Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/83

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

humeurs, produire quelques effets légers, ou achever la dépuration de l’humeur virulente qui ne s’étoit pas faite d’abord ; elle se séparera du sang, & paroîtra sous la forme de petite vérole volante.

Il arrivera delà qu’une personne qui aura eu la petite vérole vraie, pourra encore avoir la petite vérole volante ; & que d’autres qui n’auront point eu la premiere, auront cependant la seconde.

Le traitement de cette vérole volante doit être le même que de la vraie, à quelque petite différence près. Ainsi on saignera moins, on purgera moins, on ordonnera une diete moins sévere. Voyez Petite vérole vraie.

La petite vérole volante, ainsi que l’autre, laissent souvent des reliquats ou suites fâcheuses ; sur quoi il faut remarquer que cela vient d’une dépuration imparfaite de l’humeur qui étoit trop abondante, & qui s’est jettée sur différentes parties, comme il arrive dans quelques personnes qui restent aveugles, d’autres sont estropiées, d’autres tombent dans la phthisie & le marasme. Voyez ces articles.

Le vrai moyen de prévenir tous ces désordres, c’est d’aider la nature & d’achever ce qu’elle n’a pu faire elle seule, je veux dire que l’on doit employer les purgatifs, les apéritifs, les fondans mercuriaux, les bains, les sudorifiques, les eaux minérales, le lait, & enfin tous les secours qui sont indiqués pour détourner la consomption imminente, ou des maladies chroniques dont on craint les suites & la longueur. Voyez Chronique. Voyez Phthisie.

Le lait coupé avec les sudorifiques, l’exercice, le changement d’air, & enfin les nourritures louables, avec un régime convenable, seront d’excellens prophilactiques contre la phthisie imminente à la suite d’une petite vérole, ou mal traitée, ou rentrée, ou qui sera mal sortie.

Vérole, grosse, maladie vénérienne. Voyez Vénérien.

Pour former un traité de la maladie vénérienne, voici le plan qu’il faudroit suivre.

Maladie vénérienne inflammatoire chronique. La premiere comprend la gonorrhée, les chancres vénériens, tumores testium, inflammatos : bubones qui suppurantur, vel non suppurantur : faucium vel penduli palatini, ossium nasi, cranii ulcera depa centia, cariem : artuum dolores nocturnos : universæ cutis morbos inflammatorios : mariscas, hemorrhoides tumentes inflammatas.

Je ne traiterai présentement ni de la cause, ni de la guérison de cette premiere espece.

Je communiquerai seulement mes pensées & observations, & celles de plusieurs auteurs sur la maladie vénérienne chronique.

On l’observe dans le corps humain produite par trois causes.

La premiere : les reliquats de cette maladie qui n’a pas été guérie radicalement, ce qui arrive très-souvent.

La seconde : les différentes manieres de contracter cette maladie, les constitutions foibles par le tempérament, par l’âge, ou par les infirmités.

La troisieme : les enfans issus de peres infectés de la même maladie.

La pratique constante dans la guérison de la maladie vénérienne nous montre que très-rarement elle est parfaite, & principalement dans le sexe ; les praticiens gémissent de ne pouvoir guérir radicalement dans les femmes les gonorrhées vénériennes, & quelquefois dans les hommes. Quand la maladie vénérienne est tellement avancée, qu’elle attaque la gorge ou le scrotum avec des tumeurs dans les cordons, & que les malades ont été guéris par la salivation ou par autres compositions mercurielles, il arrive rarement qu’ils soient guéris radicalement ; quelquefois les médecins en sont la cause, ordinairement les mala-

des, & bien souvent le degré exalté du virus vérolique.

Dans la supposition même que celui qui a été infecté par la maladie vénérienne, ait été parfaitement guéri, il est constant que son corps restera toujours plus foible & plus susceptible de recevoir ce virus, qu’il n’étoit avant l’infection. Le mercure détruit toujours cette huile animale, cet humide radical, causé de l’élasticité & vigueur de nos fibres.

Le corps dans cet état de foiblesse reste disposé à contracter le virus vérolique à la prochaine cohabitation avec une personne infectée.

Il est à remarquer que celui qui a été infecté de petite verole suppuratoire, ne gagnera point cette maladie, quoiqu’il soit inoculé avec le même virus, comme le docteur Matty l’a expérimenté en son propre corps, & que ceux qui ont été affectés de la maladie vénérienne, gagneront cette maladie autant de fois qu’ils cohabiteront avec des personnes vérolées : signe certain, ou que la maladie vénérienne ne se guérit pas si radicalement que la petite verole, ou que ces deux virus sont d’une nature tout-à-fait différente.

L’expérience nous enseigne chaque jour que toutes les personnes qui cohabitent avec une femme infectée, ne gagnent pas son mal, au moins en apparence. Si la personne la plus faine & robuste en est infectée, la nature agira avec toutes ses forces à chasser & à dompter le stimulum vénérien ; elle produira chaleur, douleur dans la partie ; il se formera de nouveaux fluides, à l’aide desquels se domptera le virus, qui finalement sera chassé, & le malade souvent, avec l’aide de l’art ou sans son secours, restera guéri ; quelquefois aussi il se formera un ulcere ou une inflammation qui se terminera en pus.

Mais celui qui foible par sa constitution, par son âge, ou par d’autres maladies, aura cohabité avec une femme gâtée, ne ressentira rien ; le virus entrera dans le corps, attaquera le plus intime & le plus subtil, y restera, & ne viendra à se manifester que par la suite du tems, & par des signes qui sont les mêmes qui caractérisent les maladies chroniques.

Ceux qui contractent cette maladie dans ces dernieres circonstances, par les voies naturelles ou par libidines vagas, ne ressentent aucun de ces signes qui caractérisent la maladie vénérienne inflammatoire ; au contraire ils sentent quatre ou cinq jours après, une lassitude, une pesanteur, principalement dans les reins, quelques vertiges, une respiration de tems-en-tems gênée ; ils deviennent tristes, le visage pâle ; quelques jours après il paroit un ou quelques boutons sur le visage, des ophthalmies plus ou moins inflammatoires, mais sans ardeur ni douleur, aussi rares qu’aux véritables.

Par la suite du tems les digestions de l’estomac deviennent lentes & imparfaites ; on y sent du poids, des vents, quelquefois des douleurs ; à d’autres ce sont des tranchés dans le ventre, qui ordinairement est paresseux ; cet état alors est si analogue avec la maladie hypocondriaque, hystérique ou de vapeurs, qu’il faut un médecin bien expérimenté pour reconnoître ces sortes de symptomes, & aller à leur véritable cause.

Cette maladie invétérée a produit l’épilepsie, la manie, la cataracte, la surdité & les polypes du nez & d’autres parties du corps humain.

C’est aussi de cette maniere que cette maladie dans des telles circonstances infecte le genre nerveux, & toute l’étendue de la membrane celluleuse où résident les liqueurs les plus fines & les plus actives de notre corps.

Mais cette maladie se manifeste par d’autres signes tels qu’ils seroient produits par les maladies simples qui naissent du dérangement de la bile & du sang.