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dessus ou au-dessous devienne incommode, alors on change la clé : on voit clairement par la figure quelle clé il faudroit prendre pour élever ou abaisser la portée, de quelque clé qu’elle soit armée actuellement.

On voit aussi que pour rapporter une clé à l’autre, il faut les rapporter toutes deux sur le clavier général, au moyen duquel on voit ce que chaque note de l’une de ces clés est à l’égard de l’autre : c’est par cet exercice réitéré qu’on prend l’habitude de lire aisément les partitions.

Il suit de cette méchanique, qu’on peut placer telle note qu’on voudra de la gamme sur une ligne ou dans un espace quelconque de la portée, puisqu’on a le choix de huit positions différentes, qui est le nombre des sons de l’octave : ainsi on pourroit noter un air entier sur la même ligne, en changeant la clé à chaque note.

La fig. 7. Plan. I. montre par la suite des clés la suite des notes, ré, fa, la, ut, mi, sot, si, ré, montant de tierce en tierce, & toutes placées sur la troisieme ligne.

La figure suivante (8.) représente sur la suite des mêmes clés la note ut, qui paroît descendre de tierce en tierce sur toutes les lignes de la portée & au-delà, & qui cependant, au moyen des changemens de clés, garde toûjours l’unisson.

Il y a deux de ces positions, savoir la clé de sol sur la premiere ligne, & la clé de fa sur la troisieme, dont l’usage paroît s’abolir de jour en jour. La premiere peut sembler moins nécessaire, puisqu’elle ne rend qu’une position toute semblable à celle de fa sur la quatrieme ligne, dont elle differe pourtant de deux octaves. Pour la clé de fa, en l’ôtant tout-à-fait de la troisieme ligne, il est évident qu’on n’aura plus de position équivalente, & que la composition du clavier qui est complette aujourd’hui, deviendra défectueuse en cela. (S)

Clé transposée, est en Musique toute clé accompagnée de dièses ou de bémols. Ces signes y servent à changer le lieu des deux semi-tons de l’octave, comme je l’ai dit au mot Bémol, & à établir l’ordre naturel de l’octave sur tous les differens degrés de l’échelle.

La nécessité de ces altérations naît de la similitude des modes dans tous les tons ; car comme il n’y a qu’une formule pour le mode majeur, il faut que tous les sons de ce mode dans chaque ton se trouvent ordonnés de la même maniere sur leur tonique ; ce qui ne peut se faire qu’à l’aide des dièses ou des bémols. Il en est de même du mode mineur : mais comme la même combinaison de sons qui donne la formule pour un ton majeur, la donne aussi pour le mode mineur d’un autre tonique (Voyez Mode), il s’ensuit que pour les vingt-quatre modes il suffit de douze combinaisons : or si avec la gamme naturelle, on compte six modifications par dièses (Voyez Dièse), & cinq par bémols (Voyez Bémols), ou six par bémols & cinq par dièses ; on trouvera ces douze combinaisons, auxquelles se bornent toutes les variétés possibles des tons dans le système établi.

Nous expliquerons aux mots Dièse & Bémol l’ordre selon lequel ils doivent être placés à la clé. Mais pour transposer la clé convenablement à un ton ou mode quelconque, voici une formule générale trouvée par M. de Boisgelou conseiller au grand-conseil, & qu’il a bien voulu me communiquer.

Je commence par le mode majeur.

Prenant la note ut pour terme de comparaison, nous appellerons intervalles mineurs la quarte ut fa, & tous les intervalles d’ut à une note bémolisée quelconque ; tout autre intervalle est majeur. Remarquez qu’on ne doit pas prendre par dièse la note supérieure d’un intervalle majeur, parce qu’alors

on feroit un intervalle superflu ; mais il faut chercher la même chose par bémol, ce qui donnera un intervalle mineur. Ainsi on ne composera pas en la dièse, parce que la sixte ut la étant majeure naturellement, le dièse de la la rendroit superflue : mais on prendra la note si bémol, qui donne la même touche par un intervalle mineur ; ce qui rentre dans la regle.

Voici donc comment le mode majeur doit s’appliquer sur chacun des douze sons de l’octave, divisé par intervalles majeurs & mineurs.

Pour transposer la clé convenablement à une de ces douze notes prise à volonté, comme tonique ou fondamentale, il faut d’abord voir si l’intervalle qu’elle fait avec ut est majeur ou mineur : s’il est majeur, il faut des dièses ; s’il est mineur, il faut des bémols.

Pour déterminer maintenant combien il faut de dièses ou de bémols, soit a le nombre qui exprime l’intervalle d’ut à la note en question ; la formule par dièses sera , & le reste donnera le nombre de dièses, qu’il faut joindre à la clé ; la formule par bémols sera , & le reste sera le nombre des bémols qu’il faut joindre à la clé.

Je veux, par exemple, composer en la mode majeur ; il faudra des dièses, parce que la fait un intervalle majeur avec ut. L’intervalle est une sixte dont le nombre est six : j’en retranche un ; je multiplie le reste cinq par deux, & du produit dix rejettant sept autant de fois qu’il se peut, le reste trois est le nombre des dièses qu’il faut à la clé pour le ton majeur de la.

Que si je veux prendre fa mode majeur, je vois que l’intervalle est mineur, & qu’il faut par conséquent des bémols. Je retranche donc un du nombre quatre de l’intervalle ; je multiplie par cinq le reste trois, & du produit quinze rejettant sept autant de fois qu’il se peut, j’ai un de reste ; c’est un bémol qu’il faut à la clé.

On voit par-là que le nombre de dièses ou de bémols de la clé ne peut jamais passer six, puisqu’ils doivent être le reste d’une division par sept.

Pour les tons mineurs il faut appliquer la même formule des tons majeurs, non sur la tonique, mais sur la note qui est une tierce mineure au-dessus de cette même tonique, c’est-à-dire sur sa médiante.

Ainsi pour composer en si mineur, je transposerai la clé comme pour le ton majeur de ré ; pour fa dièse mineur je la transposerai comme pour la majeur ; pour sol mineur, comme pour si bémol majeur, &c.

Les Musiciens ne déterminent les transpositions qu’à force de pratique, ou en tâtonnant : mais la regle que nous donnons est démontrée générale, & sans exception. (S)

On voit aisément par la méthode que nous proposons ici, que l’on doit mettre un bémol à la clé dans le mode mineur de ré, quoique presque tous les Musiciens François, si on en excepte M. Rameau, ne mettent rien à la clé dans ce mode. La méthode de M. Rameau est pourtant fondée sur cette regle très-simple & très-vraie, que dans le mode majeur il faut mettre autant de dièses ou de bémols à la clé que l’échelle du mode en contient en montant ; & que dans le mode mineur il faut mettre