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forme d’onglet ; l’anus se trouve dans cette partie, & il est ordinairement recouvert d’un petit chaperon charnu. Le nombre des jambes écailleuses est constant, & elles tiennent aux trois premiers anneaux ; c’est pourquoi on les nomme aussi jambes antérieures ou premieres jambes. Toutes les chenilles n’ont pas un égal nombre de jambes membraneuses ; il y en a qui n’en ont que deux ; d’autres en ont quatre, six, huit, & même jusqu’à seize : lorsqu’il n’y en a que deux, elles sont attachées au dernier anneau ; c’est pourquoi on les appelle aussi jambes postérieures. D’autres chenilles ont des jambes membraneuses, placées entre les écailleuses & les postérieures ; on leur donne le nom de jambes intermédiaires : c’est sur-tout par leur nombre & par leur arrangement, que l’on a distribué les chenilles en différentes classes.

La premiere comprend celles qui ont huit jambes intermédiaires, quatre de chaque côté, c’est-à-dire seize jambes en tout. Les huit jambes intermédiaires sont attachées à quatre anneaux consécutifs, de sorte qu’il n’y a que quatre anneaux qui n’ont point de jambes ; savoir, deux entre la derniere paire de jambes écailleuses & la premiere paire d’intermédiaires, & deux entre la derniere paire de jambes intermédiaires & la paire de jambes postérieures. Les plus grandes especes de chenilles & les plus communes appartiennent à cette premiere classe.

Les chenilles que l’on a mises dans la seconde & la troisieme classe, n’ont que trois jambes intermédiaires de chaque côté, c’est-à-dire quatorze jambes en tout. La difference de ces deux classes est dans l’arrangement des jambes. Dans la seconde classe, il y a entre les jambes écailleuses & les intermédiaires, trois anneaux qui n’ont point de jambes, & deux entre les jambes intermédiaires & les postérieures ; dans la troisieme classe au contraire, il n’y a entre les jambes écailleuses & les intermédiaires, que deux anneaux qui n’ayent point de jambes, & trois entre les jambes intermédiaires & les postérieures.

La quatrieme classe renferme aussi des chenilles à quatorze jambes, qui ont six jambes écailleuses & huit intermédiaires & membraneuses, placées comme dans les chenilles de la premiere classe ; mais les jambes postérieures manquent : & dans la plûpart des especes de cette classe, le derriere est terminé par deux longues cornes qui ont de la solidité, qui sont mobiles, & qui renferment une corne charnue que la chenille peut faire sortir de son étui.

Les chenilles de la cinquieme classe n’ont que quatre jambes intermédiaires, c’est-à-dire douze jambes en tout : il y a entre les jambes écailleuses & les intermédiaires, quatre anneaux qui n’ont point de jambes, & deux entre les jambes intermédiaires & les postérieures.

Dans la sixieme classe, les chenilles n’ont que deux jambes intermédiaires : il y a entre les jambes écailleuses & les intermédiaires, cinq anneaux sans jambes, & deux entre les jambes intermédiaires & les postérieures.

On a comparé à des arpenteurs les chenilles de ces deux classes à cause de leur démarche, parce qu’elles semblent mesurer le chemin qu’elles parcourent. Lorsqu’elles marchent, elles commencent par courber en haut la partie de leur corps où il n’y a point de jambes, & par ce moyen elles avancent les jambes intermédiaires auprès des écailleuses ; ensuite elles élevent la partie antérieure du corps, & la portent en avant à une distance égale à l’espace qu’occupent les anneaux qui n’ont point de jambes, lorsqu’ils se trouvent placés en ligne droite, après que la chenille a fait la démarche que l’on pourroit appeller le premier pas, & ainsi de suite. Il y a beaucoup de ces chenilles, sur-tout de celles de la sixieme classe, qui semblent être roides comme des brins de

bois, & qui en ont aussi la couleur, de sorte qu’à les voir on les prendroit pour du bois sec ; elles se tiennent pendant des heures entieres dans des attitudes fort bisarres, en soûtenant leur corps dans une position verticale ou inclinée, quelquefois en ligne droite ; d’autres fois elles restent courbées en différens sens. Elles sont fort petites pour la plupart.

Enfin toutes les jambes intermédiaires manquent aux chenilles de la septieme classe ; elles n’en ont que huit en tout, six écailleuses & deux postérieures.

Chacune de ces classes comprend des chenilles de différens genres, & chaque genre a ses especes qui different par des caracteres que l’insecte présente à l’extérieur, ou qui ont rapport à sa façon de vivre.

On peut distinguer dans les chenilles de chaque classe trois différens degrés de grandeur ; celles qui ont douze à treize lignes de longueur, lorsqu’elles ne s’étendent que médiocrement, & un peu moins de trois lignes de diametre, sont de grandeur moyenne ; celles qui sont sensiblement plus grandes, doivent passer pour des chenilles de la premiere grandeur ; enfin celles qui sont sensiblement plus petites, doivent être regardées comme des chenilles du dernier degré de grandeur, ou de petites chenilles.

Les chenilles rases sont aisées à distinguer de celles qui sont couvertes de poils, ou de corps analogues aux poils. Il y en a dont la peau est mince & si transparente, qu’on voit à travers dans l’intérieur du corps ; d’autres ont une peau plus épaisse, & opaque ; quelques-unes de celles-ci ont la peau lisse, luisante, comme si elle étoit vernie ; d’autres l’ont matte. Il y a des chenilles qui passent pour être rases, quoiqu’elles ayent des poils en petit nombre ou peu sensibles ; elles sont imparfaitement rases : on peut les distinguer de celles qui sont parfaitement rases. Il y en a qui ont la peau parsemée d’une infinité de petits grains comme du chagrin, c’est pourquoi on peut les appeller chenilles chagrinées. Plusieurs de ces chenilles ont sur le onzieme anneau une corne qui est ordinairement dirigée vers le derriere, & un peu courbée en arc. Il y a aussi des chenilles rases qui ont cette corne sans être chagrinées. Ordinairement toutes ces chenilles à corne ont le corps ferme. Ces cornes semblent être de vraie matiere de corne, & même de matiere osseuse. On regarde comme des chenilles rases, celles qui ont des tubercules arrondis ordinairement en portion de sphere, & distribués régulierement sur chaque anneau les uns au-dessous des autres, ou disposés en différens rangs sur des lignes paralleles à la longueur du corps. Quoiqu’il y ait des poils sur ces tubercules, comme ils sont en petit nombre, gros & assez courts, les chenilles qui les portent ne doivent pas pour cela être séparées des chenilles imparfaitement rases. Ce genre comprend plusieurs des plus grosses especes de chenilles, & de celles dont viennent les plus beaux papillons ; par exemple celui que l’on appelle le grand paon.

Il y a des chenilles rases & des chenilles de quelques autres classes, qui ont sur la partie supérieure de leurs anneaux des contours moins simples que ceux des autres chenilles, & des inflexions différentes de la circulaire ou de l’ovale. Il y a d’autres chenilles dont le milieu du dessus de chaque anneau forme une espece de languette qui va recouvrir l’anneau qui le précede, & d’autres anneaux sont entaillés dans cet endroit.

Les chenilles qui ont sur la partie antérieure de la tête deux petites cornes ou antennes, sont faciles à reconnoître.

Celles qui sont hérissées de poils si gros & si durs qu’ils ressemblent en quelque façon à des épines,