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sont dedans, lesquelles en faisant bien leur devoir, doivent le culbuter dans le fossé.

Supposons qu’il parvienne à faire plier la premiere ligne d’infanterie qui borde la ligne, la cavalerie qui est derriere peut (& elle le doit) tomber sur l’infanterie ennemie qui a pénetré dans la ligne ; & comme elle ne peut y entrer qu’en desordre, il est aisé à cette cavalerie de tomber dessus & de la culbuter.

Malgré des avantages si évidens, l’expérience, dit M. le chevalier de Folard, démontre que le soldat est moins brave & moins résolu derriere un retranchement, qu’en rase campagne. Il met toute sa confiance dans ce retranchement ; & lorsque l’ennemi, pour éviter d’être trop long-tems exposé au feu de la ligne, se jette brusquement dans le fossé, & qu’il tâche de monter de-là sur le retranchement, le soldat commence à perdre confiance ; & il la perd totalement, lorsqu’il le voit pénétrer dans la ligne. « On croit, dit cet auteur, le mal sans remede, lorsqu’il n’y a rien de plus aisé que d’y en apporter, de repousser ceux qui sont entrés, & de les culbuter dans le fossé : car outre qu’ils ne peuvent pénétrer en bon ordre, ils sont dégarnis de tout leur feu ; cependant l’on ne fait rien de ce que l’on est en état de faire : l’ennemi entre en foule, se forme, & l’autre se retire ; & la terreur courant alors dans le long de la ligne, tout s’en va, tout se débande, sans savoir souvent même où l’on a percé ».

On peut conclure de-là, que lorsque le soldat connoîtra bien tous les avantages que lui procure une bonne ligne, qu’il sera disposé à s’y bien défendre, que toutes les parties pourront également en être soûtenues, & enfin qu’on prendra toutes les précautions nécessaires pour n’y être point surpris, il sera bien difficile à l’ennemi de la forcer.

On en a vû un exemple au siége de Philisbourg en 1734. Les bonnes dispositions de la circonvallation empêcherent le prince Eugene, après qu’il l’eut bien reconnue, d’en faire l’attaque. Il fut simple spectateur de la continuation du siége, & il ne jugea pas à-propos, dit l’historien de sa vie, d’essayer de forcer nos lignes, tant elles lui parurent redoutables & à l’abri de toute insulte. En effet, leur peu d’étendue les mettoit en état d’être également défendues.

Lorsqu’on se trouve dans des situations semblables, on peut donc attendre l’ennemi tranquillement : mais lorsque la grandeur de la circonvallation ne permet pas de la garnir également, le parti le plus sûr est d’aller au-devant de l’ennemi ; comme le fit M. le maréchal de Tallard à Landau en 1703, & M. le duc de Vendôme à Barcelone en 1704.

Tout le monde sait qu’au siége de Turin en 1706, feu M. le duc d’Orléans proposa de prendre le même parti ; & que pour ne l’avoir pas pris, l’armée Françoise fut obligée de lever le siége, parce que les lignes n’étoient pas également bonnes par tout : l’ennemi pénetra d’un côté qui avoit été négligé ; il força les troupes, & secourut la ville.

M. le chevalier de Folard prétend que, sans aller au-devant de l’ennemi, il étoit aisé de l’empêcher de forcer les lignes, en ne se négligeant point sur les attentions nécessaires pour les soûtenir : que pour cela, il falloit envoyer assez de monde pour les défendre du côté que le prince Eugene les attaqua ; qu’elles ne valoient absolument rien de ce côté, qui n’avoit pour défense que la seule brigade de la Marine, qui fut obligée pour le garnir, de se ranger sur deux de hauteur, & qui dans cet état repoussa pourtant l’ennemi : mais que pendant l’attaque, le prince Eugene ayant remarqué une partie de la ligne sur la droite, où il n’y avoit qu’une compagnie de grenadiers, & où on pouvoit aller à couvert d’un rideau ou élévation de terre, il y fit aller cinquante

hommes, lesquels entrerent par cet endroit. On s’imagina d’abord qu’il y étoit entré un corps beaucoup plus considérable : ainsi ce poste qui n’étoit pas assez garni de monde pour résister, ayant été emporté, l’épouvante se communiqua par-tout, & fit abandonner la ligne. M. de Folard ajoûte, que si M. d’Albergotti, qui étoit à portée d’envoyer un secours considérable au poste dont on vient de parler, l’avoit fait, l’entreprise du prince Eugene sur les lignes échouoit infailliblement.

L’exemple de l’attaque des lignes de Turin entendu & expliqué de cette maniere, ne prouve point que des lignes bien défendues soient toûjours forcées indubitablement ; il montre seulement que, lorsqu’il y a eû quelque négligence dans la circonvallation, qu’elle n’est pas également bonne de toute part, & que l’ennemi peut avoir le tems d’y forcer quelques quartiers avant qu’ils puissent être secourus des autres, il ne faut pas s’y renfermer ; mais qu’on le peut lorsqu’elle renferme assez de troupes pour l’aborder de toute part. Attaque des places, par M. Leblond. (Q)

CIRCONVOISIN, adj. on dit, en Physique, les corps circonvoisins, pour désigner les corps qui en environnent un autre, ou qui en sont proches. (O)

CIRCONVOLUTION, s. f. l’action de tourner autour, du Latin circumvolvere, tourner à l’entour. Il se dit, en Architecture, de la ligne spirale de la volute ionique. Voy. Volute & Colonne. (P)

* CIRCUIT, s. m. (Gram.) se dit dans l’usage ordinaire, par opposition au chemin le plus court d’un lieu dans un autre, de toute autre maniere d’y arriver, que par la ligne droite. Ce terme a été transporté par métaphore du physique au moral.

Circuit, c’est l’enceinte, le contour, ou le périmetre d’une figure ou d’un corps. Voyez Périmetre. (E)

Circuit, en Droit, est une procédure longue & compliquée, qui pourroit être suppléée par une plus simple ; comme si dans le cas où il y a lieu à la compensation entre deux personnes qui sont respectivement débiteurs & créanciers l’un de l’autre, on commençoit par condamner celui qui a été actionné le premier, & par faire exécuter la condamnation avant de faire droit sur la demande incidente qu’il forme pour sa défense, tandis qu’on peut par un seul & même jugement, statuer sur les demandes respectives des deux parties. (H)

Circuit, (Hist. mod. d’Angl.) on entend par ce mot, en Angleterre, les diverses provinces où les juges vont rendre la justice au peuple deux fois par année.

C’est vers l’an 1175 que Henri II. ce prince qui ne fut jamais rassasié de biens ni d’amour, & qui travailloit continuellement à corrompre le beau sexe & à étendre ses états, partagea l’Angleterre en six parties ou circuits, qui furent assignés à autant de juges, pour y aller en certains tems tenir les assises, c’est-à-dire, rendre la justice au peuple. C’est ce qui se pratique encore aujourd’hui.

Immédiatement après le terme de S. Hilaire & de la Trinité, le chancelier envoye douze juges dans les diverses provinces ou circuits qui leur ont été assignés, pour y rendre la justice. Ces douze juges vont aux circuits deux à deux, d’où les assises qui ne sont tenues que deux fois l’an, sont appellées assises de carême & assises de l’été. Voyez Rapin, Tindal, &c. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

CIRCULAIRE, adj. (Géom. Astron. Navig. &c.) se dit en général de tout ce qui appartient au cercle ou qui y a rapport : ainsi on appelle mouvement circulaire, le mouvement d’un corps dans la circonférence d’un cercle ; arc circulaire, un arc ou portion