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soulever avec violence ; & ainsi se seroit un mouvement contraire au premier, qui empêcheroit la flexion qui est faite par l’éloignement du centre de pesanteur ; & quoiqu’on nous puisse dire que l’oiseau qui se détourne promptement, fait ce mouvement par l’effort d’une seule aile vers la queue, & que lorsqu’il vole doucement, il le fait au contraire en fléchissant le cou de côté sans un nouvel effort de l’aile, nous voyons pourtant que le détour de l’oiseau, lorsqu’il est lent, n’a pas besoin de plus de force qu’il n’en faut pour mouvoir les ailes dans le vol ordinaire, puisqu’il suffit que l’aile qui fait détourner l’oiseau, s’approche un peu de la queue, & qu’elle y pousse l’air, afin que le détour latéral de l’oiseau, lorsqu’il est lent, se puisse faire facilement sans aucun nouvel effort.

Par tout ce que nous avons dit ci-dessus, il est certain que l’oiseau acquiert en volant, une impétuosité qui le pousse, de même que le vaisseau qui a été poussé par les rames reçoit une impression qui dure quelque tems, même après que l’action des rames a cessé ; mais ce qu’il y a de remarquable, c’est que l’impétuosité du vaisseau reste toujours la même, quoique sa direction soit changée, c’est-à-dire, quoiqu’il s’écarte de la ligne droite par le mouvement du gouvernail, & que l’impression que l’oiseau a acquise par son mouvement, continue quand sa direction change, à moins que l’oiseau ne monte, parce qu’alors sa pesanteur lui fait obstacle ; & si l’effort que l’oiseau a acquis en montant, est plus grand que celui qui le fait descendre, il continue encore de monter ; mais lorsque ses deux efforts sont égaux, savoir l’impétuosité que l’oiseau a acquise, & sa pesanteur qui le fait descendre, il demeure un peu de tems les aîles étendues dans la même ligne horisontale.

Et la raison pourquoi il ne peut pas demeurer longtems dans cette situation, c’est que le vol ne se fait jamais par une ligne perpendiculaire, mais toujours par un mouvement oblique ou par une ligne courbe parabolique, comme se meuvent les corps qui sont poussés au loin. Lorsque ces deux efforts dont je viens de parler, sont égaux, il arrive quelquefois qu’ils se détruisent l’un l’autre, & quelquefois aussi qu’ils s’aident si mutuellement, que des deux il en résulte un mouvement très-prompt, comme celui avec lequel les éperviers se jettent sur leur proie pour la dévorer.

Il y en a qui veulent que les oiseaux qui sont fort élevés dans l’air, se soutiennent plus aisément que ceux qui volent proche de la terre, & qu’ils pesent moins alors, parce qu’ils sont moins attirés par la vertu magnétique de la terre, qui selon leur hypothèse, est la seule cause de la descente des corps pesans : ce qu’ils prouvent, parce que l’aimant n’attire point le fer lorsqu’il est trop éloigné. Mais cette opinion qui attribue la chûte des corps pesans à la vertu magnétique de la terre, s’accorde peu avec l’expérience, puisqu’on voit que les éperviers qui volent proche de la terre où, selon eux, il y a beaucoup de cette matiere, ne frappent pas l’air plus souvent que quand ils volent plus haut. Ce n’est donc pas par défaut de la vertu magnétique, que les oiseaux demeurent suspendus au plus haut de l’air sans battre souvent des aîles, mais plutôt par la force qu’ils ont acquis en volant.

Comme c’est une loi de la nature, qu’un corps dur qui rencontre un autre corps homogene en repos, se réflechit, & souvent se rompt, elle a pris soin d’empêcher que les oiseaux qui sont des corps pesans, ne se luxassent les jointures, & ne se rompissent les jambes en descendant sur la terre, & pour cet effet, elle leur a donné l’instinct de ployer leurs aîles & leurs queues ; de maniere que leur partie cave fût perpendiculaire : ce qui fait que les oiseaux ayant ainsi les plumes & les piés étendus, ralantissent aisément leur impétuosité en flechissant doucement les

jointures, & en relachant leurs muscles quand ils veulent descendre sur la terre.

