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par une couche de cendres bien tamisées, que l’on étend convenablement par-tout à l’aide de la planche.

Après ces premieres opérations on démonte la planche du compas ; on l’échancre en l’ébiselant jusqu’à la courbe NK1D qui doit servir à former le modele.

Le modele est composé d’un mêlange de terre & de boutre dont on forme plusieurs pieces ou gâteaux ; on les applique sur le noyau ; elles s’unissent ensemble : on termine le modele par plusieurs couches du même ciment, mais délayé ; chaque couche s’égalise par le compas, & se seche avant que d’en appliquer une autre ; la derniere est un enduit de suif & de cire fondus, qu’on dispose avec le compas sur toute la surface du modele ; c’est là-dessus qu’on place les armoiries & les lettres, & qu’on trace les cordons. Les cordons se forment par des entailles pratiquées au compas ; & les lettres & armoiries s’exécutent avec un pinceau que l’on trempe dans de la cire fondue, qu’on applique sur le corps du modele, & qui les y forme ; on les repare ensuite avec des ébauchoirs : c’est l’ouvrage d’un sculpteur.

Il s’agit maintenant d’exécuter la chape ou le surtout : on sépare encore la planche du compas ; on l’échancre en l’ébiselant jusqu’à la ligne oood parallele à la face extérieure de la cloche, & qui en est distante de deux ou trois pouces, plus ou moins, selon que l’on veut d’épaisseur à la chape : la premiere couche de la chape est composée de terre bien tamisée, que l’on délaye avec de la bourre très-fine ; on applique cet enduit sur tout le modele avec un pinceau, ensorte qu’il en soit tout couvert ; on laisse sécher cette couche d’elle-même, ou sans feu : on en applique une seconde, une troisieme, jusqu’à ce que l’épaisseur de toutes ces couches ait acquis deux lignes d’épaisseur ; alors on applique un ciment plus grossier, & qu’on laisse pareillement sécher sans feu : on rallume ensuite du feu dans le moule, qu’on augmente petit-à-petit jusqu’à ce qu’il soit assez ardent pour fondre les cires, qui s’écoulent par des égoûts pratiqués au bas de la chape, & qu’on rebouche ensuite avec la terre.

Après que le feu qui est dans le noyau est éteint, on remet le compas en place, & on acheve de donner à la chape l’épaisseur qu’elle doit avoir. Dans les grandes cloches la chape est sertie par des anneaux de fer plat qui l’affermissent : ces bandes ont quelques crochets ou anneaux qui donnent prise pour enlever la chape lorsqu’on en veut retirer le modele, qui occupe la place du métal dont la cloche doit être formée. La chape ainsi achevée, on démonte le compas, qui n’est plus d’aucun usage.

Il faut maintenant former le cerveau qui est resté ouvert au haut du noyau du modele & de la chape : pour cet effet, on commence par terminer le noyau avec les mêmes matieres dont il a été construit, qu’on dispose selon la forme convenable au cerveau, par le moyen d’une cerce profilée sur la courbe AeA intérieure du cerveau ; on place en même tems l’S ou anse de fer qui doit porter le battant ; on l’enterre dans la maçonnerie du cerveau, de maniere que la partie inférieure passe au-dedans de la cloche, & que la partie supérieure soit prise dans la fonte par le métal qui formera le pont. Voy. la fig. premiere.

On forme ensuite avec de la cire & par le moyen d’une cerce ou d’un compas fait exprès, dont le pivot s’appuie sur le centre du noyau où l’on a scellé une petite crapaudine de fer, qu’on ôtera dans la suite avec le compas, dont la planche est profilée selon bQN ; on forme en cire le cerveau & l’onde qui le renforcit.

On modele en cire les anses au nombre de six ; placées comme on les voit fig. 4. aa, sont les deux anses latérales ; bb, les deux anses antérieure & postérieure ; c, le pont ou le pilier placé au centre du cerveau, sur lequel se réunissent toutes les anses. On voit, fig. 5. les anses en perspective.

Après avoir modelé & terminé en cire toutes ces pieces, on les couvre avec le pinceau des mêmes couches de ciment qui ont servi à couvrir la chape, observant que cette chape particuliere des anses ne soit point adhérente à celle de la cloche. Lorsqu’elle est finie, on l’enleve pour la faire recuire & en retirer la cire, qui en fondant laisse un vuide que le métal doit remplir, pour former le cerveau & les anses de la cloche.

On a eu soin de ménager à la partie supérieure de la chape des anses & du pont plusieurs trous, entre lesquels il y en a un au-dessus du pont, & qui sert de jet pour le métal ; d’autres qui répondent aux anses & qui servent d’évent à l’air qui est contenu dans l’espace laissé vuide par les cires, & que le métal fondu fait sortir en prenant leurs places.

Pour retirer le modele de la cloche qui occupe l’espace entre le noyau & la chape, on soûleve celle-ci à force de bras, ou par le moyen d’un treuil placé au-dessus de la fosse dans la charpente de l’attelier ; on ôte le modele, on remet la chape après l’avoir enfumée avec de la paille qu’on brûle dessous ; on ne la change point de place en la remettant ; on obvie à cet inconvénient par des repaires. Sur la chape de la cloche, on place celle des anses qu’on a repairée pareillement ; on lutte bien & ces deux chapes ensemble, & la chape de la cloche avec la meule qui soûtient tout le moule qui est alors entierement sini. Il ne reste plus qu’à recuire le ciment qui a servi à joindre ses pieces : pour cet effet, on le couvre peu-à-peu de charbons allumés ; on pousse le feu par degrés : par ce moyen on évite des gersures, qu’un feu trop grand & trop vif ne manqueroit pas d’occasionner.

On remplit ensuite la fosse de terre, qu’on corroie fortement autour du moule, qui est alors tout disposé à recevoir le métal fondu dans le fourneau.

Le fourneau T pour les cloches, est le même que celui de la fonderie des statues équestres & des canons. Voyez-en la description à l’article Bronze. Il n’y a de différence que dans la solidité qu’on donne beaucoup plus grande au fourneau des statues équestres. Au lieu d’être de brique, il est seulement de terre corroyée.

Quant à la composition métallique, la plus parfaite est de trois parties de cuivre rouge, & d’une partie d’étain fin. On ne met l’étain, que quand le cuivre est en fusion, & qu’après avoir été épuré de ses crasses, peu de tems avant que de couler le métal dans le moule.

Le métal est conduit par un canal de terre recuite dans le godet placé au-dessus du moule, d’où il se répand dans tout le vuide qu’occupoit le modele, dont il prend exactement la forme. On le laisse refroidir ; quand il est à-peu-près froid, on déterre le moule, on brise la chape, & la cloche paroît à découvert ; on l’enleve de la fosse par le moyen du treuil, qui a servi auparavant à enlever la chape ; on la nettoie en-dedans & en-dehors ; on la bénit ; on y attache le battant, & on la suspend au mouton qui lui est destiné.

La quantité de métal que l’on met au fourneau se regle sur la grosseur de la cloche à fondre ; mais il en faut avoir plus que moins, pour prévenir les pertes accidentelles qui ont quelquefois fait manquer des fontes considérables. On ne risque rien d’en fondre