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sentence assez longue à une machine, dont les ressorts étoient certainement moins déliés que ceux des animaux. On doit être encore moins surpris de ce phénomene dans ce siecle, après qu’on a vû le flûteur de M. de Vaucanson.

Remarquons enfin, que dans chaque créature on trouve une disposition différente de la trachée-artere, proportionnée à la diversité de leur voix. Dans le hérisson qui a la voix très-petite, elle est presqu’entierement membraneuse ; dans le pigeon, qui a la voix basse & douce, elle est en partie cartilagineuse, en partie membraneuse : dans la chouette dont la voix est haute & claire, elle est cartilagineuse : mais dans le geai, elle est composée d’os durs, au lieu de cartilages : il en est de même de la linotte, & c’est à cause de cela que ces deux oiseaux ont la voix plus haute & plus forte, &c.

Les anneaux de la trachée-artere sont très-bien appropriés pour la modulation différente de la voix. Dans les chiens & les chats, qui comme les hommes, diversifient extrèmement leur ton, pour exprimer diverses passions, ils sont ouverts & fléxibles, de même que dans les hommes. Par-là, ils sont tous, ou la plûpart, en état de se dilater ou de se resserrer plus ou moins, selon qu’il est convenable à un ton plus ou moins élevé & aigu, &c. au lieu qu’en quelques autres animaux, comme dans le paon du Japon, qui n’a guere qu’un seul ton, ces anneaux sont entiers, &c. voyez de plus grands détails dans la cosmolog. sacr. de Grew. (D. J.)

Voix des oiseaux, (Anatom. comparée.) la voix, le cri des oiseaux approche beaucoup plus de la voix humaine que celle des quadrupedes, que nous examinerons séparément ; il y a même des oiseaux qui parviennent à imiter assez passablement notre parole & nos tons. Cependant leur voix differe beaucoup de celle de l’homme, & présente un grand nombre de singularités qui ne sont pas épuisées ; mais on en a découvert quelques-unes qu’il convient d’indiquer dans cet ouvrage.

Les oiseaux ont comme les hommes, une espece de glotte placée à l’extrémité supérieure de la trachée-artere ; mais les levres de cette glotte, incapables de faire des vibrations assez promptes & assez multipliées, ne contribuent presque en rien à la formation des sons : le principal & le véritable organe qui les produit, est placé à l’autre extrémité de la trachée-artere. Ce larynx, que nous nommerons interne d’après M. Perrault, est placé au bas de la trachée-artere, à l’endroit où elle commence à se séparer en deux, pour former ce qu’on appelle les bronches : du-moins M. Hérissant, de l’académie des Sciences de Paris, dit ne l’avoir encore vu manquer dans aucun des oiseaux qu’il a disséqués. Cet organe, au reste, n’est pas le seul qui soit employé à la formation de la voix des oiseaux ; il est ordinairement accompagné d’un nombre plus ou moins grand d’organes accessoires, qui sont probablement destinés à fortifier les sons du premier, & à les modifier.

L’organe principal de la voix varie dans les différens oiseaux ; dans quelques-uns, comme dans l’oie, il n’est composé que de quatre membranes disposées deux à deux, & qui font l’effet de deux anches de haut-bois, placées l’une à côté de l’autre aux deux embouchures osseuses & oblongues du larynx interne, qui donnent entrée aux deux premieres bronches ; mais, comme nous l’avons dit, ces anches membraneuses ne sont pas le seul organe de la voix des oiseaux ; M. Hérissant en a découvert d’autres, placés dans l’intérieur des principales bronches de ce poumon des oiseaux, que M. Perrault nomme poumon charnu.

On trouve dans ces canaux une grande quantité de petites membranes très-déliées en forme de crois-

sant, placées toutes d’un même côté les unes au-dessus

des autres, de maniere qu’elles occupent environ la moitié du canal, laissant l’autre libre à l’air, qui ne peut cependant y passer avec vîtesse, sans exciter dans ces membranes ainsi disposées des trémoussemens plus ou moins vifs, & par conséquent des sons.

Dans quelques oiseaux aquatiques du genre des canards, on découvre encore un organe différent, composé d’autres membranes posées en divers sens, dans certaines parties osseuses ou cartilagineuses. La figure de ces parties varie dans les différentes especes, & on les rencontre ou vers la partie moyenne de la trachée-artere, ou vers sa partie inférieure.

Mais il est un organe qui se trouve dans tous les oiseaux, & qui est si nécessaire à la formation de leur voix, que tous les autres deviennent inutiles lorsqu’on abolit ou qu’on suspend les fonctions de celui-ci. C’est une membrane plus ou moins solide, située presque transversalement entre les deux branches de l’os connu sous le nom d’os de la lunette ; cette membrane forme de ce côté-là une cavité assez grande, qui se rencontre dans tous les oiseaux à la partie supérieure & interne de la poitrine, & qui répond à la partie externe des anches membraneuses, dont nous venons de parler.

Lorsqu’un oiseau veut se faire entendre, il fait agir les muscles destinés à comprimer les sacs du ventre & de la poitrine, & force par cette action l’air qui y étoit contenu à enfiler la route des bronches du poumon charnu, où rencontrant d’abord les petites membranes à ressort dont nous avons parlé, il y excite certains mouvemens & certains sons destinés à fortifier ceux que doivent produire les anches membraneuses que le même air rencontre ensuite ; mais ces dernieres n’en rendroient aucun, si une partie de l’air contenu dans les poumons ne passoit par de petites ouvertures, dans la cavité située sous l’os de la lunette. Cet air aide apparemment les anches à entrer en jeu, soit en leur prêtant plus de ressort, soit en contrebalançant par intervalles l’effort de l’air qui passe par la trachée-artere. De quelque façon qu’il agisse, son action est si nécessaire, que si l’on perce dans un oiseau récemment tué la membrane qui forme cette cavité, & qu’ayant introduit un chalumeau par une ouverture faite entre deux côtes, dans quelqu’un des sacs de la poitrine, on souffle par ce chalumeau, on sera maître, avec un peu d’adresse & d’attention, de renouveller la voix de l’oiseau, pourvû qu’on tienne le doigt sur l’ouverture de la membrane ; mais sitôt qu’on l’ôtera, & qu’on laissera à l’air contenu dans la cavité la liberté de s’échapper, l’organe demeurera absolument muet, quelque chose qu’on puisse faire pour le remettre en jeu. Il n’est pas étonnant que l’organe des oiseaux, destiné à produire des sons assez communément variés, & presque toujours harmonieux, soit composé avec tant d’art & tant de soin. Hist. de l’acad. des Scienc. ann. 1753. (D. J.)

Voix des quadrupedes, (Anatom. comparée.) la différence qui se trouve entre la voix humaine & les cris des différens animaux, & sur-tout ceux de ces cris qui paroissent composés de plusieurs sons différens produits en même tems, auroit dû depuis longtems faire soupçonner que les organes qui étoient destinés à les produire, étoient aussi multipliés que ces sons. Cette réflexion si naturelle a échappé ; on regardoit les organes de la voix des animaux, & surtout de celle des quadrupedes, comme aussi simples & presque de la même nature que l’organe de la voix de l’homme.

Il s’en faut cependant beaucoup que dans plusieurs des quadrupedes, & plus encore dans les oiseaux, l’organe de la voix jouisse d’une aussi grande simpli-