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L’on voit qu’il sort ici près de 100 diviseurs, mais dans ce cas l’horloger ne sait desquels faire choix, rien ne le dirige ni pour la quantité des roues, ni pour la répartition du nombre des dentures ; cela lui paroît presque arbitraire ; il voit qu’il peut satisfaire à la question par un nombre de roues indéterminé, pourvû qu’il soit pris entre les diviseurs trouvés ; mais par la méthode dont je me sers, je trouve non-seulement le plus petit nombre de roues qui peuvent satisfaire à un nombre de vibrations donné, mais encore celui des dentures qui remplissent le plus simplement leur objet en ne multipliant pas inutilement les révolutions intermédiaires comme l’on est dans le cas de le faire par la méthode ordinaire.

Je considere donc 86400 comme une puissance dont je tire les différentes racines, d’abord comme un quarré, & ce seroit pour deux roues ; comme un cube, & ce seroit pour trois ; enfin comme un quarré quarré, & ce seroit pour quatre, jusqu’à ce qu’il me vienne une racine assez petite pour être multipliée par le nombre des ailes des pignons dans lesquels elles doivent engrener : d’où il suit qu’il ne faut changer ces nombres que lorsque des circonstances particulieres vous y obligent ; car lorsqu’on ôte quelques dents d’une roue pour les mettre à une autre qui suit ou qui précede d’un égal nombre de dents ; il arrive nécessairement que le nombre des vibrations diminue du quarré du nombre des dents retranchées, quoique rajoutées sur l’autre roue : j’ai même vû quelque horloger donner dans cette erreur, comme aussi mettre par préférence des dents de plus aux premieres & dernieres roues, pour faire plus ou moins d’effet sur le nombre des vibrations ; mais cela est absolument indifférent, car les roues se multipliant les unes par les autres, le nombre des vibrations ne change point, dans quelqu’ordre qu’on multiplie leur facteur ou produisant. Il n’y a donc d’essentiel lorsqu’on veut augmenter ou diminuer de peu de chose le nombre des vibrations, sans retrancher ni mettre des roues de plus, que de donner de l’inégalité au nombre des dents pour diminuer les vibrations, & de l’égalité pour les augmenter. Par exemple, si l’on a deux roues, dont la somme de leurs dents soit 120, s’engrenant dans des pignons de six aîles pour produire sur un troisieme mobile ou roue sans dents (comme peut être le volant d’une sonnerie), le plus grand nombre de révolutions possible ; l’on divisera la somme de leurs dents en deux parties égales, l’on aura 60 dents pour chaque roue, lesquelles multipliées l’une par l’autre donnent 3600 : qu’on divise ensuite pour le produit des deux pignons qui est 36, l’on aura pour quotient 100 révolutions de la troisieme roue ou volant. Mais si l’on ôte quatre dents de l’une pour les joindre à l’autre, l’on aura , c’est-à-dire, 3584, qui divisé par 36 produit de leurs pignons, aura pour quotient de révolutions de la troisieme roue, pour une de la premiere, & ce nombre de révolutions est différent du premier produit de quarré de , parce que les quatres dents que j’ai ôtées de l’une pour les mettre à l’autre, à cause des pignons de six dans lesquels elles s’engrenent, doivent être considérées chacune en particulier pour des sixiemes de révolutions : donc quatre dents font de révolutions dont le quarré est égal à .

Si l’on ôte 17 dents de l’une pour les joindre à l’autre, l’on aura , c’est-à-dire, 3311, qui divisé par 36 produit des deux pignons, donnera pour quotient de révolutions de la troisieme roue pour une de la premiere ; & ce dernier nombre de révolutions differe du premier 100 de de révolution quarré de la quantité 17 dents considérées comme à cause des pignons de 6.

Enfin si l’on vient à retrancher 59 dents de l’une

pour les joindre à l’autre, l’on aura , dont le produit divisé par celui des deux pignons 6 donnera pour quotient de révolutions de la troisieme roue pour une de la premiere, lequel quotient différe du premier 100 de de révolutions, dont la racine quarrée est .

L’on voit clairement que les révolutions diminuent en ôtant des dents d’une roue, quoiqu’on les mette à l’autre ; l’on pourroit donc faire cette question : si l’on ôte des dents d’une roue, combien en faudra-t-il remettre à l’autre pour garder le même nombre de révolutions ? La question seroit bien-tôt résolue si l’on pouvoit faire des fractions de dents comme l’on peut faire des fractions de révolutions dans les exemples ci-dessus. Si l’on fait l’opération on trouvera

pour le premier cas
pour le second cas
pour le troisieme cas

L’avantage de cette méthode de savoir l’effet que produit l’inégalité qu’on donne au facteur, me paroît si utile dans l’horlogerie où presque tous les effets agissent par voie de multiplication & de division des leviers les uns sur les autres, que je me détermine à donner encore un exemple sur deux petits nombres, par exemple, soit 18 comme somme de deux facteurs.

Inégalités. Somme. Facteur. Produit. Quarré de
l’inégalité.
Racines.
9 + 9 = 18 81 0
10 + 8 = 18 80 1 1
11 + 7 = 18 77 4 2
12 + 6 = 18 72 9 3
13 + 5 = 18 65 16 4
14 + 4 = 18 56 25 5
15 + 3 = 18 45 36 6
16 + 2 = 18 32 49 7
17 + 1 = 18 17 64 8
18
18

Il y a encore une autre observation à faire dans les rouages, il faut, autant que rien ne s’y oppose, employer des nombres sur les roues qui soient multiples du nombre des aîles des pignons avec lesquels elles s’engrenent ; par ce moyen l’on a l’avantage que les mêmes dents agissent toujours sur les mêmes aîles, & lorsqu’on a l’engrenage à examiner, un seul tour de roue suffit, au-lieu que lorsque les pignons ne divisent pas exactement le nombre de leurs roues, les mêmes dents ne se trouvent plus sur les mêmes aîles qu’après un certain nombre de révolutions, ce qui fournit une question à résoudre qui n’a cependant rien de difficile en soi, mais qui peut être ignorée par plusieurs, & comme l’on a souvent besoin de faire engrener des roues de différens nombres pour avoir telle partie ou telle nombre de révolutions qui puisse produire un effet ; la question se réduit à montrer quand les mêmes dents reparoissent sur les mêmes aîles.

Si deux roues de même nombre de dents s’engrenent l’une dans l’autre, quelque nombre de révolutions qu’elles fassent, les mêmes dents se rencontreront toujours à toutes leurs révolutions, il n’y a là nulle difficulté. Mais si l’une des roues a une dent de plus, alors les révolutions de l’une ne seront pas égales aux révolutions de l’autre, il s’en faudra d’une dent après la premiere révolution, de deux après la seconde, ainsi de suite, jusqu’à ce que le nombre des révolutions de la premiere roue égale le nombre des dents de la seconde, par exemple, si l’on a deux roues, l’une de 31 & l’autre de 17, si 31 conduit 17, les mêmes dents se rencontreront à la dix-septieme révolution de la premiere roue ; si au contraire la roue