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de cette maniere les vieilles plantes fourniront toûjours de nouveaux jets.

Comme les cierges du Pérou sont pleins de suc, ils peuvent se conserver hors de terre. Ceux donc qui voudront en apporter des Indes occidentales, n’ont autre chose à faire que de les couper, de les laisser sécher quelques jours, les renfermer ensuite dans une boîte avec du foin sec ou de la paille, les empêcher de se toucher de peur qu’ils ne s’entre-déchirent par leurs épines, & les préserver de l’humidité : de cette maniere, ils soûtiendront deux ou trois mois de voyage. Article communiqué par M. le Chevalier de Jaucourt.

Cierge, s. m. chandelle de cire que l’on place sur un chandelier, & que l’on brûle sur les autels aux enterremens & autres cérémonies religieuses. Voyez Chandelle.

On fait des cierges de différentes grandeurs & figures. En Italie, ils sont cylindriques ; dans la plûpart des autres pays, en France, en Angleterre, &c. ils sont coniques : l’une & l’autre espece sont creux à la partie inférieure ; c’est-là qu’est reçue la pointe du chandelier. Voyez Chandelier.

L’usage des cierges dans les cérémonies de religion est fort ancien. Nous savons que les Payens se servoient de flambeaux dans leurs sacrifices, sur-tout dans la célébration des mysteres de Cérès, & ils mettoient des cierges devant les statues de leurs dieux.

Quelques-uns croyent que c’est à l’imitation de cette cérémonie payenne, que les cierges ont été introduits dans l’église Chrétienne ; d’autres soûtiennent que les Chrétiens ont suivi en cela l’usage des Juifs. Mais pour en trouver l’origine, il est inutile d’avoir recours aux sentimens des uns & des autres.

Il n’est pas douteux que les premiers Chrétiens ne pouvant s’assembler que dans des lieux soûterreins, ne fussent obligés de se servir de cierges & de flambeaux : ils en eurent même besoin depuis qu’on leur eut permis de bâtir des églises ; car elles étoient construites de façon qu’elles ne recevoient que très-peu de jour, afin d’inspirer plus de respect par l’obscurité.

C’est-là l’origine la plus naturelle qu’on puisse donner à l’usage des cierges dans les églises. Mais il y a déjà long-tems que cet usage, introduit par la nécessité, est devenu une pure cérémonie. S. Paulin, qui vivoit au commencement du cinquieme siecle, observe que les Chrétiens de son tems aimoient si fort les cierges, qu’ils en représentoient en peinture dans leurs églises.

Ceux qui ont écrit des cérémonies de l’église, ont remarqué que l’usage d’allumer des cierges même en plein jour, a une signification mystique, qui est d’exprimer la joie, la charité, & la lumiere même de la vérité, découverte aux hommes par la prédication de l’Evangile. C’est le sentiment de S. Jerôme contre l’hérétique Vigilance : Per totas Orientis ecclesias, dit ce pere, accenduntur luminaria, sole jam rutilante, non utique ad fugandas tenebras, sed ad signum latitia demonstrandum… Ut sub typo luminis corporalis illa lux ostendatur de quâ in psalterio legimus : lucerna pedibus meis verbum tuum, & lumen semitis meis. S. Jerôme, tom. IV. part. I. pag. 284.

Il y a deux manieres de faire des cierges ; l’une à la cuillere, & l’autre à la main.

Voici la premiere. Les brins des meches que l’on fait ordinairement moitié coton & moitié filasse, ayant été bien commis & coupés de la longueur dont on veut faire les cierges, on en pend une douzaine à distances égales, autour d’un cerceau de fer, perpendiculairement au-dessus d’un grand bassin de cuivre plein de cire fondue : alors on prend une cuil-

lere de fer qu’on emplit de cette cire ; on la verse doucement sur les meches, un peu au-dessous de leur extrémité supérieure, & on les arrose ainsi l’une après l’autre : de sorte que la cire coulant du haut en-bas sur les meches, elles en deviennent entierement couvertes, & le surplus de la cire retombe dans le bassin, au-dessous duquel est un brasier pour tenir la cire en fusion, ou pour empêcher qu’elle ne se fige.

On continue ainsi d’arroser les meches dix ou douze fois de suite, jusqu’à ce que les cierges ayent pris l’épaisseur qu’on veut leur donner. Le premier arrosement ne fait que tremper la meche ; le second commence à la couvrir, & les autres lui donnent la forme & l’épaisseur. Pour cet effet, on a soin que chaque arrosement qui suit le quatrieme, se fasse de plus bas en plus bas, afin que le cierge prenne une figure conique. Les cierges étant ainsi formés, on les pose pendant qu’ils sont encore chauds, dans un lit de plume pour les tenir moux : on les en tire l’un après l’autre, pour les rouler sur une table longue & unie avec un instrument oblong de boüis, dont le bout inférieur est poli, & dont l’autre est garni d’une anse.

Après que l’on a ainsi roulé & poli les cierges, on en coupe un morceau du côté du bout épais, dans lequel on perce un trou conique avec un instrument de boüis, afin que les cierges puissent entrer dans la pointe des chandeliers.

Pendant que la broche de boüis est encore dans le trou, on a coûtume d’empreindre sur le côté extérieur le nom de l’ouvrier & le poids du cierge, par le moyen d’une regle de boüis sur laquelle on a gravé les caracteres qui expriment ces deux choses. Enfin on pend les cierges à des cerceaux, pour les secher, durcir, & exposer en vente.

Maniere de faire des cierges à la main. Les meches étant disposées comme ci-dessus, on commence par amollir la cire dans de l’eau chaude, & dans un vaisseau de cuivre étroit & profond : ensuite on prend une poignée de cette cire, & on l’applique par degrés à la meche qui est attachée à un crochet dans le mur par le bout opposé au collet, de sorte que l’on commence à former le cierge par son gros bout : on continue cette opération en le faisant toûjours moins fort à mesure que l’on avance vers le collet.

Le reste se fait de la maniere ci-dessus expliquée, si ce n’est qu’au lieu de les mettre dans un lit de plumes, on les roule sur la table aussi-tôt qu’ils sont formés.

Il y a deux choses à observer par rapport aux deux especes de cierges ; la premiere, est que pendant toute l’opération des cierges faits à la cuillere, on se sert d’eau pour mouiller la table, & d’autres instrumens, pour empêcher que la cire ne s’y attache : & la seconde, que dans l’opération des cierges faits à la main, on se sert d’huile d’olive, pour prévenir le même inconvénient.

Cierge paschal, dans l’église Romaine, est un gros cierge auquel un diacre applique cinq grains d’encens, dans autant de trous que l’on y a faits en forme de croix ; il allume ce cierge avec du feu nouveau, pendant les cérémonies du samedi-saint.

Le pontifical dit que le pape Zosime a institué cette cérémonie ; mais Baronius prétend que cet usage est plus ancien ; & pour le prouver, il cite une hymne de Prudence. Il croit que ce pape en a établi seulement l’usage dans les églises paroissiales, & qu’auparavant l’on ne s’en servoit que dans les grandes églises.

Le pere Papebroch parle plus distinctement de l’origine du cierge paschal, dans son conatus chronico-historicus. Quoique le concile de Nicée eût reglé le