Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 2.djvu/154

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’empêcher d’être vû de la place, on travaillera aux plattes-formes, & l’on commencera à mettre le terrein de niveau, ensorte qu’il n’y reste aucunes pierres, s’il se peut ; après quoi l’on doit poser le heurtoir qui sera de neuf pieds de longeur, sur neuf à dix pouces en quarré, & ensuite le premier madrier qui sera de neuf piés & de longueur, sur un pié de large & deux pouces d’épaisseur.

Le second sera de dix piés de longueur.

Le troisieme de dix piés & .

Et tous les autres en suivant jusqu’au nombre de dix-huit, & toûjours un demi-pié de plus les uns que les autres, pour rendre la platte-forme depuis les heurtoirs jusqu’au dernier madrier de recul, de dix-huit piés de long, & dix-huit piés de large au recul.

La platte-forme sera relevée depuis le heurtoir jusqu’au dernier madrier de recul de neuf à dix pouces, & bien arrêtée au recul par deux gros piquets de bois de charpente ; après quoi il pourra demander à faire marcher le canon du grand parc, qui doit être armé pour chaque piece de deux lanternes & deux refouloirs, autant d’écouvillons & de coins de mire, & de huit leviers.

Les canoniers ordonnés pour mettre le feu au canon, doivent avoir chacun deux dégorgeoirs, deux fournimens, deux boute-feux ; & pour toute la batterie, quelques tireboures du calibre des pieces.

Il faudra choisir un endroit pour un grand magasin à poudre pour toute la batterie, derriere un fossé relevé, ou redan de terre, & s’il n’y en a point, faire un épaulement à cinquante pas de la batterie. Quelques-uns même sont d’avis de porter ce magasin à cent pas, pour mettre à couvert une cinquantaine de barrils de poudre, & la sentinelle pour les garder.

Il faudra aussi avoir un petit magasin à poudre de deux pieces en deux pieces, qui puisse contenir deux tonneaux de poudre, éloigné du recul des pieces d’environ dix à douze pas, & couvert de fascines, avec un petit boyau de chaque côté pour y entrer, en cas que l’on soit vû de la place.

Il est nécessaire que le canon arrive à nuit fermante à la batterie avec toutes les munitions, & qu’il y ait au moins de quoi tirer cent coups de chaque piece. Ces munitions seront mises dans le grand magasin près la batterie, & dans les petits que l’on aura faits à dix pas des platte-formes ; & l’on ne perdra aucun temps pour faire placer les pieces, afin qu’elles puissent être logées & en état de tirer la nuit même, si le général l’ordonne, ou à l’ordinaire à la pointe du jour.

Le commissaire doit avoir soin, sur toutes choses, de visiter de temps en temps les grands & petits magasins ; afin qu’en prenant des mesures justes, il ne lui manque rien, ni poudre, ni boulets, ni fourrage. Il faut même qu’il ait toûjours des fascines & des piquets pour raccommoder le soir les épaulemens & les embrasures ; & sur tout, que les platte-formes soient bien nettes, & qu’il ne s’y répande point de poudre, non plus que dans les magasins, afin de ne point courir le risque du feu qui arrive souvent sans toutes ces précautions.

Lorsque le canon est prêt à tirer, on fait détruire le côté extérieur des embrasures qu’on a laissé exprès d’une très-petite épaisseur, & seulement pour cacher ou masquer la batterie ou les embrasures : ou bien l’on tire le canon qui détruit bientôt cette espece de petit tideau. C’est ce qu’on appelle démasquer une batterie.

Pour tout ce qui concerne le service d’une batterie de canon, voyez Charge & Canon.

La table suivante qui est aussi tirée des mémoires d’artillerie de M. de Saint-Remy, peut être fort utile

pour donner une connoissance éxacte de toutes les

choses nécessaires à la construction & au service des batterries de canon.

Batteries du chemin couvert, sont celles qu’on établit sur la partie supérieure du glacis pour battre en breche, lorsqu’on est maître du chemin couvert.

Ce qu’il y a d’essentiel à observer dans ces batteries, c’est d’en ouvrir les embrasures, ensorte qu’elles découvrent bien toutes les parties de la place qu’elles doivent battre, & qu’elles ayent une assez grande pente du derriere au devant pour plonger jusqu’au-bas des revêtemens que l’on veut ruiner. Comme leur construction est fort dangereuse, parce qu’elle se fait sous le feu du rempart de la place, on les masque quelquefois, c’est-à-dire, qu’on met devant les endroits où elles s’établissent, des sacs à laine, ou quelqu’autre chose qui cache les travailleurs à l’ennemi. Voyez Batterie à ricochet, voyez aussi Pl. XII. de l’Art milit. le plan des batteries du chemin couvert.

Batterie de Mortier ; c’est un lieu préparé pour tirer les mortiers sur une place assiégée. Ces batteries ne different de celles du canon, qu’en ce qu’on ne fait point d’embrasures à leur épaulement.

Les plattes-formes de ces batteries ont un pié de longueur & six de largeur : le devant se pose à deux piés de l’épaulement de la batterie.

Le magasin à poudre pour le service de la batterie, doit être derriere à quinze ou vingt pas, comme aux batteries de canon, avec un boyau de communication pour y aller en sûreté. On met des planches ou des fascines avec de la terre dessus pour le garantir du feu.

Les bombes chargées se mettent à côté du même magasin à cinq ou six pas de distance.

Pour ce qui concerne la maniere de charger le mortier & de le pointer, voyez Mortier & Bombe.

Instruction de M. Camus des Touches, pour le service d’un mortier de douze pouces, à un siége. Lorsque la batterie est construite, & que les mortiers y sont logés, on assemble tout ce qui est nécessaire pour l’exécution. Savoir : une provision de bombes chargées ; une botte de fourrage ; de la terre douce ; deux couteaux de bois ou spatules ; une bêche ; un pic-hoyau ; un balai ; quatre leviers ; une demoiselle ; un crochet ; une curette ou racloir ; un quart de cercle ; deux boute-feux ; deux coins de mire : chaque mortier doit être aussi fourni, & avoir à portée de quoi remplacer dans le besoin. Le Magasin à poudre sera dans le milieu de la batterie, vingt ou vingt-cinq pas derriere ; & s’il faut un boyau pour y communiquer sans être vû, on le tirera du milieu de la batterie, ou de quatre mortiers en quatre mortiers, si la batterie est considérable ; observant de laisser un terre-plein entre le mortier & le commencement du boyau, afin qu’on puisse se remuer dans la batterie.

Les bombes chargées seront à côté du magasin à quelques pas de distance, la fusée renversée en terre. Les armes du mortier seront couchées à droite & à gauche.

Pour servir un mortier de douze pouces, il faut un cadet bombardier, & quatrè servans. Le cadet & ces quatre servans doivent être placés comme il suit, avec ce qui sert au service du mortier.

A la gauche du mortier. A la droite du mortier.
 
Deux servans. Le cadet.
Une botte de fourrage. Deux servans.
De la terre douce. Une demoiselle.
Un couteau ou spatule. Un crochet.
Une bêche. Une curette ou racloir.
Un balai. Un couteau ou spatule.
Deux leviers. Un sac à poudre.
Un picq-boyau.
Deux leviers.