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& pour les maisons qui ont été brûlées & démolies pendant le siége.

6°. Que le gouverneur, tous les officiers de l’état major, les officiers des troupes, & les troupes elles-mêmes, & tout ce qui est au service du roi, sortiront de la place, sans être sujets à aucun acte de représailles, de quelque nature que ce puisse être, & sous quelque prétexte que ce soit.

7°. Si ceux auxquels on rend la ville ne sont point de la religion catholique, apostolique & Romaine, on ne manque pas d’insérer dans la capitulation, qu’elle sera conservée dans la ville.

8°. Que les bourgeois & habitans seront maintenus dans tous leurs droits, priviléges & prérogatives.

9°. Qu’il sera libre à ceux qui voudront sortir de la ville, d’en sortir avec tous leurs effets, & d’aller s’établir dans les lieux qu’ils jugeront à propos. On y marque aussi quelquefois (& on le doit, lorsqu’on craint que l’ennemi ne traite avec trop de rigueur les bourgeois, sur les marques d’attachement qu’ils auront donné pendant le siége pour le prince dont ils quittent la domination) qu’ils ne seront ni inquiétés ni recherchés pour aucune des choses qu’ils auront pû faire avant ou pendant le siége.

10°. On met aussi dans la capitulation, qu’on livrera les poudres & les munitions qui se trouveront dans la place, & qu’on indiquera les endroits où il y aura des mines préparées.

11°. Que les prisonniers faits de part & d’autre pendant le siége, seront rendus.

Il faut observer que pour qu’une place soit reçûe à composition, il faut qu’elle ait encore des vivres & des munitions de guerre au moins pour trois jours, sans quoi elle se trouveroit obligée de se rendre prisonniere de guerre : mais si l’assiégeant n’en est point informe, & que la capitulation ait été signée, il ne seroit pas juste de retenir la garnison prisonniere de guerre, lorsque l’on reconnoîtroit sa disette de munitions.

Quand l’ennemi ne veut point accorder de capitulation, à moins que la garnison ne se rende prisonniere de guerre, & qu’on se trouve dans la fâcheuse nécessité de subir cette loi, on tâche de l’adoucir autant qu’il est possible : on convient assez communément :

1°. Que le gouverneur & les principaux officiers garderont leurs épées, pistolets, bagages. &c.

2°. Que les officiers subalternes, au-dessous des capitaines, auront leurs épées seulement, avec leurs ustenciles ou bagages.

3°. Que les soldats ne seront ni dépoüillés, ni dispersés de leur regiment.

4°. Que la garnison sera conduite en tel endroit, pour y demeurer prisonniere de guerre.

5°. Que les principaux officiers auront la permission d’aller vaquer à leurs affaires pendant deux ou trois jours.

6°. Que lorsque la garnison évacuera la place, il ne sera pas permis de débaucher les soldats, pour les faire déserter de leurs regimens.

Lorsque toute la capitulation est arrêtée, il entre dans la place un officier d’artillerie des assiégeans, pour faire conjointement avec un officier d’artillerie de la garnison, un inventaire de toutes les munitions de guerre qui se trouvent dans la place ; il y entre aussi un commissaire des guerres pour faire un état des munitions de bouche qui s’y trouvent encore.

Lorsqu’on prévoit être dans la nécessité de se rendre, & que l’on a des magasins considérables de munitions de guerre & de bouche, on en gâte autant que l’on peut avant de parler de se rendre, afin qu’il n’en reste dans la place que ce qu’il doit y en avoir pour pouvoir capituler, & que l’ennemi n’en profite pas : si l’on attendoit pour les brûler ou gâter, que

l’on entrât en capitulation, l’ennemi pourroit insister à ce qu’ils fussent conservés, mais il ne peut plus y penser lorsqu’on a pris ses précautions auparavant.

Aussi-tôt que les assiégés ont livré une porte de leur ville aux assiégeans, le premier régiment de l’armée s’en empare, & y fait la garde.

Le jour venu que la garnison doit sortir de la place, on fait mettre l’armée assiégeante sous les armes : elle se range ordinairement en deux haies de bataillons & d’escadrons, & la garnison passe au milieu. L’heure venue de sa sortie, le général & les principaux officiers se mettent à la tête des troupes, pour la voir défiler devant eux.

Le gouverneur sort à la tête de la garnison, accompagné de l’état-major de la place, & des principaux officiers ; il la fait défiler dans le meilleur ordre qu’il lui est possible. On met ordinairement les anciens régimens à la tête & à la queue, & les autres au milieu avec les bagages. Lorsqu’on a de la cavalerie, on la partage de même en trois corps, pour la tête, le centre & la queue. On détache des cavaliers & de petits corps d’infanterie pour marcher le long des bagages, & veiller à leur sûrété, afin qu’il n’en soit pillé aucune partie.

L’artillerie accordée par la capitulation, marche après le premier bataillon ; lorsque la garnison est arrivée à la place où elle doit être conduite, elle remet à l’escorte les ôtages des assiégeans ; & lorsque cette escorte a rejoint l’armée, on renvoye les ôtages que les assiégés avoient laissés pour la sûreté de l’escorte, des chariots, & autres choses accordées par l’armée assiégeante pour la conduite de la garnison.

Lorsque la garnison est prisonniere de guerre, on la conduit aussi avec escorte, jusqu’à la ville où on doit la mener par la capitulation.

Tout ce qui est porté dans les capitulations doit être sacré & inviolable, & l’on doit en entendre tous les termes dans le sens le plus propre & le plus naturel ; cependant on ne le fait pas toûjours. Il faut que le gouverneur apporte la plus grande attention, pour qu’il ne s’y glisse aucun terme équivoque & susceptible de différentes interprétations ; il y a nombre d’exemples qui prouvent la nécessité de cette attention.

Lorsque la garnison d’une ville où il y a une citadelle, capitule pour se retirer dans la citadelle, il y a quelques conditions particulieres à demander, telles que sont celles-ci :

Que la citadelle ne sera point attaquée du côté de la ville ; que les malades & blessés qui ne pourront être transportés, resteront dans la ville & dans les logemens qu’ils occupent ; & qu’après leur guérison, il leur sera fourni des voitures & des passe-ports, pour se retirer en toute sûreté dans une ville qui sera marquée dans la capitulation. On doit ne laisser entrer dans la citadelle que ceux qui peuvent y être utiles pour sa défense ; les autres personnes qu’on nomme communément bouches inutiles, ne doivent point absolument y être souffertes. Il faut faire insérer dans la capitulation, qu’ils seront conduits dans une ville voisine de la domination du prince, que l’on indiquera. On doit aussi convenir d’un certain tems pour faire entrer toute la garnison dans la citadelle, & marquer expressément que pendant ce tems il ne sera fait de la part de l’assiégeant aucuns des travaux nécessaires pour l’attaque de la citadelle.

Une ville maritime demande encore quelques attentions particulieres pour les vaisseaux qu’il peut y avoir dans son port : on doit convenir qu’ils sortiront du port le jour que la garnison sortira de la ville, ou lorsque le tems le permettra, pour se rendre en sûreté dans le port dont on sera convenu. Ils doivent conserver leur artillerie, agrès, provisions de guerre & de bouche, &c. Si le mauvais tems les obligeoit