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A Sedan le cartel de froment pese trente-neuf livres, celui de méteil une livre de moins ; le cartel de seigle, trente-sept, & celui d’avoine trente-cinq livres.

A Montmidi le cartel de froment pese quarante-huit livres & demie ; de méteil, quarante-sept ; d’avoine, cinquante livres. Toutes les livres dont nous venons de parler, doivent être prises poids de marc. Dictionnaire du Commerce. (G)

CARTELADE, s. f. (Commerce.) mesure en longueur dont on se sert dans l’arpentage des terres en plusieurs endroits de la Guienne ; elle est environ de 1080 toises.

CARTELLES, s. f. (Commerce de bois.) petites planches de l’épaisseur de deux, trois, quatre, cinq pouces, dans lesquelles on débite les bois qui sont à l’usage des Tabletiers, Ebenistes, Armuriers, &c.

CARTERON, s. m. (terme de Tisseran.) c’est une lame de bois d’un pouce de largeur, plate & d’environ cinq piés de longueur, qui se place derriere les verges. Cette barre passe entre les fils de la chaîne, qui se croisent sur elle, c’est-à-dire, qui passent deux dessus & deux dessous ; son usage est de contenir les fils de la chaîne, & les empêcher de se mêler.

CARTÉSIANISME, s. m. Philosophie de Descartes, ainsi appellée du nom Latin Cartesius de son auteur. René Descartes naquit le 31 Mars 1596 à la Haye, petite ville de la Touraine, de Joachim Descartes, conseiller au parlement de Bretagne, & de Jeanne Brochard, fille du lieutenant général de Poitiers. On lui donna le surnom de du Perron, petite seigneurie située dans le Poitou, qui entra ensuite dans son partage après la mort de son pere.

La délicatesse de son tempérament, & les infirmités fréquentes qu’il eut à soûtenir pendant son enfance, firent appréhender qu’il n’eût le sort de sa mere, qui étoit morte peu de tems après être accouchée de lui : mais il les surmonta, & vit sa santé se fortifier à mesure qu’il avança en âge.

Lorsqu’il eut huit ans, son pere lui trouvant des dispositions heureuses pour l’étude, & une forte passion pour s’instruire, l’envoya au collége de la Fleche. Il s’y appliqua pendant cinq ans & demi aux humanités ; & durant ce tems, il fit de grands progrès dans la connoissance des langues Greque & Latine, & acquit un goût pour la Poësie, qu’il conserva jusqu’à la fin de sa vie.

Il passa ensuite à la Philosophie, à laquelle il donna toute son attention, mais qui étoit alors dans un état trop imparfait, pour pouvoir lui plaire. Les Mathématiques auxquelles il consacra la derniere année de son séjour à la Fleche, le dédommagerent des dégoûts que lui avoient causés la Philosophie. Elles eurent pour lui des charmes inconnus, & il profita avec empressement des moyens qu’on lui fournit, pour s’enfoncer dans cette étude aussi profondément qu’il pouvoit le souhaiter. Le recteur du collége lui avoit permis de demeurer long-tems au lit, tant à cause de la délicatesse de sa santé, que parce qu’il remarquoit en lui un esprit porté naturellement à la méditation. Descartes, qui à son réveil, trouvoit toutes les forces de son esprit recueillies, & tous ses sens rassis par le repos de la nuit, profitoit de ces conjonctures favorables pour méditer. Cette pratique lui tourna tellement en habitude, qu’il s’en fit une maniere d’étudier pour toute sa vie ; & l’on peut dire que c’est aux matinées qu’il passoit dans son lit, que nous sommes redevables de ce que son génie a produit de plus important dans la Philosophie & dans les Mathématiques.

Son pere, qui avoit fait prendre à son aîné le parti de la robe, sembloit destiner le jeune du Perron à celui de la guerre : mais sa grande jeunesse & la foiblesse de son tempérament ne lui permettant pas de l’exposer si-tôt aux travaux de ce métier pénible,

il l’envoya à Paris, après qu’il eut fini le cours de ses études.

