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La chaleur de l’eau bouillante n’est pas considérable, ce qui fait que les parties solides peuvent à peine être écartées les unes des autres, & que les pores ne s’ouvrent que peu ; de sorte que la graisse ne sauroit y pénétrer profondément, ni faire par conséquent la fonction d’un aimant qui agit avec force : ainsi afin que la graisse pût alors mieux remplir les pores, on rendit ces corps beaucoup plus chauds en les frottant de graisse dans le tems qu’elle étoit comme bouillante ; & après qu’ils furent refroidis, ils s’attirerent réciproquement avec beaucoup plus de force, comme on le peut voir par ce qui suit.

De verre, 300 de fer, 950
de cuivre jaune, 800 de cuivre rouge, 850
de marbre blanc, 600 d’argent, 250

On met quelquefois entre deux corps solides un enduit à demi liquide, qui fait que ces corps tiennent ensemble dans la suite avec beaucoup de force, & qu’ils semblent ne former qu’un seul corps solide ; cela se remarque lorsqu’on détrempe de la chaux avec du sable & de l’eau.

Il arrive quelquefois que deux liquides sont composés de parties qui s’attirent mutuellement avec beaucoup de force, de sorte qu’ils se changent en un corps solide après leur mêlange. C’est ainsi que l’huile de tartre par défaillance incorporée avec l’huile de vitriol, se convertit en un corps solide auquel on donne le nom de tartre vitriolé.

Le froid durcit certains corps dont les parties étoient auparavant mollasses : le feu produit aussi le même effet sur d’autres corps.

Le froid réduit en masses solides tous les métaux, les demi-métaux, les résines terrestres & végétables, de même que le verre, après que ces corps ont été fondus par la chaleur.

L’acier rougi au feu, & plongé ensuite subitement dans l’eau froide, devient aussi-tôt dur.

Le feu durcit encore d’autres corps, parmi lesquels on peut compter la terre-glaise mollasse, que le feu rend aussi dure qu’une pierre, tant à cause que l’eau s’évapore, que parce que le feu subtilise en même tems toutes les parties terrestres, & qu’il fait fondre les sels, lesquels pénetrent ensuite & s’insinuent dans ces parties ; ce qui fait qu’elles s’attirent mutuellement avec force, parce qu’elles se touchent en plusieurs points de leurs surfaces, & doivent former par conséquent un corps fort solide.

Tout cela est tiré de M. Musschenbroek, essai de Physiq. art. 655. & suiv. nous n’avons fait que l’abréger ; ceux qui voudront recourir à l’ouvrage même de ce grand physicien, y trouveront un plus grand détail. (O)

Cohésion, (Med.) Quelle que soit la cause de la force plus ou moins considérable, par laquelle deux parties fluides ou solides se touchent & adherent, la Medecine doit considérer attentivement cet effet dans les fluides & les solides du corps humain.

Nos fluides peuvent être viciés à cet égard de différentes manieres ; & en général, leur cohésion peut être trop forte ou trop foible. L’union trop forte ou trop tenace de leurs molécules, empêche qu’il ne se sépare de petites particules des grandes : production si nécessaire pour l’intégrité de la vie ! Leur division trop facile ne nuit pas moins en ce qu’elle est un obstacle à la constance de la santé. Tous les Medecins savent que cette tenacité & cette dissolution des humeurs détruisant également leur cohésion naturelle, sont la source d’une infinité de maladies particulieres.

Les solides peuvent pécher pareillement en manque ou en excès de cohésion ; car la cohésion trop foible ou trop forte, soit des simples fibres solides, soit

des vaisseaux ou des visceres qui en sont formés, donnent naissance à une infinité de desordres, que les méthodiques nommoient très-bien maladies de relâchement & de resserrement. Voici comme on doit concevoir ces vérités.

De quelque cause que procede la cohésion mutuelle de tous les vaisseaux, il est certain qu’ils peuvent se préter à l’impulsion du fluide, & en être distendus ; mais ils ne le peuvent que jusqu’à un certain point sans accident. Il est d’ailleurs certain que cette cohésion est différente dans les divers âges de la vie : de plus, on ne peut s’empêcher d’imaginer différens degrés de cohésion dans les différens solides Par exemple, il semble qu’il y a bien moins de cohésion dans la pulpe molle du nerf auditif, que dans le faisceau nerveux qui constitue le dur tendon d’Achille : ajoûtons aussi, qu’il faut que la cohésion des solides soit capable de supporter, non-seulement le mouvement modéré des fluides dans les vaisseaux, tel qu’il a lieu en bonne santé, mais encore la vélocité de leur circulation dans l’état maladif, sans que cette cohésion soit détruite ; & c’est effectivement ce qui arrive d’ordinaire, car il est communément besoin de longs & de violens efforts pour produire la rupture.

La débilité des parties solides est donc excessive, lorsqu’elles ne peuvent sans que leur cohésion cesse, soûtenir l’effort des actions d’un corps en santé, & même d’un mouvement de circulation plus impétueux que de coûtume. On reconnoît que le relâchement est trop grand, quand les fibres sans se rompre s’allongent au moindre effort du mouvement vital. De cette facile dilatation des fibres & des vaisseaux, naissent la stagnation des liqueurs, la crudité des humeurs, la corruption spontanée, l’inanition, la cachexie, la cacochimie, & plusieurs autres maux qu’on regarde mal-à-propos comme des maladies de tempérament.

Si on laisse trop augmenter l’affoiblissement, pour lors il est encore à craindre que l’impétuosité violente du liquide, poussé continuellement par la force du cœur, n’occasionne la rupture. On voit plusieurs exemples de ce fâcheux accident, lorsque de jeunes gens délicats étant dans l’âge où finit leur croissance, se rompent un vaisseau dans le poumon pour avoir crié, chanté, ou couru. Puis donc que la cohésion trop foible des solides cause de si grands desordres, il faut y obvier par des remedes qui procurent une cohésion plus forte, par des alimens substantiels, les acides austeres, entre autres le fer dissous dans des acides doux ; l’exercice, les frictions, &c.

Mais s’il y a des maladies qui ont pour principe la foiblesse de la cohésion dans les solides, il y en a beaucoup aussi qui procedent nécessairement de l’excès de cette cohésion : de-là, le manque des secrétions, la roideur, l’immobilité, la sécheresse, la coalition des vaisseaux avec leurs liquides, les concrétions de tout genre, l’ossification, la vieillesse, &c. les remedes même contre ces maux ne sont presque que des palliatifs. Il est cependant nécessaire de les mettre en usage, de diminuer la violence, la densité, la pression du sang, d’employer les humectans, les émolliens, les délayans de toute espece, en boissons, en vapeurs, en fomentations, en bains, &c.

On comprend maintenant les divers effets qui résultent tant de la force que de la foiblesse de la cohésion. On conçoit en conséquence la nature & la cure d’un grand nombre de maladies, l’utilité qu’on peut retirer de la doctrine du resserrement & du relâchement des solides ; & cette matiere si importante en pratique, si curieuse en théorie, étoit inconnue avant Boerhaave, & n’a été développée que par ce grand homme. Art. de M. le Chevalier de Jaucourt.

COHI, s. m. (Comm.) mesure de grains, en usage