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tion & la raréfaction de l’air, sur quoi toute cette machine est établie, ne dépendent pas seulement du poids de l’atmosphere, mais qu’elles sont aussi causées par l’action de la chaleur & du froid. C’est pourquoi cette machine ne peut pas être nommée un barometre, mais plûtôt un instrument qui indique les altérations de l’air. Voyez Manometre.

Cependant cet instrument est regardé comme étant fort bon pour faire connoître si le tems doit être mauvais, de même que les changemens de vents, & l’approche du froid. Transact. philos. n°. 429, p. 133.

Le barometre statique, dont se sont servi Boyle, Otto de Guericke, &c. est défectueux, tant par l’action du chaud, que parce qu’il est peu précis & peu commode : il consiste en un assez grande bouteille de verre, tenue en équilibre par un poids de cuivre, dans des bassins de balance fort légers : ces deux corps étant d’égale pesanteur, mais d’inégal volume, si le milieu ou fluide dans lequel ils pesent également est changé, le changement de leur poids s’en suivra ; de sorte que si l’air devient plus pesant, le corps le plus grand deviendra plus léger en apparence, parce qu’il perdra plus de son poids que le plus petit, qui est le plus dense : mais si le milieu est plus léger, alors le corps le plus grand l’emportera sur le plus petit.

Phénomenes du barometre. Ces phénomenes sont différens, & les auteurs ne sont pas plus d’accord sur leurs causes, que sur l’usage que l’on en peut faire pour prédire les changemens de tems. Sur le haut de la montagne de Snouden en Angleterre, qui a 1240 toises de hauteur, le docteur Halley trouva le mercure de trois pouces huit dixiemes plus bas qu’au pié ; d’où il paroît que le mercure baisse d’un de pouce par trente toises. Derham a fait pareillement des expériences de la hauteur du mercure sur le haut & au pié de cette montagne, & croit qu’il faut 32 toises d’élévation perpendiculaire, pour que le mercure baisse du d’un pouce : d’où cet auteur a cru qu’on pouvoit tirer non-seulement la hauteur de l’atmosphere, mais aussi une méthode pour mesurer la hauteur des montagnes. Suivant cet auteur, si le mercure ici bas est à 30 pouces, à 1000 piés de hauteur, il sera à 28 pouces ; à 2000 piés, à 27  ; à 3000, 26  ; à 4000, 25  ; à 5000, 24  ; à un mille, 24  ; à deux milles, 20  ; à cinq milles, 11  ; à dix milles, 4  ; à quinze milles, 1  ; à vingt milles, 0  ; à trente milles,  ; à quarante milles, . Mais on suppose dans ce calcul que l’atmosphere est par-tout d’une densité à peu près égale, & que si on la divise en portions d’égale hauteur, le poids de ces portions est presque le même, ce qui est bien éloigné d’être vrai ; car l’atmosphere devient continuellement moins dense à mesure qu’on s’éloigne de la terre, & ainsi une même quantité d’air occupe toûjours un volume de plus en plus grand. C’est pourquoi si on divise l’atmosphere en différentes couches toutes d’une hauteur égale, ces couches peseront d’autant moins qu’elles seront plus éloignées du centre de la terre. M. Mariotte, dans son essai sur la nature de l’air, a donné un calcul de la hauteur de l’atmosphere, fondé sur les observations du barometre faites au sommet des montagnes. Ce calcul est fondé sur ce principe, que l’air se condense en raison des poids dont il est chargé ; l’auteur trouve 15 lieues environ pour la hauteur de l’atmosphere, qui est aussi à peu près la quantité que M. de la Hire trouve par la théorie des crépuscules. M. Mariotte ajoûte aussi à son calcul un essai de méthode pour déterminer par les mêmes principes la hauteur des montagnes : mais on regarde aujourd’hui assez généralement toutes ces méthodes, comme plus curieuses que sûres & utiles. Voyez Atmosphere.

