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fig. 76. le bras droit, qui est le plus près de la position, agit le premier.

Explication des cinq premieres mesures du Pas de deux lutteurs, dansé par MM. Dupré & Javiliers dans l’opéra des fêtes Greques & Romaines, représentées dans la derniere Planche de Chorégraphie.

On a observé dans cet exemple la valeur des tems que les pas tiennent ; cette valeur est marquée par les têtes des mêmes pas, ainsi qu’il est expliqué ci-dessus : on y a joint la tablature de l’air sur lequel ce pas de deux a été exécuté : on a marqué les mesures par les chiffres 1, 2, 3, &c. afin de pouvoir les désigner plus facilement. Celles de la Chorégraphie sont de même marquées par des chiffres placés vis-à-vis des lignes qui séparent les mesures ; ainsi depuis 0 jusqu’au chiffre 1, c’est la premiere mesure ; depuis le chiffre 1 jusqu’au chiffre 2, c’est la seconde ; ainsi des autres.

Il faut aussi observer que, dans l’exemple proposé, les chemins des deux danseurs font symmétrie dans plusieurs parties ; ainsi ayant expliqué pour un, ce sera dans les parties comme si on l’avoit fait pour tous les deux. Dans les autres parties où les chemins des deux danseurs ne font point symmétrie, & où leurs mouvemens ne sont point semblables & coexistans, nous les expliquerons séparément, désignant l’un des danseurs par la lettre A, & l’autre par la lettre B.

Avant toute chose il faut expliquer par un exemple ce que nous entendons par des chemins symmétriques. Soient donc les deux lettres pp, elles sont semblables, mais elles ne font point symmétrie ; retournons une de ces lettres en cette sorte qp ou pq, elles feront symmétrie : ainsi la symmétrie est une ressemblance de figure & une dissemblance de position. ΒΣΥ est semblable à ΒΣΥ, mais symmétrique avec ΒΣΥ ; il suffit de les mettre vis-à-vis l’un de l’autre ΒΣΥ ΒΣΥ pour s’en appercevoir. Enfin, si on souhaite un autre exemple, la contre-épreuve d’une estampe, ou la planche qui a servi à l’imprimer, font symmétrie ensemble ; ainsi que la forme de caracteres qui a servi à imprimer cette feuille, faisoit symmétrie avec la feuille que le lecteur a présentement sous les yeux. Ceci bien entendu, il est facile de comprendre que si le danseur A, Planc. II. fig. prem. placé vis-à-vis de celui qui est en B, part du pié gauche, ce dernier doit partir du pié droit : c’est en effet ce que l’on observe dans cet exemple. Ainsi comme nous n’expliquerons pour les parties symmétriques que la tablature du danseur A, il faudra pour avoir celle du danseur B changer les mots droit en gauche & gauche en droit.

Les deux danseurs commencent par la quatrieme position ; le danseur A fait du pié gauche un pas droit en avant : ce pas doit durer une noire ou quart de mesure ; il est suivi d’un semblable pas fait par le pié droit, qui vaut aussi une noire, comme on le connoît par sa tête qui est noire ; le troisieme pas est du pié gauche, & dure seulement une croche, ainsi qu’on le connoît par sa tête crochue : il est chargé de deux signes, le plié au commencement du pas, & l’élevé à la fin ; le quatrieme qui est du pié droit, vaut aussi une croche, & le suivant une noire : ce qui fait en tout quatre noires, & épuise la premiere mesure de l’air à deux tems notés au-dessus. Tous les pas de cette mesure sont des pas droits en avant.

