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au baquet, on la rafraîchit avec de l’eau, on laisse refroidir ce premier cueillage ; on le répete en cette maniere autant de fois qu’il est nécessaire, selon la grandeur de la glace qu’on se propose de souffler l’avant dernier cueillage. Lorsque la matiere cueillie est un peu froide, on la souffle à dessein de l’élargir, & de prendre au dernier coup plus de crystal : ce cueillage s’appelle la poste. Quand elle est assez froide, on la replonge encore en tournant la felle dans le crystal ; on la retire en baissant la main doucement, afin de faire séparer le fil, & arrondir le cueillage ; cela fait, on va au baquet rafraîchir la canne ou felle ; le paraisonnier la prend ensuite, & la porte au marbre ou à la table : c’est une plaque de fer de fonte, il la roule en la soufflant en même tems, & lui donnant la forme appellée paraison, qu’on voit dans nos Pl.

Quelquefois la paraison devient plus mince d’un côté que de l’autre ; alors on continue à tourner cette partie mince sur le marbre ou sur la table qui la refroidit, & soufflant en même tems, l’autre partie épaisse cede, & l’égalité se rétablit.

Cela fait, on va au baquet rafraîchir la selle, puis on la porte à l’ouvroir pour réchauffer la paraison égalisée ; quand elle y est, on la tourne d’abord doucement, mais on augmente de vîtesse à mesure qu’elle s’amollit. Quand la paraison est assez chaude, on la retire pour la faire alonger ; si elle est bien lourde, deux ouvriers ou paraisonniers soutiennent la felle en l’air, & donne lieu à la paraison de s’alonger ; on souffle à mesure qu’elle s’alonge, afin de lui donner le diametre qu’il faut, puis on la remet à l’ouvroir pour la réchauffer, observant comme auparavant de tourner d’autant plus vîte, qu’elle s’amollit davantage. Quand elle est assez chaude, on la retire, on acheve de l’alonger jusqu’au point convenable ; on pose la felle sur un tréteau ; un autre ouvrier, avec un poinçon & un maillet, y pratique un trou ; cela fait, on la reporte à l’ouvroir, mais on n’en réchauffe qu’environ la moitié ; quand elle est chaude, on revient au tréteau, & un autre ouvrier, avec le procello, met d’abord la pointe de cet instrument dans le trou fait avec le poinçon ; on tourne la felle, & comme le procello est à ressort, le trou s’élargit peu-à-peu ; quand toute l’ouverture est faite, on reporte à l’ouvroir, on réchauffe comme auparavant, on revient, on monte sur la chaise ; alors un ouvrier avec un ciseau fend la piece jusqu’à la moitié. On descend de dessus la chaise, on va au treteau, un autre ouvrier avec le pontil, l’attache à la piece ; puis avec un fer trempé dans l’eau, dont on pose le bout sur la piece, & d’où il en tombe sur elle quelque goutte, prépare la séparation de la felle qui se fait d’un petit coup qu’on lui donne. La piece séparée de la felle, on la porte avec le pontil à l’ouvroir, pour la chauffer comme auparavant. On revient au treteau, on acheve d’ouvrir le trou avec le procello ; un ouvrier alors monte sur la chaise, & avec un ciseau on acheve de fendre. Un autre ouvrier s’approche avec une pelle ; on pose la piece sur cette pelle, on détache le pontil de la piece par un petit coup : l’ouvrier à la pelle la prend, la porte dans l’arche à applatir.

