l’expression libre & naturelle de la parole ; les tems, les lieux, les hommes, les langues, tout est changé au point que l’exemple des anciens dans cette partie n’est plus d’aucune autorité pour nous.

A l’égard de l’action, sur les théatres de Rome & d’Athenes l’expression du visage étoit interdite aux comédiens par l’usage des masques ; & quel charme de moins dans leur déclamation ! Pour concevoir comment un usage qui nous paroît si choquant dans le genre noble & pathétique a pû jamais s’établir chez les anciens, il faut supposer qu’à la faveur de