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tres. Ces sortes de limes sont ordinairement de fer trempé en paquet.

Il y a le demi-carreau ou carrelet, qui n’a que la moitié de la force du carreau, & qui sert pour les ouvrages dont le dégrossissage est moins considérable.

Carreau, terme de Tailleur & de Blanchisseuse, c’est un instrument de fer dont les Tailleurs & autres ouvriers en couture se servent pour applatir leurs rentraitures, & d’autres parties des étoffes qu’ils ont cousues ensemble, en l’appuyant & le passant par-dessus après l’avoir fait chauffer.

Cet instrument est de fer, d’environ dix pouces de longueur, & deux de largeur par un bout, & se termine en pointe par l’autre. Il a aussi un manche de fer à un de ses bouts en forme de queue, qui se reploye sur la masse du carreau, & lui est parallele.

Le carreau des Tailleurs differe de celui des Blanchisseuses, en ce que le premier est étroit, long, pointu, & brut ; l’autre au contraire est arrondi par sa partie antérieure, & sa platine est fort unie.

Il y a des carreaux de Tailleur & de Blanchisseuse de deux especes ; les uns solides, les autres composés de différentes pieces qu’on assemble, & qui forment une espece de boîte, dans laquelle on peut enfermer ou du feu, ou quelque corps chaud. Voyez les Planches de Taillanderie & leur explication.

Carreau ; les Vitriers appellent ainsi une piece de verre quarrée ou d’une autre figure, mise en plomb, ou retenue avec des pointes, ou du papier, ou du mastic, dans les chassis d’une fenêtre.

Franc-Carreau, sorte de jeu dont M. de Buffon a donné le calcul en 1733, avant que d’être de l’Académie des Sciences. Voici l’extrait qu’on trouve de son mémoire sur ce sujet, dans le volume de l’Académie pour cette année-là.

Dans une chambre carrelée de carreaux égaux, & supposés réguliers, on jette en l’air un louis ou un écu, & on demande combien il y a à parier que la piece ne tombera que sur un seul carreau, ou franchement.

Supposons que le carreau donné soit quarré ; dans ce quarré inscrivons-en un autre qui en soit distant partout de la longueur du demi-diametre de la piece ; il est évident que toutes les fois que le centre de la piece tombera sur le petit quarré ou sur sa circonférence, la piece tombera franchement ; & qu’au contraire elle ne tombera pas franchement, si le centre de la piece tombe hors du quarré inscrit : donc la probabilité que la piece tombera franchement, est à la probabilité contraire, comme l’aire du petit quarré est à la différence de l’aire des deux quarrés.

Donc pour joüer à jeu égal, il faut que le grand quarré soit double du petit ; c’est-à-dire, que le diametre de la piece étant 1, & x le côté du grand quarré, on aura , d’où l’on tire facilement la valeur de x, qui sera incommensurable avec le diametre de la piece.

Si la piece, au lieu d’être ronde, étoit quarrée, &, par exemple, égale au quarré inscrit dans la piece circulaire dont nous venons de parler ; il saute aux yeux que la probabilité de tomber franchement deviendroit plus grande : car il pourroit arriver que la piece tombât franchement hors du petit quarré : le problème devient alors un peu plus difficile, à cause des différentes positions que la piece peut prendre ; ce qui n’a point lieu quand la piece est circulaire, car toutes les positions sont alors indifférentes. Voici dans un problème simple une idée qu’on peut se former de ces différentes positions.

Sur un seul plancher formé de planches égales &

paralleles, on jette une baguette d’une certaine longueur, & supposée sans largeur : on demande la probabilité qu’elle tombera franchement sur une seule planche. Que l’on conçoive le point du milieu de la baguette à une distance quelconque du bord de la planche, & que de ce point comme centre on décrive un demi-cercle dont le diametre soit perpendiculaire aux côtés de la planche ; la probabilité que la baguette tombera franchement, sera à la probabilité contraire, comme le secteur circulaire renfermé au-dedans de la planche est au reste de l’aire du demi-cercle ; d’où il est aisé de tirer la solution cherchée. Car nommant x la distance du centre de la baguette à l’un des côtés de la planche, X le secteur correspondant, dont il est toûjours facile de trouver la valeur en x, & A l’aire du demi-cercle ; la probabilité cherchée sera à la probabilité contraire, comme sXdx est à sdx (A - X). Voy. Jeu, Pari. (O)

CARREFOUR, s. m. (Jardinage.) est la rencontre de quatre allées dans une forêt, dans un bois ; ce qui imite l’issue de quatre rues dans une ville, que l’on nomme aussi carrefour.

On les peut faire circulaires ou quarrés : dans cette derniere forme on en retranche les encoignures, ce qui leur donne plus de grace, & les aggrandit considérablement. (K)

CARRELAGE, s. m. en Architecture, se dit de tout ouvrage fait de carreau de terre cuite, ou de pierre, ou de marbre. (P)

CARRELER, v. act. c’est paver une chambre, une salle, &c. avec des carreaux. Ce travail s’exécute au mortier & à la brique. On commence par répandre sur la surface à carreler une couche plus ou moins épaisse d’excellent mortier ; on applique le carreau sur cette couche ; on enduit les côtés du carreau de mortier, afin qu’il se lie bien avec le carreau contigu ; on en pose ainsi une rangée entiere ; on s’assûre que cette rangée est bien droite & bien de niveau, par une longue regle, & par l’instrument appellé niveau. L’étendue d’une chambre & la figure du carreau étant données, il n’est pas difficile de trouver le nombre de carreaux qui y entreront ; il ne s’agit que de chercher la surface de la chambre & celle du carreau, & diviser la premiere par la seconde. S’il s’agit de former un pavé dont l’aspect soit agréable à la vûe, avec des carreaux mi-partis de deux couleurs, Voyez l’article Carreau en Architecture.

* CARRELÉ, adj. pris subst. dans les Manufactures en soie, espece d’étoffe qui n’est pas moins à la mode aujourd’hui que le cannelé, surtout quand elle a du fond, & qu’elle est un peu riche.

Le carrelé & le cannelé sont l’un & l’autre composés de quarante portées de chaînes, un peu plus ou un peu moins, & d’un pareil nombre de portées de poil ; c’est pourquoi nous joignons ici ces étoffes. La chaîne est montée, comme le gros-de-Tours, sur quatre lisses pour lever, quatre de rabat, & de même pour le poil. Pour faire le cannelé ordinaire par le poil, on passe trois coups à l’ordinaire, on broche pareillement sans toucher au poil : le quatrieme coup on fait lever tout le poil, & baisser la moitié de la chaîne, en passant un coup de navette beaucoup plus fin que les trois premiers ; le poil se trouve arrêté par ce moyen. Ce même poil qui a demeuré trois coups sans travailler, forme une longueur d’une ligne au moins dans le travers de l’étoffe, avant que d’être arrêté ; & quand il l’est au quatrieme coup, sa reprise forme le coup de cannelé ; après quoi on recommence le course, & on continue.