La seconde mesure 1, 2, est occupée dans l’air par les notes re fa ♯ sol ; la premiere est une blanche pointée, & les deux dernieres des croches ; & dans la danse elle est occupée par des positions & des pas. La premiere position où on arrive à la fin de la premiere mesure, est la troisieme ; elle est affectée des signes plié & cabriolé, & de celui de tourner un

quart de tour, ce qui met la présence du corps vis-à-vis le haut de la salle de cette position qui vaut une noire : on retombe à la quatrieme, le pié droit en l’air ; ce pié fait ensuite un pas ouvert de côté qui dure aussi une noire : le pas suivant qui est du pié gauche, dure une croche ; il est affecté du signe plié au commencement, & du signe en l’air, suivi de celui de tourner un quart de tour à gauche, qui remet la présence du corps comme elle étoit au commencement ; & ensuite du sauté, à la fin duquel on retombe à la quatrieme position, le pié droit en l’air, qui fait un pas ouvert de côté, lequel n’est point compté dans la mesure, parce que sa tête se confond avec celle de la position, & qu’il n’est qu’une suite du sauté. Le pié restant en l’air ainsi, le corps est porté sur l’autre jambe : elle ne pourra marcher que le premier ne soit posé à terre en tout ou en partie, c’est-à-dire seulement sur le talon ou la pointe du pié ; dans la figure, c’est la pointe du pié qui porte à terre. Le pié gauche fait un pas droit en avant, lequel vaut une croche ; il est suivi du signe de repos ou quart de soûpir, qui avec les pas que nous avons expliqués, acheve de remplir la mesure.

La mesure suivante 2, 3, est remplie par trois pas qui valent chacun une noire.Le premier qui est du pié droit, a le signe en l’air au commencement ; il est suivi de la premiere position affectée du signe plié & sauté sur le pié gauche, pour marquer que le saut se fait sur cette jambe, l’autre étant en l’air ; ensuite est un soûpir qui vaut une noire de repos, après lequel est un pas ouvert de côté fait par le pié gauche : ce pas est chargé de deux signes qui marquent, le premier qu’il faut plier au commencement du pas, & le second qu’il faut élever à la fin. Le pas suivant qui est du pié droit, est un pas droit du même sens, qui ramene la jambe droite près de la gauche.

Il faut remarquer qu’après le soûpir de cette mesure, les chemins des danseurs cessent de faire symmétrie ; car l’un avance vers le haut de la salle, & l’autre s’en éloigne : cette diversité de mouvement continue jusqu’au troisieme tems de la mesure suivante.

Le premier pas de la mesure 3, 4, est un pas ouvert de côté du pié droit, avec les signes plié & élevé, le premier au commencement du pas, & le second à la fin ; il est suivi d’un pas ouvert de côté fait par le pié gauche, à la fin duquel le pié reste en l’air pendant un quart de mesure. Le pas suivant qui est un pas ouvert de côté, est affecté du signe de tourner un quart de tour : on voit auprès de ce pas la main droite que le danseur A donne à la main gauche de l’autre danseur, faisant l’effort simulé que deux lutteurs font pour renverser leur adversaire.

Au commencement de la mesure suivante, les danseurs sont revenus à la premiere position, où ils restent pendant une demi-mesure ; ce que l’on connoît par la tête noire de la position, & le soûpir qui la suit. Le premier pas suivant est un pas ouvert en-dedans, qui dure une noire : on voit au commencement de ce pas le signe en l’air, suivi de celui de tourner un quart de tour ; ce qui fait connoître que ce pas doit être fait sans que le pié pose à terre : il est fait par le pié droit, qui revient se placer à la position. Le pas suivant est encore affecté du signe de tourner un quart de tour, ce qui remet les danseurs vis-à-vis l’un de l’autre : on y trouve aussi le signe des mains tranché, ce qui fait connoître qu’à la fin de ce pas les danseurs doivent se quitter.

Ce que nous avons dit jusqu’à présent, suffit pour entendre comment on déchiffre les danses écrites. Nous laissons au lecteur muni des principes établis ci-devant, les cinq dernieres mesures de l’exemple pour s’exercer, en l’avertissant cependant d’une chose essentielle à savoir, c’est que lorsque l’on