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tures en papier, à la reserve des archevêchés, des abbayes, & de quelque prieurés conventuels. Les bénéfices dont le revenu excede vingt-quatre ducats, ne sont possédés que sur des provisions qui s’expédient par bulles, & non pas par simples signatures, suivant une regle de la chancellerie. La France n’a point voulu se soûmettre à cette regle ; & à l’exception des bénéfices qui sont taxés dans les livres de la chambre apostolique, elle s’est conservée dans le droit de n’exprimer le revenu du bénéfice qu’on impetre qu’en général & de cette maniere : Cujus & illi forsan annexorum fructus 24. ducatorum auri, de camera secundum communem estimationem, valorem annuum non excedunt.

Les bulles qui viennent de Rome en France, sont limitées & modérées selon les usages du royaume, avant que d’être enregistrées. On n’y en reçoit aucunes, qu’après avoir bien examiné si elles ne contiennent rien de contraire aux libertés de l’église Gallicane. Il suffit en France que ces mots proprio motu, de notre propre mouvement, se trouvent dans une bulle, pour la rejetter toute entiere.

Les Espagnols ne reçoivent pas non plus aveuglément les bulles des papes : elles sont examinées dans le conseil du roi ; & si l’on trouve qu’il y ait des raisons pour ne pas les mettre en exécution, l’on en donne avis au pape par une supplique ; & par ce moyen ces bulles demeurent sans effet. Cette maniere d’agir avec la cour de Rome est établie dans la plûpart des états & des royaumes.

Fulminer des bulles, c’est en faire la publication ou vérification par l’un des trois commissaires auxquels elles sont adressées, soit qu’il soit évêque ou official. On s’oppose quelquefois à la publication des bulles ou des rescrits du pape. Mais quand il s’y trouve de l’abus, l’on a pour lui le respect de n’appeller pas directement de la concession de la bulle, on interjette simplement appel comme d’abus de l’exécution ou fulmination de la bulle. C’est un expédient pour ne point choquer le pape, en ne se plaignant que de la procédure & de la partie qui a obtenu la bulle.

Cependant il y a des cas importans, dans lesquels on appelleroit sans détour comme d’abus de la bulle du pape : par exemple, s’il prononçoit l’excommunication contre la personne du roi ; s’il entreprenoit sur le temporel du royaume ; s’il disposoit des bénéfices dont la nomination appartient au roi par le concordat. Voyez Fulmination.

Quand le pape est mort, on n’expédie plus de bulles durant la vacance du siége, & jusqu’à l’élection du successeur : ainsi pour prévenir les abus qui pourroient se glisser, aussi-tôt que le pape est mort, le vice-chancelier de l’église Romaine va prendre le sceau des bulles, puis il fait effacer en présence de plusieurs personnes, le nom du pape qui vient de mourir ; il couvre d’un linge le côté où sont les têtes de S. Pierre & de S. Paul ; il y met son sceau, & donne ce sceau des bulles ainsi enveloppé, au camérier pour le garder, afin qu’on n’en puisse sceller aucune lettre.

Bulle in cœnâ Domini : on appelle ainsi une bulle fameuse, qui se lit publiquement tous les ans à Rome le jour de la cene, c’est-à-dire le jeudi-saint, par un cardinal diacre, en présence du pape, accompagné des autres cardinaux & des évêques. Elle contient une excommunication contre tous les hérétiques, les contumaces & les desobéissans au saint siége. Après la lecture de cette bulle, le pape jette un flambeau allumé dans la place publique, pour marque d’anathème. Dans la bulle du pape Paul III. de l’an 1536, il est énoncé dès le commencement, que c’est une ancienne coûtume des souverains pontifes, de publier cette excommunication le jour du jeudi-saint, pour conserver la pureté de la religion Chrétienne, pour

