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Le mode est une charge imposée à la convention ou disposition ; il ne differe point de la condition potestative. Voyez Mode.

La démonstration est une désignation de quelque personne ou chose. Une démonstration vicieuse ne rend pas la disposition nulle : par exemple, si le testateur legue à un tel son neveu majeur, & que le neveu soit mineur, ou qu’il lui ait légué son cheval noir, & que le cheval soit d’une autre couleur, le legs n’est pas moins valable, parce que le testateur n’a pas fait dépendre sa disposition de la qualité du légataire, ni de la qualité qu’il a donnée à la chose léguée ; la disposition n’est pas conditionnelle.

Dans les conventions & dispositions dont l’accomplissement dépend de l’évenement d’une condition, tout demeure en suspens comme s’il n’y avoit pas eu de convention ou de disposition, jusqu’à ce que la condition soit arrivée ou remplie ; & si la condition n’arrive pas, la convention ou disposition est anéantie par la clause même qui la fait dépendre de la condition : par exemple, dans une vente qui doit s’accomplir par l’évenement d’une condition, l’acheteur n’a qu’un droit éventuel, & le vendeur demeure propriétaire de la chose vendue, & fait les fruits siens jusqu’à ce que la condition soit arrivée.

L’accomplissement de la condition donne effet à l’acte, & cet effet est même quelquefois rétroactif, suivant ce qui a été convenu ou ordonné à ce sujet par l’acte qui renferme la condition.

Lorsque la convention ou disposition est déjà exécutée, mais qu’elle peut être résolue par l’évenement d’une condition, les choses demeurent dans l’état où elles sont, suivant la convention ou disposition, jusqu’à ce que la condition soit arrivée ; & dans ce cas le profit & la perte tombent sur celui qui jouit en vertu de l’acte ; & quand la condition est accomplie, soit qu’elle confirme ou qu’elle résolve la convention ou disposition, le gain & la perte regardent celui qui se trouve maître de la chose.

Les conditions qui se rapportent au présent ou au passé, produisent leur effet du moment même de l’acte ; de sorte que si l’on ignore d’abord l’état des choses par rapport à la condition, c’est-à-dire si elle se trouve remplie ou non, l’exécution ou résolution de l’acte est seulement en suspens, & la condition a un effet rétroactif au jour de l’acte.

Quand on a apposé quelque condition impossible ou contre les bonnes mœurs, si c’est dans un testament, elle est regardée comme non écrite ; si c’est dans une convention, la condition est non-seulement vicieuse en elle-même, mais elle vicie aussi le reste de l’acte.

Pour ce qui est des conditions inutiles, dans quelqu’acte que ce soit, elles sont regardées comme non écrites.

Si celui qui a promis de remplir quelque condition vient à décéder avant de l’avoir fait, son héritier est tenu de remplir le même engagement, supposé qu’il soit tel qu’une personne puisse le remplir pour une autre ; autrement il se résoudroit en dommages & intérêts.

Quoiqu’on ait fixé dans l’acte le tems dans lequel la condition potestative doit être remplie, la justice peut néanmoins proroger ce délai suivant les circonstances, sur-tout si le retardement n’a cause aucun préjudice à celui qui a stipulé la condition, ou que le dommage puisse être réparé.

Si quelqu’une des parties empêche l’accomplissement de la condition pour éluder l’exécution de son engagement, la condition sera censée arrivée à son égard, & la convention ou disposition sera exécutée.

Le nombre des diverses especes de conditions que

l’on peut apposer dans un acte n’est pas limité ; il y en a autant que de différentes clauses : dans les conventions, les unes sont relatives à des évenemens passés, présens, ou à venir ; d’autres tendent à obliger quelqu’un de donner quelque chose, ou à faire ou à ne pas faire quelque chose. Nous expliquerons ici seulement les conditions qui ont un nom particulier.

Condition affirmative, est celle qui est conçûe en termes positifs ou affirmatifs : par exemple, j’institue un tel mon héritier si un vaisseau arrive de l’Asie ; elle est opposée à la condition négative, qui est conçûe en termes négatifs, comme si on dit, j’institue un tel mon héritier s’il n’est pas engagé dans les ordres. Ces sortes de conditions affirmatives & négatives peuvent l’une & l’autre être potestatives, casuelles, ou mixtes, & conférées à la volonté d’un tiers. Voyez ci-après Condition casuelle, mixte, & potestative, & Condition négative.

Conditions alternatives ; elles sont de cette espece lorsque l’acte en contient plusieurs, & que celui à qui elles sont imposées a le choix de remplir l’une ou l’autre de ces conditions. Elles sont aussi alternatives lorsque de deux conditions casuelles qui sont stipulées, il suffit qu’il en arrive une.

Condition casuelle, est celle dont l’évenement dépend du hasard, comme si un legs est fait sous la condition si navis ex Asiâ venerit : elle est appellée en Droit non promiscua, parce qu’elle dépend entierement du hasard ; à la différence de la potestative, qu’on appelle en Droit promiscua, parce qu’elle dépend toûjours en partie du hasard. Voyez Condition potestative.

Conditions conjointes ; c’est lorsqu’il y a plusieurs conditions qui doivent toutes être remplies pour que la disposition ait son effet.

Condition dérisoire ; on regarde comme telle une condition qui n’a point d’objet sérieux, aucun intérêt légitime, & qui tend à obliger de faire quelque chose de ridicule, comme si un homme ordonnoit à quelqu’un de se promener dans la ville avec des cornes sur la tête ; ces sortes de conditions doivent être mises dans la classe des conditions inutiles.

Condition deshonnête ; on appelle ainsi celle qui blesse l’honnêteté ou les bonnes mœurs, & que les lois appellent probrosa : telle seroit, par exemple, la clause qui imposeroit à un homme marié la condition de faire divorce avec sa femme. Ces sortes de conditions sont rejettées dans les testamens ; & si elles se trouvent dans une convention, elles annullent l’acte. L. 20. ff. de condit. & demonstr. & l. si quis 112. §. 3. ff. de legat. 1.

Condition dividue, est celle qui porte sur un fait qui est dividu ; elle est opposée à la condition individue, qui porte sur un fait individu, c’est-à-dire qui ne souffre point de division : tel est le cas où deux légataires sont chargés par forme de condition de construire une maison ; comme ce fait ne souffre point de division, la condition ne doit pas être divisée. Voy. Dumolin, tr. de divid. & individ. part. II. n. 386. les lois 36. & 112. au digest. de condit. & demonstr. & l. 13. ff. de manum. testam.

Condition de Droit ou légale, est celle que la loi impose à quelqu’un ; elle est toûjours suppléée, quand même elle ne seroit point écrite dans l’acte. Il y a des conditions légales pour les contrats, d’autres pour les donations, d’autres pour les testamens & autres actes : ces conditions ne sont pas suspensives, mais négatives & résolutives. Voyez le tr. de Brussel conseiller de l’empereur Charles V. de conditionibus, où il traite d’un grand nombre de ces conditions légales.

Condition expresse, est celle qui est expri-