Le jeune Descartes s’y livra d’abord aux plaisirs, & conçut une passion d’autant plus forte pour le jeu, qu’il y étoit heureux. Mais il s’en desabusa bientôt, tant par les bons avis du P. Mersenne, qu’il avoit connu à la Fleche, que par ses propres réflexions. Il songea alors à se remettre à l’étude, qu’il avoit abandonnée depuis sa sortie du collége ; & se retirant pour cet effet de tout commerce oisif, il se logea dans une maison écartée du faubourg S. German, sans avertir ses amis du lieu de sa retraite. Il y demeura une partie de l’année 1614, & les deux suivantes presque entieres, sans en sortir, & sans voir personne.

Ayant ainsi repris le goût de l’étude, il se livra entierement à celle des Mathématiques, auxquelles il voulut donner ce grand loisir qu’il s’étoit procuré ; & il cultiva particulierement la Géométrie & l’Analyse des anciens, qu’il avoit déjà approfondie dès le collége.

Lorsqu’il se vit âgé de 21 ans, il crut qu’il étoit tems de songer à se mettre dans le service ; il se rendit pour cela en Hollande, afin d’y porter les armes sous le prince Maurice. Quoiqu’il choisît cette école, qui étoit la plus brillante qu’il y eût alors par le grand nombre de héros qui se formerent sous ce grand capitaine, il n’avoit pas dessein de devenir grand guerrier ; il ne vouloit être que spectateur des rôlles qui se jouent sur ce grand théatre, & étudier seulement les mœurs des hommes qui y paroissent. Ce fut pour cette raison, qu’il ne voulut point d’emploi, & qu’il s’entretint toûjours à ses dépens, quoique pour garder la forme, il eût reçû une fois la paye.

Comme on joüissoit alors de la treve, Descartes passa tout ce tems en garnison à Breda : mais il n’y demeura pas oisif. Un problème qu’il y résolut avec beaucoup de facilité, le fit connoître à Isaac Beeckman, principal du collégé de Dordrecht, lequel se trouvoit à Breda, & par son moyen à plusieurs savans du pays.

Il y travailla aussi à plusieurs ouvrages, dont le seul qui ait été imprimé, est son Traité de la Musique. Il le composa en Latin, suivant l’habitude qu’il avoit de concevoir & d’écrire en cette langue. Après avoir fait quelques autres campagnes sous différens généraux, il se dégoûta du métier de la guerre, & y renonça avant la fin de la campagne de 1621.

Il avoit remis à la fin de ses voyages à se déterminer sur le choix d’un état : mais, toutes réflexions faites, il jugea qu’il étoit plus à propos pour lui de ne s’assujettir à aucun emploi, & de demeurer maître de lui-même.

Après beaucoup d’autres voyages qu’il fit dans différens pays, la reine Christine de Suede, à qui il avoit envoyé son Traité des passions, lui fit faire au commencement de l’année 1649, de grandes instances pour l’engager à se rendre à sa cour. Quelque répugnance qu’il se sentît pour ce nouveau voyage, il ne pût s’empêcher de se rendre aux desirs de cette princesse, & il partit sur un vaisseau qu’elle lui avoit envoyé. Il arriva à Stockolm au commencement du mois d’Octobre, & alla loger à l’hôtel de M. Chanut, ambassadeur de France, son ami, qui étoit alors absent.

La reine, qu’il alla voir le lendemain, le reçut avec une distinction qui fut remarquée par toute la cour, & qui contribua peut-être à augmenter la jalousie de quelques savans auxquels son arrivée avoit paru redoutable. Elle prit dans une seconde visite des mesures avec lui, pour apprendre sa Philosophie de sa propre bouche ; & jugeant qu’elle auroit besoin de tout son esprit & de toute son application pour y réussir, elle choisit la premiere heure d’après