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par la voie civile sera poursuivi extraordinairement ; ce qui se pratique lorsque le fait dont il s’agit paroît mériter une instruction plus grave. En convertissant le procès civil en criminel, on ne convertit pas pour cela les enquêtes en informations, mais on fait répéter les témoins par forme d’information. Voyez l’ordonn. de 1670, tit. xx. (A)

Conversion, figure de Rhétorique qui consiste à terminer les divers membres d’une période par les mêmes tours, comme dans cet endroit de Cicéron : Doletis tres exercitus P. R. interfectos ? Interfecit Antonius. Desideratis clarissimos cives ? eos vobis eripuit Antonius. Autoritas hujus ordinis (senatus) afflicta est ? afflixit Antonius.

On appelle encore en Rhétorique conversion, l’art de retourner ou de retorquer un argument contre son adversaire, ou de le montrer par des côtés opposés, en changeant le sujet en attribut, & l’attribut en sujet. Il y a aussi des conversions d’argumens d’une figure à une autre, & des propositions générales aux particulieres. Voyez Retorsion, &c. (G)

Conversion, (Art milit.) se dit quand on commande aux soldats de présenter les armes à l’ennemi qui les attaque en flanc, lorsqu’ils croyoient être attaqués de front. L’évolution que les soldats font en ce cas s’appelle conversion, ou plûtôt quart de conversion.

On peut faire mouvoir toute une troupe ensemble de telle sorte, qu’elle change de terrein en conservant le même ordre sur lequel elle a été formée, & la même distance entre ses rangs & ses files. La maniere la plus simple de la faire mouvoir ainsi, est de la faire marcher en avant ; mais cette maniere est si simple, qu’elle n’a besoin d’aucune explication.

On peut aussi retourner une troupe toute entiere, & lui faire faire face d’un côté différent de celui où elle le faisoit auparavant, & cela pour la faire marcher ensuite du côté que l’on a jugé à propos, ou bien pour s’opposer à des ennemis qui paroîtroient d’un côté différent de celui où elle faisoit feu d’abord.

Ce dernier objet est bien le même que celui pour lequel on fait faire les à droite & à gauche. Mais par les à droite & à gauche les hommes de la troupe se présentent bien de différens côtés, mais ils ne s’y présentent pas également en force. Après un à droite ou un à gauche, les ennemis de la troupe se présentent bien vers le terrein qui est au flanc de la troupe, mais il n’y a alors de front que les hommes qui composoient d’abord une file.

On a dit qu’elles n’étoient pas dans les bataillons de plus de cinq, & même de quatre hommes ; ce n’est donc que cinq ou quatre hommes qui se présentent de ce côté. Si c’est un demi-tour à droite ou à gauche que l’on ait fait, un rang entier se présente bien devant l’ennemi, mais c’est le dernier ; le premier rang & les chefs de file sont alors les plus éloignés de l’ennemi. Il en est de même des officiers, qui sont obligés de rompre le bataillon pour passer au-travers, afin d’être les plus près des ennemis, ou bien, suivant l’usage, d’en faire le tour. On a donc cherché un moyen de retourner une troupe de maniere qu’elle puisse se présenter à l’ennemi selon toute sa force, c’est-à-dire en lui opposant ses officiers & ses chefs de file, & cette maniere est ce que nous appellons conversion.

La conversion s’exécute par toute la troupe ensemble regardée comme un seul corps : tous les hommes de la troupe ne sont considérés que comme membres de ce corps, & agissant tous dépendamment les uns des autres.

La conversion peut se faire vers la droite ou vers la gauche : si c’est vers la droite qu’elle se fait, alors le chef de file qui est à la droite de la troupe ne

change point de place, il tourne doucement sur lui-même pendant que tous les autres hommes de la troupe tournent autour de lui comme autour d’un pivot.

Si c’est vers la gauche que la conversion se fait, le chef de file qui est à la gauche de la troupe ne change point de place, & tous les autres hommes de la troupe tournent autour de lui.

Pour avoir une idée juste de ce mouvement, on n’a qu’à prendre une carte à joüer, ou tel autre rectangle ou plûtôt parallélepipede que l’on voudra, l’arrêter sur une table avec une épingle, ou tel autre pivot que l’on voudra, par un des deux angles qui sont devant la carte, c’est-à-dire du côté vers lequel on la veut faire mouvoir, ensuite faire tourner cette carte sur ce pivot ; on aura une représentation exacte de la maniere dont tourne une troupe ou un bataillon sur le terrein : l’épingle représentera le chef de file qui sert de pivot, & la carte représentera la troupe qui tourne.

Si l’on veut mettre sur cette carte des épingles ou de petits crayons, ou quelque chose qui puisse laisser une trace dans le même ordre que sont les hommes dans la troupe, & que l’on fasse tourner la carte sur la table, on verra que les traces que les épingles ou les crayons laisseront sur la table, seront des portions de cercle concentriques ; de même sur le terrein chaque homme de la troupe décrit une portion de cercle d’autant plus grande qu’il est plus éloigné du pivot.

La troupe pourroit faire un tour entier, & ce mouvement s’appelleroit alors conversion entiere ; mais il ne seroit d’aucune utilité. On suppose ordinairement ce tour divisé en quatre parties égales, & l’on appelle chacune de ses parties quart de conversion.

On peut faire deux quarts de conversion de suite du même côté ; ce mouvement est en usage, & il se nomme demi-conversion. On pourroit faire aussi trois quarts de conversion de suite ; mais ce mouvement étant à présent peu en usage, il n’a point de nom particulier parmi nous, comme il en avoit parmi les anciens. On n’est pas non plus astreint à faire juste des quarts de tour ; celui qui commande l’évolution est le maître de faire arrêter la troupe quand il lui plaît, en disant halte ; ainsi elle peut faire telle portion de tour qu’il juge à propos.

Les quarts de conversion changent l’aspect des hommes, de même que les à droite & les à gauche.

Ce que l’on vient de dire peut faire remarquer aisément que les hommes de la troupe qui sont auprès du pivot parcourent beaucoup moins d’espace de terrein, que ceux qui en sont plus éloignés ; & comme cette évolution de la troupe n’est achevée que quand tous les hommes ont achevé chacun de parcourir le chemin qu’ils ont à faire, & que d’ailleurs elle doit être faite ensemble & du même mouvement, comme si tous les hommes ne faisoient qu’un corps, il faut que celui qui sert de pivot, & ceux qui sont auprès de lui, se mouvent très-lentement, & que ceux qui en sont plus éloignés marchent plus vîte. Il s’ensuit encore que plus la troupe aura d’étendue ou de front, plus une partie des hommes de la troupe aura de chemin à faire dans le quart de conversion, & plus il faudra de tems pour l’exécuter.

Il est aisé de savoir le chemin que chaque homme de la troupe a à faire dans un quart de conversion ; il ne faut pour cela que savoir quelle est sa distance du pivot : cette distance est le rayon du quart de cercle qu’il doit décrire. Or le rayon ou demi-diametre est au quart de cercle, comme 7 est à 11. Ainsi il n’y a qu’à faire une regle de trois, & dire, comme 7 est à 11, ainsi le rayon connu est au quatrieme terme, qui sera la valeur du quart de cercle.