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premierement avec le doigt, ensuite avec un petit bistouri, & puis finalement avec des instrumens convenables introduits dans la vessie, il tira la pierre qui étoit de la grosseur d’un œuf de poule.

8°. J’ai dit ci-dessus que les ureteres percent la tunique extérieure de la vessie ; & qu’avant de pénétrer jusqu’à l’intérieure, ils se glissent entre les membranes de la vessie, & ne s’ouvrent que vers son cou. C’est dans cet intervalle que de petites pierres sorties du rein, s’arrêtent, s’augmentent & causent quelquefois un ulcere, qui fait souffrir aux graveleux des douleurs très-aiguës. Quand elles sont considérables, on peut les toucher en introduisant le doigt dans l’anus aux hommes, & aux filles non déflorées, & dans le vagin aux femmes ; ce qui réussit encore mieux quand on introduit en même tems une sonde dans la vessie, afin de comprimer la pierre par en haut, pendant qu’on l’approche par en bas.

9°. Il me reste un probleme à proposer sur ce réservoir musculeux & membraneux de l’urine, qu’on nomme la vessie. Est-il sûr qu’on l’ait quelquefois trouvé double ? Les observations qu’on cite me sont suspectes : on a pu s’y tromper aisément, & prendre pour une double vessie des ureteres devenus très-gros, comme il arrive souvent, à cause des obstacles qu’a rencontré l’urine pour se rendre dans le sac urinaire. Cependant le fait qu’allegue Coiter est une forte autorité, parce que cet ancien anatomiste qui voyageoit beaucoup pour s’instruire dans son art, & qui suivoit les armées pour avoir l’occasion de connoître le corps humain par un grand nombre de dissections, rapporte qu’il se trouva deux vessies dans le corps d’une fille de 35 ans, toutes deux pleines d’urine, & que les ureteres s’inséroient dans une seule de ces vessies, de laquelle l’urine passoit dans l’autre. Mais enfin comme cet exemple est unique, il ne leve point mon doute. En effet, des appendices, des cavités, des culs-de-sacs continués à la vessie urinaire, sont des jeux de la nature dans cette partie, dont on trouve quelques exemples dans les livres d’anatomistes. On a vu des vessies divisées par deux cloisons, & vraissemblablement ce sont ces divisions de vessies, que Coiter a pris pour une double vessie. (Le Chevalier de Jaucourt.)

Vessie, maladies de la, (Médec.) 1°. ce sac membraneux si susceptible de dilatation & de contraction, adherent à la partie antérieure & inférieure du ventre, couché dans les hommes sur l’intestin rectum, & dans les femmes sur le vagin ou la matrice, recevant l’urine des ureteres après sa secrétion pour la faire sortir dehors par le canal de l’uretre, se nomme la vessie ; elle est douée d’un sentiment exquis, enduite intérieurement d’une humeur mucilagineuse, & munie de vaisseaux sanguins & de nerfs ; conséquemment à sa situation, sa construction & l’urine qu’elle contient, elle est exposée à de tristes maladies de différentes especes.

2°. La vessie déplacée & tombée dans les bourses cause une suppression d’urine ; cet état demande l’opération de la main pour être remise dans sa place & y être maintenue à la faveur d’un bandage ; mais si la formation du sac herniaire est latérale, ensorte qu’il soit double, il est difficile de s’en appercevoir hormis après la mort.

3°. Quand la vessie est devenue épaisse, caleuse, ou qu’elle s’est endurcie à la suite de la pierre, & qu’elle donne lieu à une incontinence d’urine, c’est un mal incurable. Si même elle a acquis une forte extension, ou qu’elle se soit relâchée après une trop grande rétention d’urine, elle n’a plus la force d’évacuer cette liqueur, puisqu’il faut la maintenir quelque tems vuide après y avoir introduit la sonde. L’inflammation de cette partie suivie de suppression d’urine est une chose cruelle, on tâchera d’y porter

remede par l’application des antiphlogistiques ordinaires. La rupture, la blessure ou la coupure de la vessie dans la lithotomie, d’où il arrive que l’urine tombe dans le ventre ou hors du corps par le moyen d’une fistule, ne peut se consolider que par son adhérence avec les parties voisines. L’irritation intérieure qu’elle éprouve dans le cas d’une pierre empêche souvent de découvrir cette pierre par la sonde, où les dartres qui y surviennent ont coutume de donner lieu à une incontinence d’urine dont l’écoulement est semblable à du son. Il est nécessaire dans ce dernier cas de faire des injections balsamiques & antiseptiques. Mais si la vessie se trouve excoriée avec une rétention d’urine accompagnée de douleur, il faut user de boissons adoucissantes & d’injections mucilagineuses.

4°. La douleur de la vessie qui vient du calcul, de l’acrimonie ou du défaut de la mucosité, d’une métastase, d’une inflammation, d’un ulcere qu’on reconnoît par l’évacuation du pus, est toujours d’un mauvais présage ; le traitement doit être relatif à la connoissance de la cause. L’hémorrhagie donne quelquefois lieu à un pissement de sang qui, devenant grumeleux, s’oppose à la sortie de l’urine ; on y remédie par l’usage des délayans savonneux & en introduisant la sonde dans la vessie.

5°. Le sphacele du sphincter, ou la paralysie qui produit l’incontinence d’urine est une maladie incurable. La convulsion de cette partie, suivie de suppression d’urine, demande les antispasmodiques.

6°. La mucosité qui oint la surface interne de la vessie devenue plus tenace, donne une urine filamenteuse avec un sédiment muqueux, ou bouche le conduit urinaire. Son acrimonie ou son défaut occasionne quelquefois tantôt une douloureuse rétention d’urine, tantôt son incontinence, quelquefois encore elle est la source de la formation du calcul.

7°. Mais si la pierre s’engendre dans la vessie, son principe pour l’ordinaire se trouve dans les reins ; ensuite ce calcul passant par les ureteres dans la vessie, devient considérable par de nouvelles incrustations journalieres, sa génération doit être prévenue, s’il est possible, par les meilleurs moyens. Le calcul, quoique peu considérable dans son origine, demande l’usage des remedes approuvés en Angleterre par un acte du parlement, les mucilagineux & les onctueux ; si par malheur ces remedes n’ont pas été capables de détruire la pierre, il faut recourir à l’opération & au plus habile lithotomiste.

8°. La vessie qui se trouve comprimée dans les femmes enceintes, soit par le fœtus, soit par la constipation, soit par une humeur dans le voisinage, se guérit en remédiant aux accidens, & en attendant l’accouchement de la malade. (D. J.)

Vessie, hernie de, (Chirurgie.) cet accident est assez rare pour que M. Méry ait cru qu’il ne pouvoit être qu’un vice de conformation ; en effet la raison qui l’a frappé est très-propre à frapper tout le monde. La vessie pleine d’urine est trop grosse pour passer par les anneaux par où un intestin passe, sa figure ne le permet point, & elle est trop fortement attachée de tous côtés pour pouvoir tomber accidentellement dans le scrotum ; cependant les habiles chirurgiens pensent aujourd’hui que la hernie de vessie peut, aussi bien que celle d’intestin ou d’épiploon, avoir des causes accidentelles, savoir la suppression d’urine & les grossesses. Voici les preuves qu’en donne M. Petit dans les Mémoires de l’académie des Sciences, année 1717.

Ce n’est pas, dit-il, dans le tems où la suppression d’urine dilate excessivement la vessie qu’elle peut passer par les anneaux, elle y est certainement moins disposée que jamais ; mais c’est dans ce tems-là qu’elle prend des dispositions à y passer lorsqu’elle se sera