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on ne datoit point les actes de l’an de grace, comme le rapporte Robert Gaguin.

Il est peut-être arrivé que dans l’espace de tems qui s’est écoulé depuis 1370 à 1390, le souverain, par une grace singuliere, tourna en franc-aleu & affranchit de tout devoir d’hommages & de vassalité la terre d’Yvetot : mais supposé qu’on veuille donner à ce franc-aleu noble le titre de royaume, les Anglois nos voisins nous en fourniront un pareil qu’on appelle le royaume de Man, de la petite île de ce nom située dans la mer d’Irlande, & au couchant de l’Angleterre.

La seigneurie d’Yvetot jouit encore aujourd’hui de tous les priviléges des francs-aleus nobles attachés à cette terre, à laquelle le vulgaire donnoit autrefois le nom de royaume, ainsi qu’il paroît par ces vers d’un de nos anciens poëtes :

Au noble pays de Caux,
Y a quatre abbayes royaux,
Six prieurés conventuaux,
Et six barons de grand arroy,
Quatre comtes, trois ducs, un roy.

Le lecteur curieux de consulter tout ce qui regarde le prétendu royaume d’Yvetot, peut lire, outre la dissertation que nous avons indiquée, le traité de la noblesse par M. de la Roque, le Dictionnaire géographique de la France, le Mercure du mois de Janvier 1726, & le traité latin du royaume d’Yvetot par Claude Malingre, intitulé de falsâ regni Yvetotti narratione, ex majoribus commentariis in fragmentum redactâ. Paris, 1615, in-8o. (D. J.)

YUMA, (Géog. mod.) île de l’Amérique septentrionale, une des Lucaies, au nord de l’île de Cuba. Elle a environ vingt lieues de long & sept de large. Les Anglois l’appellent Long-Island. Latit. 20. 30. (D. J.)

YUNA l’, (Géog. mod.) riviere de l’Amérique, dans l’ile Hispaniola. Elle tire son origine des hautes montagnes de la Porte, & se rend à la mer dans la baie de Sumana. (D. J.)

YUNE, s. f. (Comm.) mesure des liqueurs en usage dans le Wirtemberg.

L’yune contient dix masses, & l’ame est composée de seize yunes. Voyez Masse & Ame Dictionn. de Comm. & de Trév.

YVOIRE, s. m. (Hist. nat.) dent, ou plutôt défense de l’éléphant, qui naît aux deux côtés de sa trompe en forme de longue corne. Voyez Dent.

L’yvoire est fort estimé à cause de sa couleur, de son poli, & de la finesse de son grain quand il est travaillé. Dioscoride dit qu’en faisant bouillir l’yvoire avec la racine de mandragore l’espace de six heures, il s’amollit, en sorte que l’on en peut faire tout ce que l’on veut. Voyez Teinture.

L’yvoire de l’île de Ceylan & de l’île d’Achand, a cela de particulier, qu’il ne jaunit point, comme celui de la terre-ferme, & des Indes occidentales ; ce qui le rend plus cher que l’autre.

On appelle noir d’yvoire, de l’yvoire que l’on brûle & que l’on retire en feuille quand il est devenu noir. On le broye à l’eau, & on en fait de petits pains plats & des trochisques dont les Peintres se servent. Voyez Noir.

Yvoire, (Chimie pharmaceut.) la rapure d’yvoire est assez souvent employée par les médecins dans les tisannes, dans les bouillons, & dans la gelée des malades ; la corne de cerf qui est plus commune, vaut encore mieux ; cependant puisque l’yvoire est d’usage, M. Geoffroy n’a pas voulu négliger de l’examiner ; voici le résultat de ses opérations sur cette matiere osseuse.

Une livre de rapure d’yvoire a donné un bouillon limpide, qui s’est coagulé en refroidissant ; mais dans l’évaporation il a déposé insensiblement une terre blanche très-fine, chargée d’une portion de sel essentiel ; ce qui a obligé M. Geoffroy de refiltrer la liqueur. La partie gommeuse qui est restée après l’évaporation de ce bouillon filtré pour la seconde fois, est devenue plus seche, plus dure, & plus solide, que celle des os de bœuf, mais moins unie, & moins liée que celle du bois de cerf. Cette matiere gommeuse pesoit quatre onces sept gros un grain ; analysée, elle a donné d’abord un peu de flegme, puis un esprit de couleur orangée, ensuite un sel volatil blanc en ramifications, qui a pesé un gros quarante-huit grains. L’huile épaisse & noire qui est venue la derniere, pesoit avec l’esprit trois gros trente-six grains. Mém. de l’acad. an. 1732. (D. J.)

YVOY, ou IVOY, (Géog. mod.) petite ville de France, dans le Luxembourg françois, sur le bord du Chier, à six lieues au midi de Sédan, & à 12 au couchant de Luxembourg. La paix de Riswick en assura la possession à la France ; elle fut érigée en duché en 1662, sous le nom de Carignan, en faveur du prince Eugene. Long. 22. 53. latit. 49. 38. (D. J.)

YUPI, (Géog. mod.) pays d’Asie, dans la Tartarie orientale, entre celui de Nieulan, la mer orientale, & la Chine, le long du fleuve Ségalien. Les peuples qui l’habitent sont farouches & errans de côté & d’autre. (D. J.)

YVRESSE, s. f. (Médecine.) état contre nature, dérangement plus ou moins considérable du corps & de l’esprit, que produisent le plus ordinairement les liqueurs fermentées bûes avec excès. En nous renfermant, comme il convient dans notre sujet, nous ne devons voir dans l’yvresse qu’une maladie, & nous borner à l’examen des symptômes qui la caractérisent, des causes qui l’excitent, & des remedes qui la guérissent ; laissant au moraliste & au théologien le soin de joindre les désordres qu’entraîne l’yvresse en privant l’homme de sa raison ; & la grandeur de la faute commise par cette sorte d’intempérance, & d’en éloigner les hommes par les traits plus ou moins efficaces que leur fournissent la morale & la religion.

On peut relativement à la qualité & au nombre des symptômes, distinguer dans l’yvresse trois états ou degrés différens : le premier degré, ou l’yvresse commençante, s’annonce par la rougeur du visage, par la chaleur que la personne qui s’enyvre y ressent ; on voit alors son front se dérider, ses yeux s’épanouir & respirer la gaieté ; l’ennuyeuse & décente raison oubliée, pas encore perdue, & avec elle se dissipent les soucis, les chagrins, & les inquiétudes qu’elle seule produit, & entraîne constamment à sa suite ; l’esprit dégagé de cet incommode fardeau est plus libre, plus vif, plus animé ; il devient dans quelques personnes plus actif & plus propre à former de grandes idées, & à les exprimer avec force ; les discours sont plus joyeux, plus enjoués, plus diffus, moins suivis, & moins circonspects ; mais en même tems les paroles sont plus embarrassées, prononcées avec moins de netteté ; on commence déjà à bégayer, & à mesure qu’on parle davantage, on parle avec moins de facilité ; la langue s’appesantit, elle exécute ses mouvemens avec peine, & trouve encore un obstacle dans la salive qui est épaisse & gluante.

Cet état est proprement ce qu’on appelle être gris ; il n’a rien de fâcheux, n’exige aucune attention de la part du médecin ; on le regarde comme un des moyens les plus propres à répandre & à aiguiser la joie des festins ; mais pour peu qu’on s’expose plus long-tems à la cause qui l’a produit, la scene va chan-