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corés de ce titre ; parce qu’anciennement ils étoient seigneurs temporels des villes où leurs chapitres sont situés. Nos rois ont retiré la plûpart de ces seigneuries, & n’ont laissé que le nom de comtes aux chapitres. Il n’y a plus que quelques prélats, comme les comtes & pairs, à qui il reste, avec le titre des droits seigneuriaux, mais subordonnés à ceux de la souveraineté.

Comtes Palatins, (Jurisp. & Hist.) Il y a dans l’empire un titre de palatin qui n’a rien de commun avec celui de princes palatins du Rhin ; c’est une dignité dont l’empereur décore quelquefois des gens de lettres : on les appelle comtes palatins ; & selon le pouvoir que leur donnent les lettres patentes de l’empereur, ils peuvent donner le degré de docteur, créer des notaires, legitimer des bâtards, donner des couronnes de laurier aux poëtes, annoblir des roturiers, donner des armoiries, autoriser des adoptions & des émancipations, accorder des lettres de bénéfice d’âge, &c. mais cette dignité de comte est venale & s’accorde facilement ; on fait aussi peu de cas de ce qui est émané de ces comtes. Les papes font aussi de ces comtes palatins. Jean Navar, chevalier & comte palatin, fut condamné par arrêt du parlement de Toulouse, prononcé le 25 Mai 1462, à faire amende honorable & demander pardon au Roi pour les abus par lui commis, en octroyant en France des lettres de légitimation, de notariat, & autres choses dont il avoit puissance du pape ; ce qui étant contraire à l’autorité du Roi, le tout fut déclaré nul & abusif. Voyez le tableau de l’empire Germanique, pag. 107. & les arréts de Papon, pag. 248. (A)

* COMTÉ, s. m. (Hist. anc.) L’empire fut divisé sous Constantin en deux départemens appellés comitatus ; ainsi le mot comté n’a pas dans cet article une acception relative au mot comte, Hist. anc. Ces comtés étoient des conseils dont les préfets s’appelloient comites. Il y en a cependant qui font remonter l’origine de nos comtes à ces préfets.

Comté, (Hist. mod.) signifie le domaine d’un seigneur qualifié du titre de comte. Voyez Comte.

En Angleterre le mot de comté est synonyme à celui de shire : or une shire est une 52e partie du royaume d’Angleterre, y compris la province de Galles, le royaume ayant été divisé en 52 portions, pour en rendre le gouvernement plus facile, & l’administration de la justice, dans les différentes provinces, plus ponctuelle & mieux reglée.

Ces comtés sont subdivisés en rapes, comme l’est celle de Sussex, ou en lathes, ou en wapentakes, ou en hundreds, c’est-à-dire en centaines ; & ces portions de comtés en dixaines.

On nomme tous les ans, à la S. Michel, des officiers appellés sherifs, pour la manutention des lois dans ces différentes comtés, excepté celles de Cumberland, de West-Morland, & de Durham.

Cet officier a deux fonctions différentes ; l’une de simple exécuteur des ordres qui lui sont adressés par les cours de justice ; l’autre, de présider lui-même à deux différens tribunaux, dont l’un s’appelle la séance du sherif, l’autre la cour de la comté.

Les autres officiers des différens comtés, sont un lord-lieutenant, qui a le commandement de la milice du comté, les gardes des rôles, les juges de paix, les baillis, le grand connêtable, & le coroner.

Des cinquante-deux comtés, il y en a quatre distingués parmi les autres, qu’on appelle pour cette raison comtés palatins, qui sont Lancastre, Chester, Durham & Ely. Pembroke & Hexam étoient autrefois aussi des comtés palatins ; celui-ci appartenoit à l’archevêque d’York, & a été demembré de son domaine, & dépouillé de son privilége sous le regne d’Elisabeth, & n’est plus à présent qu’une portion du comté de Northumberland.

Les gouverneurs en chef de ces comtés palatins par concession spéciale du roi, adressoient aux officiers du comté toutes les ordonnances en leur nom, & administroient la justice d’une maniere aussi absolue que le roi lui-même dans les autres comtés, si ce n’est qu’ils le reconnoissoient comme leur maître : mais Henri VIII. modéra cette étendue de pouvoir. Voyez Palatinat. Chambers. (G)

N’oublions pas d’observer que le mot comté est quelquefois féminin ; on dit la comté de Bourgogne, la Franche-comté, &c. Tout cela dépend de l’usage.

Comtés-pairies, (Jurisprud.) Les comtés-pairies sont des grands fiefs de la couronne, de grandes dignités de même nature que les duchés pairies, & en tout semblables à ces derniers excepté par le nom, & auxquelles on a attaché une jurisdiction semblable à celle des duchés-pairies.

Le privilége attaché à ces grands fiefs est de relever immédiatement de la couronne ; car il ne peut pas exister de pairie qui ne soit dans la mouvance directe & immédiate de la couronne, à la différence de comtés simples ou du second ordre, mais qui ne sont point pairies, & parmi lesquelles il peut y en avoir qui ne relevent ni du Roi ni de la couronne.

Il y a eu dans le royaume un grand nombre de comtés-pairies dont les unes ont été éteintes, d’autres érigées en duchés-pairies, & quelques-unes que l’on a fait revivre par de nouvelles lettres d’érection.

Il y en a trois que l’on peut appeller ecclésiastiques ; elles sont attachées aux évêchés de Beauvais, de Châlons, & de Noyon.

Les justices de ces grands fiefs, ainsi que celles des duchés-pairies, sont toutes justices royales. L’érection d’une terre en comté-pairie mettant nécessairement cette terre dans la mouvance directe & immédiate de la couronne, il seroit absurde que la justice attachée à une dignité, à un fief de cette nature, fût seigneuriale. Voyez Justice & Pairie. (A)

* COMUS, s. m. (Myth.) dieu des festins. Il y a tout lieu de croire que c'étoit le même que le chamos des Moabites, ou beelphegor ou baalpéor, Priape & Bacchus. On le représentoit sous la figure d'un jeune-homme, le visage rouge & échauffé, la tête panchée & l'air assoupi, appuyé du côté gauche sur un dard de chasseur, tenant de la main droite un flambeau renversé, & la tête couronnée de fleurs. On plaçoit sa statue à l'entrée de l'appartement de l'époux & de la nouvelle mariée ; son pié-d'estal étoit jonché de fleurs. Il y en a qui font venir le mot comédie de comus, & qui croient que κωμωδειν, est la même chose que como digna canere. Cette étymologie est d'autant mieux fondée, que ce fut dans des festins que l'on joüa les premieres farces, qui perfectionnées, produisirent la comédie telle que nous l'avons. Voyez Comédie.

CONARDS ou CORNARDS, sub. m. plur. nom d'une ancienne société qui subsistoit autrefois dans les villes d'Evreux & de Rouen, & qui y a fleuri pendant plus d'un siecle. L'objet de cette compagnie étoit ridicule, & ressembloit assez à celle des fous & à celle de la mere folle de Dijon.

Le premier but cependant étoit de corriger les mœurs en riant ; mais cette liberté ne demeura pas long tems dans les bornes qu'elle s'étoit prescrites ; & les railleries, ou pour mieux dire les satyres, devinrent si sanglantes, que l'autorité royale de concert avec la puissance ecclésiastique détruisit cette compagnie. On appelloit le chef l’abbé des conards ou des cornards. Cette place qu'on n'obtenoit qu'à la pluralité des voix, étoit fort enviée, comme on le voit par deux vers de ce tems-là ;