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une portion du corps lumineux qui y doit entrer, alors on ne voit plus la lumiere nettement, mais avec de grands traits lumineux dirigés vers le haut & le bas de cette lumineux, & ces grands traits sont les portions du cone refléchies par chaque paupiere ; mais les paupieres ne troublent ainsi la vûe que quand on les ferme exprès, & encore l’objet n’a ces grands traits de lumiere qu’en-dessus & en-dessous, parce que les paupieres dans cet état de clignement, interceptent les rayons du cone lumineux de la chandelle. La vûe est un sens qui se trompe lui-même, & qu’on trompe perpétuellement. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

CLIMACTÉRIQUE, adj. (Année) Divination, année critique ou période de l’âge de l’homme, dans laquelle les astrologues prétendent qu’il se fait dans le corps une altération considérable qui conduit à des maladies, à la mort, ou qui signale cette année par des accidens funestes.

Nous ajoûtons cette derniere clause, parce que Evelius qui a fait un volume entier sous le titre de annus climactericus, y décrit la perte qu’il fit par le feu qui prit à son observatoire, & que cet accident lui arriva dans sa plus grande climactérique.

Ce mot vient du Grec κλιμακτὴρ ou κλιμακτηρικὸς, dérivé de κλῖμαξ, degré ou échelle ; parce qu’on monte de sept en sept ou de neuf en neuf ans, pour arriver à l’année qui s’appelle climactérique.

Ainsi la premiere année climactérique de la vie de l’homme, c’est, selon quelques-uns, la septieme ; les autres sont des multiples de celle-ci, savoir 14, 21, 28, 35, 42, 49, 56, 63, 70, 77, 84 : mais les années 63 & 84 sont nommées en particulier grandes climactériques, & l’on croit que le danger de mort y est beaucoup plus grand que dans les autres.

Selon d’autres auteurs, l’année climactérique se compte de neuf en neuf ; c’est pour cela, disent-ils, que la soixante-troisieme & la quatre-vingt-unieme sont les plus dangereuses ; parce que dans l’une le nombre de sept, & dans l’autre le nombre de neuf, se trouvent repétés neuf fois.

Cette opinion est fort ancienne. Aulugelle l’attribue aux Chaldéens, qui pouvoient l’avoir reçûe de Pythagore, si peut-être dans ses voyages ce philosophe ne l’emprunta pas d’eux ; car on sait que sa philosophie étoit fondée en grande partie sur les rapports & les propriétés des nombres, & qu’il attribuoit sur-tout au nombre sept une vertu particuliere.

Marsile Ficin pense en avoir trouvé le fondement, en disant qu’il a été assigné à chaque planete une année pour dominer sur le corps de l’homme chacune à son tour ; & que comme de toutes les planetes Saturne est la plus mal-faisante, toutes les septiemes années qui lui appartiennent, doivent être par cette raison très-dangereuses, & sur-tout les 49, 56, & 63 années où l’on est déjà avancé sur l’âge : mais peut-être eût-on fort embarrassé Marsile Ficin, en lui demandant pourquoi les planetes dominoient sur le corps de l’homme, & pourquoi les influences de Saturne étoient plus funestes que celles des autres planetes.

Cependant des hommes fort éclairés ont eû foi à ces influences. Auguste, si l’on en croit Suetone, se réjouissoit d’avoir passé sans danger sa grande climactérique, c’est-à-dire sa soixante & troisieme année ; car il mourut âgé de 76 ans. Quelques-uns ont prétendu que les années climactériques étoient aussi fatales au corps politique ; & on pourroit en convenir, s’il étoit prouvé qu’elles le sont au corps naturel.

On en étoit assez persuadé il n’y a pas deux siecles, c’est-à-dire du tems de la ligue ; car M. de Thou & Mezerai racontent que Jean Bodin, si connu par sa

démonomanie, & qui étoit avocat du roi à Laon, voulant faire déclarer cette ville en faveur de la ligue & contre Henri III. fit un discours aux habitans assemblés, où il s’attacha à lever leurs scrupules ; & après s’être déchaîné contre le roi qu’il osa traiter de traitre & d’hypocrite, « il tira, dit M. de Thou, des circonstances présentes un présage assez funeste à la succession à la couronne : car il dit que l’année soixante & troisieme de l’homme étoit son année climactérique, & ne manquoit guere de lui être funeste ; qu’ainsi, comme on comptoit parmi nous soixante & trois rois depuis Pharamond jusqu’à Henri III. il sembloit que ce prince dût être fatal à la France, & que ce fût par lui que la couronne dût sortir de sa maison ». De Thou, hist. l. XCIV. Mezerai dit à-peu-près la même chose, dans son abregé chronologique, sous l’an 1589. De pareils raisonnemens ne surprennent pas de la part de Bodin, & les impressions qu’ils firent, ne doivent pas paroître étranges dans un siecle infatué de l’astrologie judiciaire.

Au reste plusieurs auteurs célebres ont écrit sur l’année climactérique ; entre autres Platon, Cicéron, Macrobe, Aulugelle, auxquels on peut ajoûter saint Augustin, S. Ambroise, le vénérable Bede, Boece, &c. & parmi les modernes, Argol, Magir, & Saumaise, de annis climactericis. (G)

CLIMAT, s. m. (Géog.) portion ou zone de la surface de la terre, terminée par deux cercles paralleles à l’équateur, & d’une largeur telle que le plus long jour dans le parallele le plus proche du pole, surpasse d’une certaine quantité, par exemple d’une demi-heure, le plus long jour dans le parallele le plus proche de l’équateur. Voy. Terre, Parallele, &c.

Les climats se prennent donc depuis l’équateur jusqu’aux poles, & sont comme autant de bandes ou de zones paralleles à l’équateur : mais il y a à la rigueur plusieurs climats dans la largeur de chaque zone. Un climat n’est différent de celui qui est le plus proche de lui, qu’en ce que le plus grand jour d’été est plus long ou plus court d’une demi-heure dans l’un que dans l’autre. Chambers.

L’intervalle du premier climat est de 8d 30′, & celui du dernier n’a pas plus de 3′. Pour concevoir la raison de cette inégalité, qui procede d’une propriété de la sphere, il faut s’imaginer que dans la sphere droite la moitié du tropique du cancer, qui est au-dessous de l’horison, est divisée en quarante-huit parties égales, chaque partie étant de 3d 45′, qui valent un quart-d’heure : de plus, qu’il y a une de ces parties vers l’orient, & une vers l’occident, les plus proches de l’horison, qui toutes deux ensemble font une demi-heure de tems, qui répond à l’intervalle d’un climat. Cela posé, on voit que la raison de l’inégalité des climats procede de la section plus ou moins oblique du tropique par l’horison, selon les différentes élévations du pole, qui font que l’horison coupant moins obliquement le tropique aux parties égales de 3d 45′ prises du côté d’orient & d’occident proche l’horison immobile, il en résulte une plus grande différence des hauteurs du pole, que lorsque le tropique est coupé plus obliquement par l’horison aux mêmes points de 3d 45′. Ainsi cette différence des hauteurs du pole, qui correspond à la demi-heure des premiers climats, étant plus grande vers l’équateur que vers les cercles polaires où sont les derniers climats, cela rend leur intervalle très-inégal, & bien plus grand vers l’équateur que vers les poles.

Comme les climats commencent à l’équateur, le premier climat dans son commencement a, par cette raison, précisément douze heures de jour à son plus grand jour ; & à sa fin, il a douze heures & demie à son plus grand jour. M. Formey.

Le second climat qui commence où le premier fi-