long-tems pendant l’hyver, cela pourroit le faire périr. Il n’est guere possible de le multiplier autrement que de semences, qu’il faut mettre en terre aussitôt qu’elles sont arrivées ; & si l’hyver qui suivra étoit rigoureux, il sera à-propos de couvrir la terre avec des feuilles, du tan, ou du chaume de pois, pour empêcher la gelée d’y pénétrer au point de gâter les semences. On a essayé de le greffer en approche sur le chataigner ordinaire ; mais il réussit rarement par ce moyen.
Le chataigner d’Amérique à larges feuilles & à gros fruit. La découverte de cet arbre est dûe au P. Plumier, qui l’a trouvé dans les établissemens françois de l’Amérique. Cet arbre n’est point encore commun en France, & il est extrèmement rare en Angleterre : on peut s’en rapporter à Miller, qui n’a parlé de cet arbre que dans la sixieme édition de son dictionnaire, qui a paru en 1752 ; où il dit qu’il n’a encore vû que trois ou quatre jeunes plants de cet arbre qui n’avoient fait qu’un très-petit progrès ; qu’on peut faire venir de la Caroline, où il croît en abondance, des chataignes, qu’il faudra semer comme celles de chinkapin, & soigner de même, & qu’elles pourront réussir en plein air dans une situation abritée : qu’au surplus, cet arbre ne differe du chataigner ordinaire, que parce qu’il y a quatre chataignes renfermées dans chaque bourse ; au lieu que l’espece commune n’en a que trois : que la bourse ou enveloppe extérieure qui renferme les quatre chataignes, est en effet très-grosse & si épineuse, qu’elle est aussi incommode à manier que la peau d’un hérisson ; & que ces chataignes sont très-douces & fort saines, mais pas si grosses que les nôtres. (c)
CHATAIGNES, s. f. (Diete, Mat. med.) Les chataignes font la richesse de plusieurs peuples parmi nous ; elles les aident à vivre. On les fait cuire tout entieres dans de l’eau, ou bien on les rôtit dans une poesle de fer ou de terre percée, à la flamme du feu, ou on les met sous les charbons ou dans la cendre chaude ; mais avant que de les faire rôtir sous les charbons ou dans les cendres chaudes, on les coupe légerement avec un couteau. Quelques-uns préferent cette derniere maniere de les rôtir ; car dans la poesle elles ne se rôtissent qu’à demi, ou elles contractent une odeur de fumée, & une saveur empyreumatique. On sert dans les meilleures tables, au dessert, les marrons rôtis sous la cendre ; on les pele ensuite, & on les enduit de suc d’orange, ou de limon avec un peu de sucre. Les marrons de Lyon sont fort estimés en France à cause de leur grosseur & de leur bon goût : ce ne sont pas seulement ceux qui naissent aux environs de Lyon, mais encore ceux qui viennent du Dauphiné, où il en croît une grande abondance. Les marchands les portent dans cette ville, d’où on les transporte dans les autres provinces.
Les chataignes tiennent lieu de pain à plusieurs peuples, sur-tout à ceux du Périgord, du Limosin, & des montagnes des Cevennes.
De quelque maniere qu’on prépare les chataignes, elles causent des vents, & sont difficiles à digérer : elles fournissent à la vérité une abondante nourriture, mais grossiere, & elles ne conviennent qu’à des gens robustes & accoûtumés à des travaux durs & penibles. Il ne faut donc pas s’en rassasier ; car elles nuisent fort à la santé, si on n’en use avec modération, & sur-tout à ceux qui sont sujets au calcul des reins, aux coliques, & à l’engorgement des visceres. Elles sont astringentes, sur-tout lorsqu’elles sont crues, aussi-bien que la membrane roussâtre qui couvre immédiatement la substance de la chataigne ; elles arrêtent les fluxions de l’estomac & du bas-ventre, & elles sont utiles à ceux qui crachent le sang.
On fait un électuaire utile pour la toux & le cra-
de la chataigne cuite avec du miel, & pétrie avec du soufre. Les chataignes bouillies, ou leur écorce seche & en poudre, sont utiles pour la diarrhée. On recommande la membrane intérieure rougeâtre, pour les flux de ventre & les hémorrhagies ; bouillie dans de l’eau ou du vin, à la dose de deux gros, mêlée avec un poids égal de râpure d’ivoire, elle arrête les fleurs-blanches. On fait avec les chataignes & les graines de pavot blanc, une émulsion avec la décoction de réglisse, qui est utile dans les ardeurs d’urine.
On fait un cataplasme avec la substance de la chataigne, la farine d’orge, & le vinaigre, que l’on applique sur les mammelles pour en resoudre les duretés, & dissoudre le lait qui est coagulé. Geoffroi, Mat. med.
Ajoûtons, d’après l’observation, que les chataignes sont très-propres à rétablir les convalescens des maladies d’automne, & surtout les enfans qui après ces maladies restent bouffis, pâles, maigres, avec un gros ventre, peu d’appétit, &c. à peu-près comme les raisins ramenent la santé dans les mêmes cas après les maladies d’été. Car dans les pays où le peuple mange beaucoup de chataignes, sans cependant qu’elles y fassent leur principal aliment, il est ordinaire de voir les malades dont nous avons parlé, se rétablir parfaitement à la fin de l’automne ; apparemment en partie par l’influence de la saison, mais évidemment aussi par l’usage des chataignes : car plusieurs medecins les ont ordonnées dans cette vûe avec succès.
J’ai vû plusieurs fois ordonner, comme un béchique adoucissant très-salutaire, les chataignes préparées en forme de chocolat ; mais on ne voit pas quel avantage cette préparation pourroit avoir sur les chataignes bouillies, bien mâchées, & délayées dans l’estomac par une suffisante quantité de boisson, sinon qu’elle ressemble plus à un médicament, que les malades veulent être drogués, & que quelques medecins croyent avoir métamorphosé des alimens en remedes, lorsqu’ils les ont prescrits sous une forme particuliere ; ou même sans y chercher tant de finesse, lorsqu’ils les ont ordonnés comme curatifs dans une maladie. Ceci est sur-tout très-vrai des prétendus incrassans, parmi lesquels les chataignes tiennent un rang distingué. Voyez Incrassant.
Les marrons bouillis sont beaucoup plus faciles à digérer que les rôtis, & par conséquent ils sont plus sains : ce n’est qu’apprêtés de la premiere façon, qu’on peut les ordonner aux malades ou aux convalescens.
Les chataignes séchées, connues sous le nom de chataignes blanches, ou de castagnous en langage du pays dans les provinces méridionales du royaume, où elles sont fort communes, se préparent dans les Cévennes & dans quelques pays voisins. Une circonstance remarquable de cette préparation, qui d’ailleurs n’a rien de particulier ; c’est qu’on fait prendre aux chataignes avant que de les exposer au feu, un leger mouvement de fermentation ou de germination, qui leur donne une douceur très-agréable : dans cet état, elles different des chataignes fraîches exactement, comme le grain germé ou le malt differe du même grain mûr & inaltéré ; aussi y a-t-il tout lieu de conjecturer qu’elles seroient très-propres à fournir une bonne bierre. Les habitans des pays montagneux qui n’ont ni raisin ni grain, mais beaucoup de chataignes, & qui ne sont pas à portée, comme les Cévennes, le Rouergue, &c. de tirer du vin à peu de frais des provinces voisines, pourroient tirer parti de cette propriété de leurs chataignes. (b)
CHATAIGNERAYE, s, f, (Jardin.) est un lieu