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place, parce que c’est une espece de trafic qui rend celui qui tire ou endosse une lettre-de-change justiciable des consuls.

Cependant si celui qui a endossé une lettre-de-change étoit connu notoirement pour n’être point marchand ni de qualité à faire commerce, & qu’il parût que l’on n’a pris ce détour que pour avoir contre lui la contrainte par corps ; en ce cas le parlement reçoit quelquefois le débiteur appellant comme de juge incompétent des sentences des consuls : ce qui dépend des circonstances.

3°. Les consuls connoissent de tous différends pour ventes faites, soit entre marchands de même profession pour revendre en gros ou en détail, soit à des marchands de quelque autre profession, artisans ou gens de métier, afin de revendre ou de travailler de leur profession ; comme à des tailleurs d’habits, pour des étoffes, passemens, & autres fournitures ; boulangers & pâtissiers, pour blé & farine ; à des maçons, pour pierre, moilon, plâtre, chaux, &c. à des charpentiers, menuisiers, charrons, tonneliers, & tourneurs, pour des bois ; à des serruriers, maréchaux, taillandiers, armuriers, pour du fer ; à des plombiers, fontainiers, pour du plomb ; & autres semblables.

Les marchands qui ont cessé de faire commerce ne laissent pas d’être toûjours justiciables des consuls pour les négociations qu’ils ont faites par le passé.

Toutes personnes qui font commerce, c’est-à-dire qui achetent pour revendre, deviennent à cet égard justiciables des consuls, quand même ce seroient des ecclésiastiques, ou autres privilégiés ; parce qu’en trafiquant ils renoncent à leur privilége.

4°. Les femmes marchandes publiques de leur chef, & les veuves qui continuent le commerce de leurs maris, sont aussi justiciables des consuls pour raison de leur commerce.

Les héritiers des marchands & artisans qui ne sont pas de leur chef justiciables des consuls, ne sont pas tenus d’y procéder comme héritiers, à moins que ce ne fût en reprise d’une instance qui y étoit pendante avec le défunt.

5°. Les consuls connoissent des gages, salaires, pensions des commissionnaires, facteurs, ou serviteurs des marchands, pour le fait du trafic seulement.

6°. Du commerce fait pendant les foires tenues dans le lieu de leur établissement, à moins qu’il n’y ait dans le lieu un juge-conservateur des priviléges des foires, auquel la connoissance de ces contestations soit attribuée.

7°. Ils peuvent connoître de l’exécution des lettres patentes du Roi, lorsqu’elles sont incidentes aux affaires de leur compétence, pourvû qu’il ne soit pas question de l’état & qualité des personnes.

8°. Les gens d’église, gentilshommes, bourgeois, laboureurs, vignerons, & autres, qui vendent les grains, vins, bestiaux, & autres denrées provenant de leur crû, ne sont pas pour cela justiciables des consuls ; mais il est à leur choix de faire assigner les acheteurs devant les juges ordinaires, ou devant les consuls du lieu, si la vente a été faite à des marchands & artisans faisant profession de revendre.

Les consuls ne peuvent connoître des contestations pour nourriture, entretien, & ameublement, même entre marchands, si ce n’est qu’ils en fassent profession.

Ils ne peuvent pareillement connoître des inscriptions de faux incidentes aux instances pendantes devant eux ; ce sont les juges ordinaires qui en doivent connoître.

Lorsqu’il y a procès-verbal de rebellion à l’exécution des sentences des consuls, il faut se pourvoir

en la justice ordinaire pour faire informer & decréter.

Les sentences des consuls ne s’expédient qu’en papier timbré, & non en parchemin.

Elles peuvent être exécutées par saisie de biens meubles & immeubles ; mais si on passe outre aux criées, il faut se pourvoir devant le juge ordinaire.

Elles emportent aussi la contrainte par corps pour l’exécution des condamnations qui y sont prononcées.

Quand la condamnation n’excede pas 500 livres, elles sont exécutoires, nonobstant opposition ou appellation quelconque. Celles qui excedent 500 liv. à quelque somme qu’elles montent, sont exécutoires par provision en donnant caution.

Il est défendu à tous juges d’entreprendre sur la jurisdiction des consuls, & d’empêcher l’exécution de leurs sentences.

Les appellations qui en sont interjettées vont directement à la grand-chambre du parlement, lequel n’accorde point de défenses contre ces sentences ; & lorsque la condamnation n’excede pas 500 livres, le parlement déclare l’appellant non-recevable en son appel.

Lorsque l’appel d’une sentence des consuls est interjetté comme de juge incompétent, la cause se plaide devant un des avocats généraux ; si l’appel est interjetté tant comme de juge incompétent qu’autrement, la cause est plaidée en la grand-chambre ; & en l’un & en l’autre cas si les consuls sont trouvés incompétens, on déclare la procédure nulle.

On n’accorde point de lettres de répi contre les sentences des consuls.

Il y a présentement soixante-sept jurisdictions consulaires dans le royaume. En voici la liste par ordre alphabétique, avec la date de leur création, autant qu’on a pu la recouvrer.

Auxerre, Mars 1564.   Montpellier, Mai 1691.
Angers, Montauban, Mars 1710.
Abbeville, Mars 1566. Le Mans,
Amiens, Marseille,
Angoulême, Mars 1710. Morlaix,
Alençon, Narbonne, Marx 1710.
Arles, Nismes,
Alby, Nevers,
Agde, Nantes,
Autun, Niort, Octobre 1565.
Bordeaux, Décembre 1563. Orléans, Février 1563.
Beauvais, Juin 1564. Paris, Novembre 1563.
Bourges, Août 1564. Poitiers, Mai 1566.
Brioude, Juillet 1704. La Rochelle, Nov. 1565.
Bayeux, Mars 1710. Rennes, Mars 1710.
Bayonne, Reims, Avril 1564.
Caën, Mars 1710. Riom, Mars 1567.
Calais, Avril 1565. Roüen,
Châlon-sur-Saône, Saumur, Juin 1566.
Sens, Avril 1564.
Châlons-sur-Marne, Décembre 1564. Saint-Quentin, Mars 1710.
Sedan, Mars 1711.
Chartres, Juillet 1566. Saint-Malo,
Châtelleraut, Saulieu,
Clermont en Auvergne, Avril 1565. Semur en Bourgogne,
Soissons,
Compiegne, Thiers, Janvier 1565.
Dunkerque, Février 1700. Toulouse, Juillet 1549.
Dieppe, Tours, Avril 1565.
Dijon, Troyes, Février 1563.
Grenoble, Mars 1710. Valenciennes,
Lille, Vannes, 1710.
Lyon, Décembre 1595. Vienne,
Limoges, Août 1602. Vire,
Langres, Mars 1611. Xaintes, Mars 1710.

Voyez le recueil des réglemens concernant les consuls, & les institutes du droit consulaire, par Toubeau ; le praticien des consuls. (A)

Consuls François dans les Pays étrangers, sont des officiers du Roi établis en vertu de commission ou de lettres de provisions de S. M. dans les villes & ports d’Espagne, d’Italie, de Portugal,