On pourroit demander ici si les hommes peuvent voler. Il y a trois choses à remarquer dans le vol, savoir, la force qui suspend en l’air le corps de l’animal, les instrumens propres qui sont les aîles, & enfin la résistance du corps. Mais afin que les hommes pussent voler, il faudroit outre ces conditions, qu’il y eût encore la même proportion entre la force des muscles pectoraux dans l’homme, & la pesanteur de son corps, que celle qui se trouve entre la force des muscles & la pesanteur du corps dans les oiseaux. Or il est certain que cette proportion ne se trouve point dans les hommes de même que dans les oiseaux ; puisque les muscles des hommes n’égalent pas la centieme partie de leur corps, & que dans les oiseaux au contraire la pesanteur des muscles flechisseurs des aîles est égale à la sixieme partie du poids de tout leur corps : donc les hommes ne peuvent voler.

Ceux qui soutiennent le contraire disent qu’il est aisé de trouver cette proportion, & que l’on peut par artifice diminuer la pesanteur des corps, & augmenter la force des muscles ; mais je leur répons que l’un & l’autre sont impossibles, & qu’il n’y a point de machine qui puisse surmonter la résistance du poids, ni même élever le corps de l’homme avec la même vîtesse que font les muscles pectoraux.

Il y a cependant quelques modernes qui ont pris delà occasion de dire que le corps de l’homme pourroit être en équilibre dans l’air, en y ajoutant un grand vase. Il est aisé de faire voir qu’ils se trompent ; 1°. parce qu’on ne sauroit fabriquer une machine si mince qui pût résister à la forte impulsion de l’air sans être brisée ; 2°. il faudroit qu’on en eût pompé l’air, ce qui deviendroit extrémement difficile ; 3°. ce vaisseau devroit être fort grand, pour que l’espace qu’il occuperoit dans l’air pesât autant que l’homme & le vaisseau. Enfin il faut remarquer que ce vaisseau auroit autant de peine, à cause de la résistance de l’air, que les petites bouteilles qu’on fait avec de l’eau de savon, ou les petites plumes qui volent en l’air en ont, à cause de sa tranquillité. Verduc, t. III. de la patholog.

Voler ; signifie prendre ou poursuivre le gibier avec des oiseaux de proie.

Un des plaisirs des grands seigneurs, c’est de faire voler l’oiseau, le lâcher sur le gibier.

Voler à la toise, c’est lorsque l’oiseau part du poing à tire d’aîle poursuivant la perdrix au courir qu’elle fait de terre.

Voler de poing en sort, c’est quand on jette les oiseaux de poing après le gibier.

Voler d’amont, c’est quand on laisse voler les oiseaux en liberté, afin qu’ils soutiennent les chiens.

Voler haut & gras, bas & maigre, voler de bon trait, c’est-à-dire de bon gré.

Voler en troupe, c’est quand on jette plusieurs oiseaux à la fois.

Voler en rond, c’est quand un oiseau vole en tournant au-dessus de la proie.

Voler en long, c’est voler en droite ligne, ce qui arrive lorsque l’oiseau a envie de dérober ses sonnettes.

Voler en pointe, c’est lorsque l’oiseau de proie va d’un vol rapide en se levant ou en s’abaissant.

Voler comme un trait, c’est lorsqu’un oiseau vole sans discontinuer.

Voler à reprises, c’est lorsqu’un oiseau se reprend plusieurs fois à voler.

Voler en coupant, c’est lorsque l’oiseau traverse le vent.

VOLERIE, s. f. c’est la chasse avec les oiseaux de proie ; on dit, il a la haute volerie, qui est celle du