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jusqu’à ce qu’il lui manquât quelque nombre dans sa suite ; auquel cas un autre qui auroit ce nombre, recommenceroit de la même maniere ; s’il avoit poussé jusqu’au roi, il continueroit de joüer par telle carte qu’il voudroit. La différence des couleurs ne fait rien à ce jeu, pourvû que les cartes que l’on a forment une suite juste. Le joüeur qui vient après celui qui a dit huit sans neuf, ou toute autre carte, reprend le jeu s’il a le nombre manquant ; si ni lui, ni les autres ne l’ont, le premier qui a dit huit sans neuf, continue à joüer le reste de son jeu par telle carte qu’il lui plaît, & se fait donner un jetton de chaque joüeur. Il faut autant qu’on le peut se défaire de ses cartes les plus hautes en point, parce que l’on paye autant de jettons que l’on a de points dans toutes les cartes qui restent dans la main à la fin du coup. Ceux qui joüent petit jeu, ne donnent qu’autant de jettons qu’il leur reste de cartes. Il n’est pas moins avantageux de se défaire des as, parce que si l’on attend trop tard à les jetter, on ne se remet dedans qu’avec peine, à moins qu’on n’ait un roi pour entrer. On doit donner une fiche ou moins, selon la convention, à celui qui joüe la comete ; il n’est plus reçu à la demander dès qu’elle est couverte de quelque carte, & elle est perdue pour lui. Celui qui gagne la partie se fait donner une fiche & neuf jettons, qui sont la valeur de la comete de celui qui l’ayant dans son jeu, ne s’en est point défait dans le tour. Celui qui jette sur table des rois qu’il a dans son jeu, gagne un jetton de chaque joüeur pour chacun de ses rois ; au lieu qu’il paye un jetton à chaque joüeur, & dix au gagnant, pour chacun des rois qui lui restent : si l’on paye par point, c’est celui qui a plûtôt joüé ses cartes qui gagne la partie & les fiches que chaque joüeur a mis au jeu, sans parler des marques qu’il se fait payer de chacun selon qu’il a plus ou moins de cartes ou de points dans sa main.

Il n’est pas permis de voir les cartes qu’on a déjà joüées, pour conduire son jeu & joüer plus avantageusement pour soi, à peine de donner un jetton à chaque joüeur ; à moins qu’on ne l’ait décide autrement avant de commencer.

Voilà les principales & premieres regles du jeu de la comete ; elles ont beaucoup changé, & vraissemblablement elles changeront encore beaucoup, si ce jeu continue d’être à la mode. On payera plus ou moins, quand on fera opéra : faire opéra, c’est joüer toutes ses cartes sans interruption ; on chargera de conditions l’emploi de la comete ; on fera payer plus ou moins selon la carte pour laquelle on la mettra : à présent on peut la mettre pour toute carte ; on fera perdre plus ou moins à celui dans la main de qui on la fera gorger, ou rester, c’est la même chose, &c. Nous ne nous piquons guere d’exactitude sur ces choses, elles en valent peu la peine ; d’ailleurs ce qui seroit exact dans le moment où nous écrivons, cesseroit bientôt de l’être par le caprice des joüeurs, qui ajoûtent des conditions au jeu, en retranchent, ou les alterent.

COMETÉ, adj. terme de Blason : on dit face cometée, pour dire qu’elle a un rayon ondoyant, tel que celui de la comete caudée. Les pals cometés different des flamboyans, en ce que les cometés sont mouvans du chef, & les flamboyans de la pointe en haut. (V)

* COMEUS, (Myth.) surnom d’Apollon sous lequel il étoit adoré à Seleucie, d’où sa statue fut portée à Rome, & placée dans le temple d’Apollon-Palatin. On dit que les soldats qui prirent Seleucie s’étant mis à chercher dans le temple d’Apollon Comeus des thrésors qu’ils y supposoient cachés, il sortit par une ouverture qu’ils avoient faite, une vapeur empoisonnée qui répandit la peste depuis cette ville jusque sur les bords du Rhin ; c’est-à-dire que ce pillage & cette peste (si elle est vraie) arriverent en

même tems, & que le peuple toûjours superstitieux & raisonnant à sa maniere ordinaire, regarda l’un de ces évenemens comme la cause de l’autre.

