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appartenoient, & de se contenter de l’usufruit & de la disposition de leurs effets mobiliers. Ils avoient la libre disposition des aumônes qui leur étoient données pour leurs messes, pour la confession, ou pour l’assistance des malades, à moins que l’aumône ne fût donnée pour la communauté. Les clercs qui n’étoient point de la communauté & qui demeuroient dans la ville hors du cloitre, devoient venir les dimanches & fêtes aux nocturnes & aux matines dans la cathédrale ; ils assistoient au chapitre & à la messe, & mangeoient au réfectoire à la septieme table qui leur étoit destinée. Les chanoines pouvoient avoir des clercs pour les servir, avec la permission de l’évêque. Ces clercs étoient soûmis à la correction, & devoient assister aux offices en habit de leur ordre, comme les clercs du dehors ; mais ils n’assistoient point au chapitre, & ne mangeoient point au réfectoire. Enfin il étoit ordonné aux clercs de se confesser deux fois l’année à l’évêque, au commencement du carême & depuis la mi-Août jusqu’au premier de Novembre ; sauf à se confesser dans les autres tems autant de fois & à qui ils voudroient. Ils devoient communier tous les dimanches & les grandes fêtes, à moins que leurs péchés ne les en empêchassent.

Telle étoit en substance la regle de S. Chrodegand, que tous les chanoines embrasserent depuis, comme les moines celle de S. Benoit.

Charlemagne, dans un capitulaire de 789, ordonne à tous les chanoines de vivre selon leur regle : c’est pourquoi quelques-uns tiennent que leur établissement précéda de peu de tems l’empire de Charlemagne. Il est certain qu’il cimenta leur établissement. Voyez le discours de Frapaolo, page 65. Pasquier prétend que l’on ne connoissoit point le nom de chanoine avant Charlemagne ; mais il est certain qu’en Orient les colléges & communautés de clercs, commencerent dès le quatrieme siecle à porter le nom de chanoines. S. Basile & S. Cyrille de Jérusalem, sont les premiers qui se sont servi du terme de chanoines & de chanoinesses. Le concile de Laodicée, que quelques-uns croyent avoir été tenu en 314, d’autres en 319, défend, art. 15. à toutes personnes de chanter dans l’église, à l’exception des chanoines chantres. Le premier concile de Nicée, tenu en 325, fait souvent mention des clercs-chanoines. Pour ce qui est de l’église d’Occident, le nom de chanoine ne commença guere à être usité que vers le vj. siecle.

Le vj. concile d’Arles, en 813, can. 6. distingue les chanoines des réguliers, qui dans cet endroit s’entendent des moines.

Le concile de Tours, tenu en la même année, distingue trois genres de communauté : les chanoines soûmis à l’évêque, d’autres soûmis à des abbés, & les monasteres de religieux. Il paroît par quelques canons de ce concile, que la profession religieuse commençant à s’abolir dans quelques monasteres, les abbés y vivoient plûtôt en chanoines qu’en religieux ; ce qui fit que peu-à-peu ces monasteres se séculariserent, & que les chapitres de chanoines furent substitués à beaucoup de monasteres.

Au concile d’Aix-la-Chapelle, tenu en 816, on rédigea une regle pour les chanoines, & une pour les religieuses. Henaut, année 816. Ce même concile défendit aux chanoines de s’approprier les meubles de l’évêque décédé, comme ils avoient fait jusqu’alors.

Dans le x. siecle, outre les chapitres des églises cathédrales, on en établit d’autres dans les villes où il n’y avoit point d’évêque, & ceux-ci furent appellés collégiales. Par succession de tems, on a multiplié les collégiales, même dans plusieurs villes épiscopales.

Les conciles de Rome, en 1019 & en 1063, ordonnerent aux clercs de reprendre la vie commune que la plûpart avoient abandonnée : elle fut en effet rétablie dans plusieurs cathédrales du royaume ; ce qui dura ainsi pendant l’espace d’un siecle environ. Mais avant l’an 1200, on avoit quitté presque partout la vie commune, & l’on autorisa le partage des prébendes entre les chanoines : & tel est l’état présent de tous les chanoines séculiers des églises cathédrales & collégiales.

Suivant la regle 17 de la chancellerie romaine, à laquelle la jurisprudence de plusieurs tribunaux se trouve conforme, il suffit d’avoir 14 ans accomplis pour être chanoine dans une église cathédrale ; au grand conseil on juge qu’il suffit d’avoir dix ans ; Pour être chanoine de Paderborn, il faut avoir 21 ans, avoir étudié dans une université fameuse de France ou d’Italie, pendant un an & six semaines, sans avoir découché. Tabl. de l’emp. Germ. p. 94.

Il y a plusieurs chapitres dans lesquels on ne peut être reçû sans faire preuve de noblesse, tel que celui des comtes de Lyon, de Strasbourg, & autres. Dans le chapitre noble de Wirtzbourg, le chanoine élû passe entre les chanoines rangés en haie, & reçoit d’eux des coups de verges sur le dos : on tient que cela a été ainsi établi pour empêcher les barons & les comtes d’avoir entrée dans ce chapitre. Tab. de l’emp. Germ. p. 91.

Pour ce qui est de l’ordre ecclésiastique que doivent avoir les chanoines, le concile de Trente, sess. 24. ch. xij. laisse ce point à la disposition des évêques ; il ordonne néanmoins que dans les églises cathédrales il y ait au moins la moitié des chanoines qui soient prêtres, & les autres diacres ou soûdiacres ; il recommande l’exécution des statuts particuliers des églises, qui veulent que le plus grand nombre, & même tous les chanoines soient prêtres.

Les conciles provinciaux qui ont suivi ont fait des réglemens à-peu-près semblables ; tels sont celui de Roüen tenu en 1581, & ceux de Reims, Bordeaux & Tours en 1583.

Ces réglemens ne sont pas observés par-tout d’une maniere uniforme ; mais on les suit dans plusieurs églises, dont le titre de la fondation, ou les statuts particuliers l’ordonnent ainsi ; & les arrêts des cours souveraines ont confirmé ces réglemens toutes les fois que l’on a voulu y déroger.

Les chanoines qui ne sont pas au moins soûdiacres, n’ont point de voix en chapitre, & ne peuvent donner leur suffrage pour l’élection d’aucun bénéficier, ni nommer aux bénéfices ; mais si la nomination est attachée à la prébende d’un chanoine en particulier, il peut nommer au bénéfice, quoiqu’il ne soit pas dans les ordres sacrés.

Les chanoines des églises cathédrales & collégiales sont obligés de résider dans le lieu de leur canonicat, & d’assister au service dans l’église à laquelle il est attaché.

Ils ne peuvent dans chaque année s’absenter pendant l’espace de plus de trois mois, soit de suite, ou en différens tems de l’année ; & si les statuts du chapitre exigent une résidence plus exacte, ils doivent être observés.

Mais si les statuts permettoient aux chanoines de s’absenter pendant plus de trois mois, ils seroient abusifs, quelques anciens qu’ils fussent, quand même ils auroient été autorises par quelque bulle du pape.

On trouve cependant qu’à Hildesheim en Allemagne, évêché fondé par Louis le débonnaire, où le chapitre est composé de vingt-quatre chanoines capitulans, & de six dignités, le prévôt, le doyen, & quatre chore-évêques, chori-episcopi ; lorsqu’un chanoine a fait son stage, qui est de trois mois, il lui