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VERNE, (Jardinage.) voyez Aulne.

VERNAGE, s. f. (Jardinage.) est une portion de terrein plantée en vernes ou aulnes. Voyez Vernes ou Aulnes.

VERNEUIL, (Géog. mod.) ville de France, dans la Normandie, vers les frontieres du Perche, au diocèse d’Evreux, sur la gauche de l’Oure, à 18 lieues au midi de Rouen, & à 24 au sud-ouest de Paris. Le roi Charles VII. l’enleva aux Anglois en 1449 ; & depuis ce tems-là elle a fait partie du duché d’Alençon. L’élection de Verneuil comprend cent trente-deux paroisses. Le commerce des habitans consiste en grains, en draperies & en bonneteries. Longitude, suivant Cassini, 18d. 35′. 45″. latit. 48d. 44′. 10″.

2°. Verneuil, autre petite ville de France, dans le Bourbonnois, à six lieues de Moulins, avec titre de châtellenie. Long. 20d. 48′. latit. 46d. 17′. (D. J.)

VERNIS de la Chine, (Arts étrangers.) gomme qu’on tire par incision & qu’on applique avec art sur le bois pour le conserver, & lui donner un éclat durable.

Un ouvrage d’un bois vernis doit être fait à loisir. Un été suffit à-peine pour donner à l’ouvrage de vernis toute la perfection qu’il doit avoir. Il est rare que les Chinois ayent de ces sortes d’ouvrages de prêts, presque toujours ils attendent l’arrivée des vaisseaux pour y travailler, & se conformer au goût des européens.

Ce que c’est que le vernis chinois. Le vernis que les Chinois nomment tsi, est une gomme roussâtre qui découle de certains arbres par des incisions que l’on fait à l’écorce jusqu’au bois, sans cependant l’entâmer. Ces arbres se trouvent dans les provinces de Kiang si & de Se-tehuen : ceux du territoire de Kant-tcheou, ville des plus méridionales de la province de Kiang si, donnent le vernis le plus estimé.

Son choix. Pour tirer du vernis de ces arbres, il faut attendre qu’ils ayent 7 ou 8 ans. Celui qu’on en tireroit avant ce tems-là ne seroit pas d’un bon usage. Le tronc des arbres les plus jeunes dont on commence à tirer le vernis, a plus d’un pié de circuit. On dit que le vernis qui découle de ces arbres vaut mieux que celui qui découle des arbres plus vieux, mais qu’ils en donnent beaucoup moins.

Arbre d’où découle le vernis. Ces arbres dont la feuille & l’écorce ressemblent assez à la feuille & à l’écorce du frêne, n’ont jamais guere plus de 15 piés de hauteur ; la grosseur de leur tronc est alors de deux piés & demi de circuit, ils ne portent ni fleurs, ni fruits : voici comme ils se multiplient.

Sa culture. Au printems quand l’arbre pousse, on choisit le rejetton le plus vigoureux, qui sorte du tronc & non pas des branches ; quand ce rejetton est long d’environ un pié, on l’enduit par le bas de mortier fait de terre jaune. Cet enduit commence environ deux pouces au-dessous du lieu où il sort du tronc, & descend au-dessous quatre ou cinq pouces ; son épaisseur est au-moins de trois pouces. On couvre bien cette terre, & on l’enveloppe d’une natte qu’on lie avec soin pour la défendre des pluies & des injures de l’air. On laisse le tout dans cet état depuis l’équinoxe du printems jusqu’à celui d’automne. Alors on ouvre tant-soit-peu la terre pour examiner en quel état sont les racines que le rejetton a coutume d’y pousser, & qui se divisent en plusieurs filets ; si ces filets sont de couleur jaunâtre ou roussâtre, on juge qu’il est tems de séparer le rejetton de l’arbre, on le coupe adroitement sans l’endommager, & on le plante. Si ces filets sont encore blancs, c’est signe qu’ils sont trop tendres, ainsi on recouvre l’enduit de terre comme il étoit auparavant, & on differe au printems suivant à couper le rejetton pour le planter.

