Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/45

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

meurs ; ils y trouvoient dedans un petit animal blanc, ayant une petite tache sur le corps. Les habitans du pays se guérissent de ce ver par le moyen d’une huile qu’ils tirent d’un fruit, nommé hibout, lequel n’est pas bon à manger ; ils conservent cette huile dans de petits vaisseaux faits avec des fruits appellés chez eux carameno ; ils en mettent une goutte sur les tumeurs, & le mal guérit en peu de tems.

Les ombilicaux. Ce sont des vers que l’on dit qui viennent au nombril des enfans, & qui les font souffrir beaucoup, leur causent une maigreur considérable, & les jettent dans une langueur universelle : les levres palissent, la chaleur naturelle diminue, & tout le corps tombe dans l’abattement. On n’a point d’autre signe de ce ver, sinon qu’ayant lié sur le nombril de l’enfant un goujon, on trouve le lendemain une partie de ce poisson rongée ; on en remet un autre le soir, & l’on réitere la chose jusqu’à trois ou quatre fois, tant pour s’assurer du séjour du ver, que pour l’attirer par cet appât ; ensuite on prend la moitié d’une coquille de noix, dans laquelle on mêle un peu de miel, de la poudre de crystal de Venise & de sabine ; on applique cette coquille sur le nombril, le ver vient à l’ordinaire, & attiré par le miel, mange de cette mixtion qui le fait mourir ; après quoi on fait avaler à l’enfant quelque médicament abstersif pour entraîner le ver. M. Andry dit qu’il auroit beaucoup de penchant à traiter ce ver de fable, sans le témoignage d’Etmuler & de Sennert, qui lui font suspendre son jugement. Le premier assure que Michael a guéri de ce ver plusieurs enfans, en observant la méthode que nous venons de dire. Le second rapporte aussi l’autorité d’un témoin oculaire, qui est Bringgerus, lequel dit qu’une petite fille de six mois, ayant une fievre qu’on ne pouvoit guérir, la mere soupçonna que c’étoit un ver au nombril, & réussit à l’en faire sortir.

Les vénériens. Ce sont des vers que l’on prétend se trouver dans presque toutes les parties du corps de ceux qui sont attaqués de la maladie vénérienne.

Figures monstrueuses. Les uns deviennent comme des grenouilles, les autres comme des scorpions, les autres comme des lézards ; aux uns il pousse des cornes, aux autres il pousse une queue fourchue, aux autres une espece de bec comme à des oiseaux ; d’autres se couvrent de poils & deviennent tout velus ; d’autres se revêtent d’écailles & ressemblent à des serpens. Toutes ces figures se développent lorsqu’ils vieillissent. Or comme la barbe ne sort à l’homme qu’à un certain âge ; que les cornes ne poussent à certains animaux que quelque tems après leur naissance ; que les fourmis prennent des aîles avec le tems ; que les vieilles chenilles se changent en papillons ; que le ver à soie subit un grand nombre de changemens, il n’y a pas lieu de s’étonner que les vers du corps de l’homme puissent prendre en vieillissant toutes ces figures extraordinaires qu’on y remarque quelquefois. Cela n’arrive que par un simple accroissement de parties qui rompent la peau dont l’insecte est couvert, & que les Naturalistes appellent nymphe. Ceux qui voudront savoir quels sont les effets des vers dans le corps humain, les signes de ces vers, les remedes qu’on doit employer contre eux, &c. n’ont qu’à lire le traité de M. Andry, de la génération des vers dans le corps de l’homme.

Ver, (Critiq. sacrée.) σκώληξ ; l’Ecriture compare l’homme à cet insecte rampant, pour marquer sa bassesse & sa foiblesse. Job, xxv. 6 : le ver qui ne meurs point, Marc, ix. 43, est une expression métaphorique qui désigne les remords toujours renaissans d’une conscience criminelle. (D. J.)

