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ou de quelque autre grace semblable, il faut faire expédier les bulles par la chambre apostolique. Le vice-chancelier ayant dressé en peu de mots une minute de ce qui a été reglé, un des prélats de majori parco dresse la bulle ; on l’envoye à un autre prélat qui la revoit, & qui la met ensuite entre les mains d’un des scripteurs des bulles. Les abréviateurs du grand parquet examinent si les bulles sont expédiées selon les formes prescrites par la chancellerie, & si elles peuvent être envoyées au plomb, c’est à-dire si elles peuvent être scellées ; car l’usage de la cour de Rome est de sceller toutes les bulles en plomb.

Les prélats de minori parco ont peu de fonction ; ce sont eux qui portent les bulles aux abréviateurs de majori parco.

Le distributeur des signatures, qu’on appelle aussi le secrétaire des prélats de la chancellerie, n’est pas en titre d’office comme les autres officiers dont on vient de parler. Il est dans la dépendance du vice-chancelier : sa fonction consiste à retirer du registre toutes les signatures, pour les distribuer aux prélats de majori parco ou de minori parco, selon qu’elles leur doivent être distribuées ; & à cet effet il marque sur un livre le jour de la distribution, le diocese, & les matieres, en ces termes, resignatie Parisiensis. Il se charge des droits qui sont de minori parco, & consigne ceux qui appartiennent aux abréviateurs de majori entre les mains de chacun d’eux ou à leurs substituts, après qu’il a mis au bas de la signature le nom de celui à qui elle est distribuée. Avant de faire la distribution, il présente les signatures au régent ou à quelqu’autre des prélats de la chancellerie, qui y mettent leur nom immédiatement au-dessus de la grande date.

Il n’y a qu’un seul notaire en la chancellerie qui se qualifie député. C’est lui qui reçoit les actes de consens & les procurations des résignations, révocations, & autres actes semblables, & qui fait l’extension du consens au dos de la signature qu’il date ab anno incarnationis, laquelle année se compte du mois de Mars ; de sorte que si la date de la signature se rencontre depuis le mois de Janvier jusqu’au 25 Mars, il semble que la date du consens soit postérieure à celle de la signature.

Les regles de la chancellerie Romaine sont des reglemens que font les papes pour les provisions des bénéfices & autres expéditions de la chancellerie, & pour le jugement des procès en matiere bénéficiale. On tient que Jean XXII. est le premier qui ait fait de ces sortes de reglemens. Ses successeurs en ont ajoûté plusieurs : chaque pape après son couronnement renouvelle celle de ces regles qu’il veut maintenir, & en établit, s’il le juge à propos, de nouvelles. Ce renouvellement est nécessaire à chaque pontificat, d’autant que chaque pape déclare que les regles qu’il établit ne doivent subsister que pendant le tems de son pontificat. Cependant les regles de chancellerie qui ont été reçûes en France, & qui ont été enregistrées dans les cours de parlement, n’expirent point par la mort des papes ; elles subsistent toûjours étant devenues par leur vérification une loi perpétuelle du royaume.

Ces regles sont de plusieurs sortes : il y en a qui concernent la disposition des bénéfices ; par exemple, les papes se sont réservé par une regle expresse les églises partriarchales, épiscopales, & autres bénéfices vraiment électifs ; par une autre regle ils se sont reservés les bénéfices de leurs familiers ou domestiques, & des familiers des cardinaux, dont ils prétendent disposer au préjudice des collateurs ordinaires.

En France, toutes les réserves sont abolies par la pragmatique & le concordat ; & la regle par la-

quelle les papes se sont reservé les églises patriarchales

& épiscopales, n’est observée dans aucun état de la Chrétienté. Si le pape donne des provisions, c’est ordinairement à la nomination du souverain, ou du moins à des personnes qui leur sont agréables.

Les papes ont aussi ordonné certaines formes pour l’expédition des provisions ; par exemple, qu’il faudroit des bulles en plomb, & que la simple signature ne suffiroit pas, avec défenses aux juges d’y avoir égard. Ce qui n’est point observé en France, où l’on n’obtient des bulles que pour les bénéfices consistoriaux, comme évêchés, abbayes, prieurés conventuels, & dignités majeures : les autres bénéfices s’obtiennent par simple signature.

Il y a aussi une regle qui ordonne d’exprimer la véritable valeur des bénéfices, à peine de nullité des provisions. En France on n’exprime la véritable valeur que des bénéfices qui sont taxés dans les livres de la chambre apostolique ; à l’égard des autres, on se contente d’exprimer que leur valeur n’excede pas vingt-quatre ducats.

La réserve des mois apostoliques, qui n’a lieu que dans les pays d’obédience, cesse à la mort du pape ; & pendant la vacance du saint-siége, la disposition des bénéfices se regle dans ces pays suivant le droit commun.

Nous n’avons reçû en France que trois regles de chancellerie ; on en compte ordinairement quatre.

La premiere est celle de viginti diebus, seu de infirmis resignantibus, qui veut que si un malade résigne un bénéfice ou le permute, & vient à décéder dans les vingt jours après la résignation admise, le bénéfice vacque par mort & non par résignation.

La seconde est celle de publicandis resignationibus, qui veut que dans six mois pour les résignations faites en cour de Rome, & dans un mois pour celles qui sont faites entre les mains de l’ordinaire, les résignations soient publiées, & que le résignataire prenne possession : que si passé ce tems le résignant meurt en possession du bénéfice, il soit censé vacquer par mort & non par résignation, & que les provisions données sur la résignation soient nulles.

La troisieme regle est celle de verisimili notitia obitus ; elle veut que toutes les provisions de bénéfice obtenues par mort en cour de Rome, soient nulles, s’il n’y a pas assez de tems entre le décès du bénéficier & l’obtention des provisions, pour que la nouvelle du décès ait pû précéder les provisions. L’objet de cette regle est de prévenir les fraudes & les courses ambitieuses de ceux qui pendant les maladies des bénéficiers, faisoient leurs diligences en cour de Rome, ex voto captanda mortis.

Il y a encore quelques autres regles de chancellerie, qui n’ont pas été reçues en France, & que néanmoins l’on y suit, non pas comme regles de chancellerie Romaine, mais parce qu’elles ont paru justes, & qu’elles sont conformes à nos ordonnances ou à la jurisprudence des arrêts. Telle est la regle de annali possessore, qui veut que celui qui a la possession d’an & jour, soit maintenu au possessoire ; la regle de triennali possessore, suivant laquelle celui qui a la possession triennale soûtenue d’un titre coloré, ne peut plus être inquiété, même au pétitoire ; la regle de impetrantibus beneficia viventium, qui veut que les provisions d’un bénéfice demandées du vivant du précédent titulaire, soient nulles, quoiqu’elles n’ayent été obtenues que depuis son décès ; la regle de non tollendo jus alteri quæsitum, qui n’est point une regle particuliere à la chancellerie de Rome, mais une maxime tirée du droit naturel & commun, & reçue partout. Il y a encore la regle de idiomate, qui