Mais soit qu’on le plante au printems ou en automne, il faut mettre beaucoup de cendres dans le trou qu’on a préparé, sans quoi les fourmis dévoreroient les racines encore tendres, ou du-moins en tireroient tout le suc, & les feroient sécher.

Saison du vernis. L’été est la seule saison où l’on puisse tirer le vernis des arbres ; il n’en sort point pendant l’hiver, & celui qui sort au printems & en automne est toujours mêlé d’eau.

Sa récolte. Pour tirer le vernis on fait plusieurs incisions de niveau à l’écorce de l’arbre au-tour du tronc, qui selon qu’il est plus ou moins gros, peut en fournir plus ou moins. Le premier rang des incisions n’est éloigné de terre que de sept pouces. A la même distance plus haut se fait un second rang d’incisions, & ainsi de sept en sept pouces jusqu’aux branches qui ont une grosseur suffisante.

On se sert pour faire ces incisions d’un petit couteau fait en demi-cercle. Chaque incision doit être un peu oblique de bas-en-haut, aussi profonde que l’écorce est épaisse, & non pas davantage ; celui qui la fait d’une main, a dans l’autre main une coquille dont il insere aussi-tôt les bords dans l’incision autant qu’elle peut y entrer. Ces coquilles sont plus grandes que les plus grandes coquilles d’huitres qu’on voie en Europe. On fait ces incisions le soir, & le matin on va recueillir ce qui a coulé dans les coquilles ; le soir on les insere de nouveau dans les incisions, & l’on continue de la même maniere jusqu’à la fin de l’été.

Ce ne sont point d’ordinaire les propriétaires de ces arbres qui en tirent le vernis, ce sont des marchands qui, dans la saison, traitent avec les propriétaires, moyennant cinq sous par pié. Ces marchands louent des ouvriers auxquels ils donnent par mois une once d’argent tant pour leur travail que pour leur nourriture. Un de ces ouvriers suffit pour cinquante piés d’arbre.

Précaution nécessaire à la récolte du vernis. Il y a des précautions à prendre pour garantir les ouvriers des impressions malignes du vernis. Il faut avoir préparé de l’huile de rabette, où l’on aura fait bouillir une certaine quantité de ces filamens charnus qui se trouvent entremêlés dans la graisse des cochons, & qui ne se fondent point quand on fait le saindoux. Lorsque les ouvriers vont placer ces coquilles aux arbres, ils portent avec eux un peu de cette huile dont ils se frottent le visage & les mains le matin ; lorsqu’après avoir recueilli le vernis, ils reviennent chez les marchands, ils se frottent encore plus exactement de cette huile.

Après le repas, ils se lavent tout le corps avec de l’eau chaude, dans laquelle on a fait bouillir de l’écorce extérieure & hérissée de chataignes, de l’écorce de bois de sapin, du salpêtre crystallisé, & d’une herbe qui est une espece de blette qui a du rapport au tricolor. Toutes ces drogues passent pour être froides.

Chaque ouvrier remplit de cette eau un petit bassin, & s’en lave en particulier ; ce bassin doit être d’étain.

Dans le tems qu’ils travaillent près des arbres, ils s’enveloppent la tête d’un sac de toile qu’ils lient autour du cou où il n’y a que deux trous vis-à-vis des yeux. Ils se couvrent le devant du corps d’une espece de tablier fait de peau de daim passée, qu’ils suspendent au cou par des cordons, & qu’ils arrêtent par une ceinture ; ils ont aussi des bottines de la même matiere, & aux bras des gants de peau fort longs.

Vases pour la récolte. Quand il s’agit de recueillir le vernis, ils ont un vase fait de peau de bœuf attaché à leur ceinture ; d’une main ils dégagent les coquilles, & de l’autre ils le raclent avec un petit instrument de fer, jusqu’à ce qu’ils en ayent tiré tout le vernis.