Apollon-Comeus, c’est-à-dire Apollon à belle chevelure : l’idée poétique de donner à Apollon une belle chevelure blonde, vient selon toute apparence, de la maniere éparse dont on voit ses rayons lorsqu’ils tombent obliquement sur une forêt épaisse, & qu’ils passent entre les feuilles des arbres comme de longs filets lumineux & blonds. Les Naucratiens célébroient sa fête en habit blanc.

* COMICES, s. m. pl. (Hist. anc.) c’est ainsi qu’on appelloit les assemblées du peuple Romain, qui avoient pour objet les affaires de l’état, comitia. Elles étoient convoquées & dirigées ou par un des deux consuls, ou dans la vacance du consulat, par l’interrex, par un préteur, un dictateur, un tribun du peuple, un souverain pontife, ce qui n’étoit pas ordinaire, un décemvir, ou un édile.

Les comices se tenoient ou pour l’élection d’un magistrat, ou pour quelque innovation dans les lois, ou pour une résolution de guerre, l’addiction d’un gouvernement, la déposition d’un général, le jugement d’un citoyen. On s’assembloit ou dans le champ de Mars, ou dans le marché, ou au capitole. Les citoyens habitans de Rome & les étrangers y étoient indistinctement admis : il n’y avoit point de comices les jours de fêtes, les jours de foires, ni les jours malheureux. On ne comptoit dans l’année que 184 jours de comices. Ils étoient remis quand il tonnoit ou faisoit mauvais tems ; lorsque les augures ne pouvoient ou commencer ou continuer leurs observations. La liberté des assemblées Romaines fut très gênée sous Jules César, moins sous Auguste, plus ou moins dans la suite, selon le caractere des empereurs.

La distinction des comices suivit la distribution ou peuple Romain. Le peuple Romain étoit divisé en centuries, en curies, & en tribus : il y eut donc, surtout dans les commencemens, les comices appellés comitia tributa, les curiata, & les centuriata. Ils prirent aussi des noms différens, suivant les magistratures auxquelles il falloit pourvoir ; & il y eut les comices dits consularia, les prætoria, les ædilitia, censoria, pontificia, proconsularia, proprætoria, & tribunitia, sans compter d’autres comices dont l’objet étant particulier, le nom l’étoit aussi, tels que les calata.

Comices dits ædilitia, assemblées où l’on élisoit les édiles curules & plébéiens ; elles étoient quelquefois convoquées par les tribuns, quelquefois par les édiles ; le peuple y étoit distribué par tribus.

Comices dits calata ; le peuple y étoit distribué par curies ou par centuries. C’étoit un licteur qui appelloit les curies ; c’étoit un cornicen qui appelloit les centuries ; elles étoient demandées par le collége des prêtres ; on y élisoit dans les centuries un rex sacrificulus, & dans les curies un flamine ; on n’appelloit que dix-sept tribus ; ce n’étoient donc pas proprement des assemblées qu’on pût appeller comitia, mais consilia ; on y faisoit les actes appellés adrogations, ou adoptions de ceux qui étoient leurs maîtres, sui juris ; on y passoit les testamens appellés de ce nom, testamenta calata ; on y agitoit de la cérémonie appellée detestatio sacrorum, ou de l’accomplissement des legs destinés aux choses sacrées, selon quelques-uns, ou de la consécration des édifices, selon d’autres.

Comices dits censoria, assemblées où l’on élisoit les censeurs : le peuple y étoit distribué par centuries ; un des consuls y présidoit ; le censeur élu entroit en charge immédiatement après l’élection, à moins qu’il n’y eût quelque cause de nullité.

Comices dits centuriata, assemblées où le peuple