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tris nostris, episcopis, presbyteris, & ecclesiæ quæ sub cælo est, Helenus & Hymæneus, Theophylus, &c. & reliqui omnes qui nobiscum sunt vicinarum urbium & provinciarum episcopi, presbyteri ac diaconi, & ecclesiæ Dei ; carissimis sratribus in Domino salutem. Enfin, pour derniere preuve de ce qu’ils avancent, ils font valoir l’autorité que Louis Aleman, vulgairement appellé le cardinal d’Arles, employe dans la harangue qu’il prononça au concile de Bale, pour réfuter Panorme & Louis Romain qui soûtenoient l’opinion contraire, & du témoignage que cet illustre prélat rend en cette occasion sur un fait qui lui est personnel. L’autorité qu’il employe est celle de S. Augustin in tractatu 3°. in Joan. cap. xij. Suivant ce saint docteur, les clés ont été données en la personne de S. Pierre à toute l’Eglise, & par conséquent aux évêques & aux prêtres ; de-là ce cardinal infere que les prêtres font partie du concile, quoiqu’il soit principalement composé d’évêques. Ensuite il ajoûte que pour lui il s’est trouvé & a donné sa voix au concile de Constance, dans le tems qu’il n’étoit que docteur & simple prêtre, & que les conciles précédens fournissent d’autres exemples de ce genre. Cela s’accorde parfaitement avec le système du célebre Gerson chancelier de l’université de Paris, d’Almain professeur en Théologie à Navarre, & de Simon Vigor conseiller au grand-conseil, qui pensent que les prélats du second ordre, c’est-à-dire les curés, doivent avoir dans le concile voix décisive. Voyez Gerson, de origine juris & legum ; Almain, de supremâ potestate ecclesiæ ; & Vigor, de statu & regimine ecclesiæ, liv. IV. cap. ult. Cependant M. Doujat, homme versé dans les matieres du droit canon, est d’un sentiment opposé ; il prétend que les évêques joüissent seuls de la prérogative de donner leurs suffrages, tant aux conciles œcuméniques que nationaux & provinciaux ; & que si quelquefois dans les anciens conciles il est fait mention de prêtres & de clercs, ou d’abbés & autres personnes religieuses dans ceux qui sont plus récens, tels que les conciles de Latran, on doit entendre simplement qu’ils étoient consultés, & non pas qu’ils ayent eu voix. Prænot. can. lib. II. cap. j. Il s’appuie principalement sur ces paroles du concile de Chalcédoine, synodus episcoporum est, non clericorum ; superfluos foras mittite. Action j. t. IV. des conc. p. 111. Mais on réplique que ces paroles ne sont autre chose que les clameurs qu’exciterent dans le concile les évêques d’Egypte. Ils étoient du parti de Dioscore qui avoit tenu le faux concile d’Ephese contre Flavien de Constantinople. Ces évêques voyant que Dioscore étoit sur le point d’être condamné, & que les clercs qui avoient assisté au faux concile d’Ephese s’excusoient d’y avoir souscrit sur les menaces & la violence qu’on leur avoit faites, demanderent à grands cris & en se servant de ces paroles, qu’on chassât les clercs du concile. Ils ajoûtoient pour raison, que l’empereur n’avoit mandé que les évêques, ibid. pag. 115. mais ils ne furent point écoutés, & les clercs ne sortirent point. Cette réponse est celle que fit autrefois le cardinal d’Arles à l’objection qu’on tire de ce passage, dans la harangue citée ci-dessus. Enée Sylvius, depuis le pape Pie II. l’a rapportée toute entiere, liv. I. des mém. sur ce qui s’est passé au concile de Bâle. Cette harangue est d’une éloquence mâle, & mérite d’être lûe. Nous avouerons ici de bonne foi que l’éloignement des tems jette sur cette matiere une grande obscurité : si d’un côté on cite des exemples de simples prêtres qui ont souscrit aux conciles, & même ont opiné comme membres de l’assemblée ; d’un autre côté on peut dire 1°. que la souscription toute seule n’est pas une preuve qu’on ait eu la qualité de juge dans le concile, mais uniquement une marque de soûmission & d’acquiescement à ses décisions :

2°. que même dans les cas où il est manifeste que des prêtres & des diacres ont donné leurs voix, ce sont des exceptions du droit commun, fondées vraissemblablement sur ce qu’ils étoient des représentans, soit du pape, comme dans le concile de Nicée, soit des évêques. C’est ainsi que les Théologiens, pour la plûpart, expliquent les divers passages qu’on allegue en faveur des prêtres & autres clercs. Au reste, nous nous abstiendrons de prononcer sur ces difficultés, qui ne regardent, comme nous l’avons déjà observé, que les premiers siecles de l’Eglise, la discipline des tems postérieurs étant certaine. Nous allons maintenant examiner l’origine des conciles, nous passerons ensuite à leurs divisions, & nous développerons les principes de chacun d’eux en particulier.

