Ces symptomes se compliquent avec d’autres qui appartiennent à différentes maladies, telles que la douleur de côté, la toux, le crachement de sang, la respiration génée, tremblante & convulsive, une stupeur avec un embarras dans la tête, des soubresauts dans les tendons, un météorisme dans le bas-ventre, une dureté dans ses différentes régions, une colique inflammatoire, des suppressions d’urine, des tenesmes, d’autres fois le dévoiement & la dyssenterie se mettent de la partie, & empêchent l’éruption, ou font rentrer le venin au-dedans, lorsqu’il étoit déja sorti par les pores de la peau.
Prognostic. Plus la petite vérole paroît de bonne heure dans le printems, & plus l’air est disposé à favoriser la maladie, plus elle devient dangereuse.
2°. La confluente est dangereuse tant dans les enfans, que dans les adultes ; & plus dans ceux-ci que dans ceux-là. Mais le danger est bien plus grand s’il y a suppression d’urine, nausées, délire, taches de pourpre, crystalline, urine sanglante.
3°. Le phthialisme ou la salivation s’arrêtant subitement, & ne revenant pas dans les 24 heures, marque un grand danger ; mais cela n’a lieu que dans la confluente, & encore dans les adultes. Dans cette espece le malade n’est pas hors de danger avant le 20e jour.
4°. Si la petite vérole est distincte, ronde, grosse, que les pustules s’emplissent & croissent en pointe par le bout ; si le vomissement, le mal de tête, la fievre cessent ou diminuent beaucoup après l’éruption ; si d’ailleurs le malade a l’esprit tranquille & sans appréhension, le danger est ordinairement passé vers le dixieme jour. Les convulsions sont fort dangereuses.
En général lorsque la petite vérole suit quelque débauche ou excès, soit de liqueurs, soit d’alimens, soit autrement, elle est fort dangereuse & mortelle pour l’ordinaire.
Traitement. Les sentimens sont fort partagés sur cette matiere ; le vulgaire veut que l’on donne les cordiaux pour aider l’éruption ; les médecins sensés, tels que Boërhaave & autres, regardent cette maladie comme inflammatoire, & veulent qu’on la traite comme telle. Mais ce traitement doit varier selon les especes, les tems, & les degrés que l’on distingue dans la petite vérole. Sur quoi il faut se ressouvenir de ce que nous avons dit en parlant des fievres éruptoires.
Dans le premier tems, qui est celui de la couve ou de l’ébulliton, on doit généralement saigner pour détendre & relâcher la peau, & aider l’éruption ; mais on saignera moins que dans une inflammation ordinaire. On ordonnera ensuite un émétique ou un purgatif dans le dessein d’évacuer les premieres voies, ou des lavemens légérement purgatifs.
La boisson sera délayante, humectante ; les bouillons seront légers & peu nourrissans pour ne pas augmenter la fievre. Voyez Inflammation.
Dans le deuxieme tems, on aidera l’éruption par une légere tisane de scorzonnaire, de lentilles, de dompte-venin, ou autre, ou de l’eau rougie, ou de la corne de cerf bouillie.
L’air sera tempéré : le malade prendra des bouillons moins légers.
Dans le troisieme tems on aidera la suppuration par la continuation du même régime ; on poussera encore plus par la peau au moyen de légers diaphorétiques.
Enfin sur la fin on poussera par de plus forts sudorifiques : la nourriture sera plus forte. On pourra alors détourner une partie de l’humeur par les selles.
On doit purger après que les croûtes sont tombées, ou lorsqu’elles commencent à tomber ; & cela à plusieurs reprises, pour empêcher le reflux de la ma-
détersives, balsamiques & fortifiantes ; on ordonnera des linimens détersifs sur les pustules, ou une simple onction avec l’onguent rosat, ou la pommade simple.
La meilleure façon pour empêcher les boutons de creuser est de ne les pas toucher, ou de les piquer légérement afin d’en évacuer le pus, & qu’il ne corrode pas la peau par-dessous les croûtes.
On ne peut absolument donner de regles générales sur le traitement de la petite vérole ; comme sa cause nous est inconnue, on ne peut à cet égard seul la traiter que par empyrisme : les symptomes seuls nous donnent des indications. On voit des malades périr après la saignée ; on en voit beaucoup qui en reviennent sans saignée, ni autres préparations.
M. Freind & d’autres sont pour la saignée ; les Allemans saignent peu. Alsaharavius dans le premier degré de la petite vérole, prescrit la saignée jusqu’à défaillance & jusqu’à l’évanouissement. M. Lister a trouvé que dans la petite vérole maligne le sang est excessivement tendre & friable, en sorte que la plume la plus molle diviseroit facilement ses globules.
Etinuller dit que l’on doit avoir par-dessus tout une attention particuliere à l’haleine, à la respiration & à la voix ; & que quand ces deux choses sont bonnes, c’est un bon signe. Il ajoute que la fiente de cheval est un excellent médicament, en ce qu’il provoque la sueur, & qu’il garantit la gorge.
Le vulgaire est dans un préjugé que toutes les boissons doivent être rouges, à cause de la chaleur qu’on prétend être seule nécessaire dans cette maladie.
Quelques auteurs ont proposé les mercuriaux dans le commencement, en établissant une analogie entre la grosse & la petite vérole.
Inoculation. On nous a apporté des Indes & de la Mingrelie, une autre méthode de traiter la petite vérole, qui est l’inoculation. Elle consiste à donner la petite vérole, en communiquant son venin à un malade en lui faisant entrer le pûs d’une pustule vérolique, par quelque ouverture qu’on lui fait à la peau, ou en lui mettant dans le nez un grain de ce levain qui soit assez considérable : on traite ensuite le malade méthodiquement. Voyez Inoculation.
Petite vérole volante. Cette maladie a beaucoup de rapport avec la petite vérole vraie ; mais elle est bien plus légere, plus superficielle. On y remarque les quatre tems comme dans la vraie, quoique moins marqués. Ceux qui nient que l’on puisse avoir cette maladie deux fois, disent que la vérole volante n’arrive que par un défaut d’éruption suffisante de petite vérole, au moyen de quoi il reste encore suffisamment de levain pour produire une nouvelle éruption, & que la petite vérole vraie détruit les glandes & le tissu de la peau quand elle est abondante, ce qui l’empêche de revenir. Cette raison ne peut avoir lieu lorsque la petite vérole est médiocre, & qu’on n’en voit que quelques grains qui poussent çà & là.
On pense donc communément que cette derniere est causée par un reste de levain de petite vérole qui n’a pu se faire jour, ou qui n’a pas eu assez de force n’ayant pas trouvé de causes occasionnelles assez énergiques pour produire la petite vérole vraie. Cette matiere étant dans le sang, soit dès la naissance, soit par une communication contagieuse, y reste & n’y produit pas ses effets autant que dans une autre occasion, faute d’y trouver des causes qui aident son développement & son exaltation. La force particuliere du tempérament, la qualité louable des humeurs feront que les pointes du virus seront émoussées ou engagées, & perdront leur énergie. Si donc une cause de la petite vérole, mais affoiblie ou moins énergique, existe dans le sang, elle pourra à l’occasion de l’air, ou d’une légere fermentation dans les