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D’autres pour prouver que l’univers est fini, leur opposent ces deux réflexions.

La premiere, que tout ce qui est composé de parties, ne peut jamais être infini, puisque les parties qui le composent sont nécessairement finies, soit en nombre, soit en grandeur ; or si ces parties sont finies, il faut que ce qu’elles composent soit de même nature.

Seconde réflexion : si l’on veut que les parties soient infinies en nombre ou en grandeur, on tombe dans une contradiction, en supposant un nombre infini : & supposer des parties infiniment grandes, c’est supposer plusieurs infinis ; dont les uns sont plus grands que les autres : c’est ce que l’on peut passer aux mathématiciens, qui ne raisonnent sur les infinis que par supposition ; mais on ne peut pas passer la même chose aux philosophes dans une question de la nature de celle-ci. Chambers.

UNIVERSALISTES, s. m. pl. (Hist. ecclésiastique.) nom qu’on a donné parmi les protestans à ceux d’entre leurs théologiens qui soutiennent qu’il y a une grace universelle & suffisante, offerte à tous les hommes pour opérer leur salut. De ce nombre sont surtout les Arminiens, qui à leur tour ont donné le nom de particularistes à leurs adversaires. Voyez & Particularistes.

UNIVERSAUX, s. m. pl. (Hist. mod. politique.) c’est ainsi que l’on nomme en Pologne les lettres que le roi adresse aux seigneurs & aux états du royaume pour la convocation de la diete, ou pour les inviter à quelqu’assemblée relative aux intérêts de la république.

Lorsque le trône est vacant, le primat de Pologne a aussi le droit d’adresser des universaux ou lettres de convocation aux différens palatinats, pour assembler la diete qui doit procéder à l’élection d’un nouveau roi.

UNIVERSEL, adj. (Logique.) l’universel en Logique, est une chose qui a rapport à plusieurs, unum versus multa, seu unum respiciens multa. On en distingue principalement de deux sortes ; savoir l’universel in essendo, & l’universel in prædicando.

L’universel in essendo est incréé ou créé. L’incréé est une nature propre à se trouver dans plusieurs, dans un sens univoque, & d’une maniere indivisible. Telle est la nature qui se multiplie dans le Pere, le Fils & le S. Esprit. sans se diviser, ni se partager.

L’universel in essendo créé, est une nature propre à se trouver dans plusieurs, dans un sens univoque & d’une maniere divisible. Telle est la nature humaine qui, à mesure qu’elle se multiplie dans tous les hommes, se divise.

L’universel in prædicando est pareillement de deux sortes, ou incréé, ou créé. L’incréé est un attribut propre à être dit dans un sens univoque de plusieurs, & cela sans se diviser ; tels sont tous les attributs de Dieu. Le créé est un attribut qui se divise, à mesure qu’il se dit de plusieurs, & cela dans un sens univoque ; tels sont ces mots homme, cercle, triangle.

Ce qui distingue l’universel in essendo d’avec l’universel in prædicando, c’est que le premier s’exprime par un nom abstrait, & le second par un nom concret.

Ce double universel se divise en cinq autres universaux, qui sont le genre, l’espece, la différence, le propre & l’accident.

Le genre se définit une chose propre à se trouver dans plusieurs, ou à être dit de plusieurs comme la partie la plus commune de l’essence.

Il se divise d’abord en genre éloigné, & en genre prochain. Le genre éloigné est celui qui est séparé de l’espece par un autre genre, qui est interposé entre eux deux. Telle seroit, par exemple, la substance par rapport à Dieu, laquelle ne se dit de cet être su-

prème, que moyennant l’esprit qui en est le genre

prochain.

On en distingue encore de trois sortes ; savoir le genre suprème, le genre subalterne & le genre infime. Le genre suprème, qu’on appelle aussi transcendental, ne reconnoît aucun genre au-dessus de lui ; tel est l’être. Le genre subalterne se trouve placé entre des genres dont les uns sont au-dessus de lui & les autres au-dessous ; & le genre infime, est celui qui n’en a point sous lui : il est le même que le genre prochain.

Ce qui est genre par rapport à un autre genre moins universel, n’est plus qu’une espece par rapport à celui qui est plus étendu que lui Ainsi la substance qui est genre par rapport à l’esprit & au corps, n’est qu’une espece de l’être en général.

Tout ce qui se trouve dans le genre, à son universalité près, se trouve aussi dans tous ses inférieurs ; mais cela n’est pas réciproque de la part des inférieurs par rapport à leur genre. On peut bien dire de l’esprit qu’il est substance ; mais on ne dira pas de la substance en général, qu’elle est esprit.

La différence se définit dans les écoles, une chose propre à se trouver dans plusieurs, ou à être dite de plusieurs comme la partie la plus stricte ; je veux dire la plus propre, la moins étendue de l’essence. Voici les trois fonctions qu’on lui donne ; 1°. de diviser le genre, c’est-à-dire de le multiplier ; 2°. de constituer l’espece ; 3°. de la distinguer de toute autre : essentielle à l’espece qu’elle constitue, elle est contingente au genre qu’elle multiplie.

On en distingue de plusieurs sortes ; savoir la différence générique, la différence spécifique, & la différence numérique.

La différence générique est un attribut ; par exemple, qui étant commun à des êtres même de différente espece, sert néanmoins à les distinguer d’autres êtres dont l’espece est plus éloignée. Ainsi l’intelligence convenant à Dieu, aux anges & aux hommes, qui sont tous de différente espece, sert à les distinguer des corps qui n’en sont pas susceptibles.

La différence spécifique est le degré qui constitue l’espece infime, & qui la distingue de toutes les autres especes. Cette différence renferme deux propriétés ; la premiere est de distinguer une chose d’avec toutes celles qui ne sont pas de la même espece ; & la seconde d’être la source & l’origine de toutes les propriétés qui constituent un être.

La différence numérique consiste en ce qu’un individu n’est pas un autre individu. Ceux qui voient par-tout dans les genres, dans les especes, dans les essences & dans les différences, autant d’êtres qui vont se placer dans chaque substance, pour la déterminer à être ce qu’elle est, verront aussi dans la différence numérique je ne sais quel degré, enté, pour ainsi dire, sur l’espece infime, & qui la détermine à être tel individu. Ce degré d’individuation sera, par exemple, dans Pierre la pétréité, dans Lentulus la lentuléité, &c.

L’espece se définit dans les écoles, une chose propre à se trouver dans plusieurs, ou à être dite de plusieurs comme toute l’essence commune. Ainsi l’espece résulte du genre & de la différence.

Il y a deux sortes d’especes, l’une subalterne & l’autre infime ; la subalterne est genre par rapport aux especes inférieures, & espece par rapport à ce qui est plus étendu & plus universel qu’elle ; l’espece infime ne reconnoît sous elle que des individus.

Le propre se définit dans les écoles, une chose propre à se trouver dans plusieurs, ou à être dite de plusieurs comme une propriété qui découle de leur nature ; ce qui le distingue de l’accident, qui ne se trouve dans plusieurs & n’est dit de plusieurs, qu’à titre de contingence.