VER SACRUM, (Hist. anc.) printems sacré : expression qui se trouve dans les anciens historiens latins & dans quelques monumens antiques, & sur la

signification de laquelle les savans sont partagés. M. l’abbé Couture pensoit que par ver sacrum on devoit entendre le vœu qu’on faisoit dans les grandes calamités, d’immoler aux dieux tous les animaux nés dans un printems ; & il se fondoit sur ce qu’après la bataille de Trasimene & la mort du consul C. Flaminius, la république romaine consternée voua aux dieux un printems sacré, c’est-à-dire, comme il fut déterminé par un decret du sénat, tout le bétail qui seroit né depuis le premier jour de Mars jusqu’au dernier d’Avril inclusivement.

M. Bolvin a cru que par ver sacrum il falloit entendre les colonies qui sous la protection des dieux sortoient de leur pays pour aller s’établir dans un autre : ce qu’il fonde sur l’autorité de Pline, qui parlant des Picentins, dit qu’ils descendoient des Sabins qui avoient voué un printems sacré, c’est-à-dire qui les avoient envoyés en colonie, Picentini orti sunt à Sabinis, voto vere sacro, & sur celle de S. Jerôme, qui sur l’an 1596 de la chronique d’Eusebe, dit que les Lacédémoniens fonderent la ville d’Héraclée en y envoyant un ver sacrum. Lacedemonii ver sacrum Heracliam destinantes urbem condunt. Denys d’Halicarnasse, Strabon, Plutarque & plusieurs autres anciens & modernes paroissent favorables à ce dernier sentiment.

M. Leibnitz avoit expliqué dans le même sens le mot ver sacrum trouvé sur des monumens déterrés dans l’église de Paris, des colonies des Gaulois, que Bellovese & Sigovese conduisirent autrefois dans la Germanie & dans l’Italie. Mém. de l’acad. tom. III.

VERA, (Géog. anc.) 1°. nom d’une ville de Médie, selon Strabon, qui dit qu’Antoine s’en empara dans son expédition contre les Parthes ; 2°. nom d’un fleuve de la Gaule, selon Ortelius. (D. J.)

Vera, (Géog. mod.) ville d’Espagne, au royaume de Grenade, proche la riviere de Guadalmaçar, sur les confins du royaume de Murcie. Quelques-uns la prennent pour la Virgi des anciens. Long. 16. 20. latit. 36. 40. (D. J.)

Vera, la, (Géog. mod.) riviere des états du turc, en Europe. Elle prend sa source vers les confins de la Bulgarie, & se décharge dans le golfe de Salonique. Cette riviere que M. de Lisle nomme Calico, & qu’on appelle aussi Verataser, est prise pour le Chidorus des anciens. (D. J.)

VÉRACITÉ, (Morale.) la véracité ou vérité morale dont les honnêtes gens se piquent, est la conformité de nos discours avec nos pensées ; c’est une vertu opposée au mensonge.

Cette vertu consiste à faire ensorte que nos paroles représentent fidelement & sans équivoque nos pensées à ceux qui ont droit de la connoître, & auxquels nous sommes tenus de les découvrir, en conséquence d’une obligation parfaite ou imparfaite, & cela, soit pour leur procurer quelque avantage qui leur est dû, soit pour ne pas leur causer injustement du dommage.

La véracité en fait de conventions, s’appelle communément fidélité ; elle consiste à garder inviolablement ses promesses & ses contrats ; c’est l’effet d’une même disposition de l’ame de s’engager & de vouloir tenir sa parole ; mais il n’est pas permis de tenir une convention contraire aux lois naturelles ; car en ce cas elles rendent illicite l’engagement. (D. J.)

VERA-CRUZ ou VERA-CRUX, (Géog. mod.) ville de l’Amérique septentrionale, dans la nouvelle Espagne, sur le golfe du Mexique. Elle est petite, pauvre & habitée par peu d’espagnols, qui pour la plûpart sont mariniers ou facteurs. Toutes les flottes qui arrivent d’Europe dans la nouvelle Espagne, mouillent dans ce port ; & dès que les flottes sont parties, tous les blancs se retirent dans les terres à cause du mauvais air qu’on respire dans cette ville.