On a trouvé que la plus grande hauteur du barometre à Londres, étoit à trente pouces , & son plus grand abaissement à 28 pouces ; à l’observatoire de Paris, sa plus grande élévation est de 28 pouces , & sa moindre 26 sur la mesure du pié de Paris, qui est plus grand de que celui de Londres : ces observations s’accordent à celles qui ont été faites par M. Wolf à Hall en Saxe. A Alger le mercure s’éleve à 30 pouces ou par le vent de nord, quoique ce vent soit souvent accompagné de pluie & d’orage. Il est vrai qu’il y a une expérience dans laquelle la hauteur du mercure surpasse de beaucoup ces nombres ; le mercure étant parfaitement purifié & suspendu dans un tube, à la maniere de Torricelli, monte à la hauteur de 75 piés, quoiqu’à la moindre secousse il baisse à la hauteur ordinaire. Ce phénomene n’a pas causé peu d’embarras lorsqu’il a été question d’en découvrir la cause. Voici l’explication que M. Musschenbroek en donne dans ses Essais de Physique. Lorsqu’on a purgé le mercure de l’air qu’il contient, il devient un corps beaucoup plus dense que lorsque l’air se trouvoit placé entre ses parties : ce mercure peut aussi alors s’attacher fort étroitement à la surface du verre ; ce qui fait que ses particules y restent suspendues ; & comme ces particules s’attirent très-fortement, elles soûtiennent des particules voisines, & le mercure demeure suspendu par ce moyen à une très-grande hauteur : mais si on secoue le tuyau, alors les particules du mercure qui étoient contiguës au verre en sont détachées, & tout retombe. On peut voir dans l’ouvrage cité l’explication plus détaillée de ce phénomene singulier, & la réfutation de toutes les autres hypotheses qu’on a imaginées pour en rendre raison.

M. Boyle remarque que les phénomenes du barometre sont si variables, qu’il est extremement difficile de donner des regles générales de son élévation, ou de son abaissement. Il semble cependant que ce soit une regle assez générale, que quand les vents soufflent de bas en haut, le mercure est le plus bas : mais cela n’est pas toûjours vrai. L’illustre M. Halley nous a donné les observations suivantes. Dans un tems calme, quand il doit pleuvoir, le mercure est communément bas, & il s’éleve quand le tems doit être serein. Quand il doit faire de grands vents accompagnés de pluies, le mercure descend plus ou moins bas, selon le vent qui souffle. Toutes choses égales, la grande élévation du mercure arrive quand les vents soufflent de l’est, ou du nord-est. Après que le vent a soufflé violemment, le mercure qui pendant le tems que le vent souffloit étoit fort bas, s’éleve avec rapidité. Dans un tems calme, pendant lequel il gele, le mercure se tient haut. Dans les lieux les plus exposés au nord, le mercure souffre plus de variation que dans les lieux exposés au midi : à Naples il varie rarement de plus d’un pouce ; au lieu qu’à Upminster il varie de 2 pouces, & à Petersbourg de 3 , Transact. Phil. n°. 434, p. 402. Entre & proche les tropiques, le mercure ne varie que peu ou point du tout.

Le docteur Beal remarque, que toutes choses égales, le mercure est plus haut dans l’hyver que dans l’été, & ordinairement le matin qu’à midi ; qu’il l’est encore dans un tems serein un peu plus que devant ou après, ou que quand il pleut ; & qu’il descend ordinairement plus bas après la pluie qu’auparavant : s’il arrive qu’il s’éleve après qu’il a plû, c’est ordinairement une indice de beau tems. Il arrive cependant des changemens considérables dans l’air, sans que le barometre varie sensiblement.

Par rapport à l’usage des barometres, un habile Physicien remarque que par son secours, nous recouvrons la connoissance qui est dans les animaux, & que nous avons perdue, parce que nos corps ne sont