Isidore, dans le premier canon de la distinction dix-septieme du decret de Gratien, fait remonter l’origine des conciles au tems de Constantin. Avant lui, dit-il, pendant le cours des persécutions on n’avoit pas la liberté d’instruire les peuples ; c’est ce qui donna lieu aux diverses sectes d’héretiques qui s’éleverent parmi les Chrétiens. Pour remédier à ces desordres, Constantin accorda aux évêques la permission de s’assembler. On célebra différens conciles, dont le plus remarquable est celui de Nicée, où l’on dressa un second symbole, à l’imitation des apòtres. Il faut avouer néanmoins qu’avant ce concile il s’en étoit déjà tenu plusieurs nationaux, par exemple en Afrique du tems de S. Cyprien, & d’autres particuliers, tels que celui d’Elvire au commencement du jv. siecle, & celui d’Icone en l’an 251. Ainsi ce que dit Isidore doit s’appliquer aux conciles généraux. En effet si vous en exceptez celui de Jérusalem, du tems des apôtres, le premier concile général est celui de Nicée, célebré dans un tems où la paix fut rendue à l’Eglise, & où elle se vit à l’abri des persécutions des Payens. Mais quoique les conciles, & principalement ceux qui sont généraux, ne remontent de fait qu’au tems où les prélats ont pû s’assembler & traiter ouvertement de la foi & de la discipline, il n’en est pas moins vrai qu’ils prennent leur source dans la nature même de l’Eglise. Le corps de l’Eglise composé de plusieurs membres, est lié par la charité & la communion des Saints. J. C. lui-même est la base de cette union, & le Saint-Esprit y coopere, épître premiere aux Corinth. ch. xij. Et dans l’épitre aux Ephésiens, ch. v. il est dit que J. C. est le chef & l’époux de l’Eglise, dont il est le sauveur ; qu’il a aimé l’Eglise, & s’est livré à la mort pour elle ; qu’il l’a fait paroître devant lui pleine de gloire, n’ayant ni tache, ni ride, ni rien de semblable, mais étant sainte & irrépréhensible ; qu’il la nourrit & l’entretient, parce que nous sommes les membres de son corps, formés de sa chair & de ses os. Ce langage de l’apôtre est conforme à celui de J. C. dans S. Matthieu, ch. xv. vers. 18. où après avoir donné les clés à ses disciples, c’est-à-dire la puissance de lier & de délier, il leur adresse ces paroles : Iterum dico vobis, quia si duo ex vobis consenserint super terram, de omni re quamcumque petierint, fiet illis à patre meo qui est in calis ; nbi enim sunt duo vel tres congregati in nomine meo, ibi sum in medio eorum. Et dans S. Jean, chap. xvij. après avoir prié son pere pour les apôtres, il le prie encore pour ceux qui doivent croire en lui par leur parole ; & il ajoûte, vers. 23. Ego in eis, & tu in me, ut sint consummati in unum. Or l’Eglise a toûjours crû qu’elle ne pouvoit jamais mieux représenter cette unité, & n’avoit point de moyen plus efficace pour l’affermir, pour conserver la communion de la foi lorsque les impies s’efforcent d’y porter atteinte, que de rassembler les évêques envoyés par Jesus-Christ en la personne des apôtres, pour apprendre aux nations la parole de la foi qui leur a été transmise. Ce sont eux qui sont