La chaleur de l’arche commence à l’amollir ; on pose la piece sur la table à applatir, l’ouvrier prend le fer à applatir, c’est une tringle de fer d’environ 10 ou 11 piés de long, & il renverse un des bords de la piece vers la table, ensuite l’autre ; puis avec la polissoire, il frotte la glace par-tout pour la rendre unie ; ensuite on pousse la glace sous l’arcade, afin de la faire entrer sous le fourneau à recuire. A mesure qu’elle se refroidit, on la pousse vers le fond du fourneau ; quand elle est encore plus froide, c’est-à-dire, qu’il n’y plus de risque qu’elle se plie ; on la dresse,

& entre chaque sept ou huit pieces ainsi dressées, on met la barre de travers pour les empêcher de courber. Sans ces barres, les pieces poseroient les unes sur les autres, & plieroient ; quelquefois la glace est si grande, qu’on ne peut pas la dresser ; alors on la retire de l’arche, on la prend sur une pelle, & on la met dans le fourneau. Le fourneau étant plein, on le bouche, on marge, & on le laisse refroidir, mais on a grand soin de tenir le fourneau dans une chaleur convenable ; trop chaud, les pieces plieroient ; trop froid, elles se couperoient difficilement avec le diamant, & seroient trop sujettes à casser : quand elles sont froides on les retire, & on les emmagasine.

Il y a deux sortes de pontils ; le travers en étant un peu chaud, on les trempe dans le métal, ils s’en couvrent, on les laisse refroidir, puis on les attache à la piece.

Verreries en crystal. Les fours de ces verreries sont ronds. Voyez les plans & les profils. Ils sont faits en masse ou avec de la brique préparée exprès ; leur interieur & leur extérieur sont revétus de briques ordinaires : on voit par le profil qu’il y a trois voûtes, une plus basse, qui est le foyer où il y a une grille faite de terre, sur laquelle on place le bois à brûler ; & au lieu de tirer la braise par le tisonnier, on remarque une petite porte au fond du foyer qui est à cet usage. C’est par-là qu’on fait passer la braise dans une cave, quand il y en a trop. Cette voûte est percée d’une lunette qui donne passage à la flamme dans la seconde voûte où les pots sont placés autour de la lunette. Cette seconde voûte est pareillement percée d’une lunette qui donne passage à la flamme dans l’arche ou dans la troisieme voûte, dans laquelle on met recuire les marchandises ; si ceux qui construisent ces fours, se servoient de la méthode que nous avons expliquée dans la verrerie à bouteilles en charbon, pour faire & préparer leurs briques selon les voûtes de leur four, ils abrégeroient beaucoup leur travail dans la construction ; car on peut déterminer les dimensions des moules, de maniere qu’on n’auroit rien à tailler. On voit qu’au lieu de faire les faces du moule rectilignes, il faudroit qu’ils suivissent la courbure des voûtes, observant encore que les briques se retrécissent, & que par conséquent si l’on veut avoir un four de six piés en diametre, il faut faire les moules comme pour un four de six piés quatre pouces.

On fait les pots à la main ou dans un moule. Ils ont ordinairement 2 piés 2 ou 3 pouces de largeur, sur 16 pouces de haut.

Quoiqu’il y ait huit pots dans ces fours, on ne travaille qu’à deux, trois ou quatre, & cela selon les nombres des ouvriers qu’on a, & selon les marchandises qu’on fait. Il y a deux ouvriers qui travaillent dans le même pot, auquel il y a deux ouvroirs, à moins qu’on ne fasse de grosses pieces ; dans ce cas il n’y a qu’un ouvrier au même pot. Les autres pots sont pour fondre & raffiner la matiere. A mesure qu’elle se raffine & qu’on en a besoin, on la trafie d’un pot dans un autre avec la poche ou la cueillere, & cela sans la retirer du four.

Trafier le verre ou le crystal, c’est prendre la poche ou la cueillere, la tremper dans l’eau, si elle est sale, la laver & la plonger dans le crystal liquide ; & quand son bassin en est plein, le renverser dans les autres pots.

Quand ce pot est vuide, on le remplit derechef de sa fritte, pour être raffinée & tenue prête à être trafiée.

Dans ces fours, qu’il y ait six, sept à huit pots, il faut autant d’arcades qu’il peut y avoir de pots. C’est par ces arcades qu’on fait entrer les pots dans le four, & non pas, comme dans les autres verreries, par