entretenir l’union des fideles : mais on n’y marque

pas l’origine de cette cérémonie. Les principaux chefs de la bulle in cœna Domini regardent les hérétiques & leurs fauteurs, les pirates & les corsaires ; ceux qui imposent de nouveaux péages ; ceux qui falsifient les bulles & les autres lettres apostoliques ; ceux qui maltraitent les prélats de l’Église ; ceux qui troublent ou veulent restraindre la jurisdiction ecclésiastique, même sous prétexte d’empêcher quelques violences, quoiqu’ils soient conseillers ou procureurs généraux des princes séculiers, soit empereurs, rois ou ducs ; ceux qui usurpent les biens de l’Église, &c. ce qui a donné lieu d’accuser cette bulle d’établir indirectement le pouvoir des papes sur le temporel des rois. Tous ces cas y sont déclarés réservés, ensorte que nul prêtre n’en puisse absoudre, si ce n’est à l’article de la mort.

Le concile de Tours, en 1510, déclara la bulle in cœna Domini insoûtenable à l’égard de la France, qui a souvent protesté contre cette bulle en ce qui regarde les droits du roi & les libertés de l’église Gallicane. En 1580, quelques évêques pendant le tems des vacations, tâcherent de faire recevoir dans leurs dioceses la bulle in cœna Domini. Le procureur général s’en étant plaint, le parlement ordonna que tous les archevêques & évêques qui auroient reçû cette bulle & ne l’auroient pas publiée, eussent à l’envoyer à la cour : que ceux qui l’auroient fait publier fussent ajournés, & cependant leur temporel saisi ; & que quiconque s’opposeroit à cet arrêt, fût réputé rebelle & criminel de lese-majesté. Mézer. hist. de France, sous le regne d’Henri III. (G)

Bulle d’or, (Hist. & Jurisp.) on donne en Allemagne ce nom par excellence à une pragmatique-sanction ou constitution de l’empereur Charles IV. approuvée par la diete ou l’assemblée générale des princes & états de l’Empire, qui contient les fonctions, priviléges, & prérogatives des électeurs, tant ecclésiastiques que séculiers, & toutes les formalités qui doivent s’observer à l’élection d’un empereur. Elle fut faite en 1356 en partie à Metz, & en partie à Nuremberg. La bulle d’or a toûjours été regardée depuis ce tems comme loi fondamentale de l’Empire : elle est au nombre de celles que les empereurs sont tenus d’observer par la capitulation qu’on leur fait jurer à leur couronnement. Cette constitution fut faite pour terminer les disputes, quelquefois sanglantes, qui accompagnoient autrefois les élections des empereurs, & prévenir pour la suite celles qui pourroient arriver à ce sujet, & empêcher les longs interregnes dont l’empire avoit beaucoup souffert auparavant. L’original le plus authentique de la bulle d’or, se conserve à Francfort sur le Mein ; & c’est le magistrat de cette ville qui en est le dépositaire. On a un respect si scrupuleux pour cet exemplaire, qu’en 1642 l’électeur de Mayence eut de la peine à obtenir qu’on renouvellât les cordons de soie presque usés, auxquels le sceau de la bulle d’or est attaché ; & il n’en vint à-bout, qu’à condition que la chose se passeroit en présence d’un grand nombre de témoins.

Bulle d’or de Bohème, (Hist.) c’est un privilége accordé en 1348 au roi & au royaume de Bohème, par l’empereur Charles IV. Ce prince y confirme toutes les prérogatives accordées par Frédéric II. en 1212. à Ottocare, roi de Bohème.

Bulle d’or du Brabant, (Hist. mod. & Jurisp.) on nomme ainsi une constitution de l’empereur Charles IV. donnée à Aix-la-Chapelle en 1349, par laquelle ce prince accorde aux Brabançons le privilége de ne pouvoir être traduits à aucuns tribunaux étrangers ou hors de leur pays, ainsi que de ne pouvoir point être arrêtés ailleurs que chez eux, ni pour crimes, ni pour dettes. La trop grande extension de ce privilé-