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L’essieu est placé en E à environ un pié de C ; & on fait la queue de la fourche EFGH = 11 piés : ce qui donne à l’instrument entier dix-neuf piés de long.

La queue de la fourche est garnie d’un anneau à son extrémité H, comme celle du grand chariot ; & les trois boulons sont semblablement posés dans les deux outils.

La dent-de loup. (fig. 3. Pl. XXVII.) est une barre de fer, légere, ayant douze piés de long & formant à une de ses extrémités un crochet d’environ deux de 1 en 2. Le crochet est tel que 1, 3 = deux pouces ainsi que 1, 4.

La barre d’equerre (fig. 2. Pl. XXVII.) est une barre de fer ayant dix piés & demi de long, pliée à angle droit à une de ses extrémités, où elle forme un crochet ab de vingt-un pouces.

Les barres croches sont des pinces telles que (fig. 1. Pl. XXVII.) d’environ huit piés & demi de long, & ayant une petite courbure en approchant d’une de leurs extrémités.

Lorsqu’on a à placer un pot dans le four, on commence par lever la ferrasse qui forme l’arche, & on abat les glaies tant de l’arche que du four. On débarrasse avec soin les débris des glaies pour que la manœuvre n’en soit pas génée : on place le sergent au-devant de l’arche, ensuite on pousse un peu le pot avec les cornes du moïse, appuyé sur le sergent ; & l’on profite de cet instant pour ôter avec un des grands crochets de dessous le pot un des briquetons sur lesquels il pose, dans la vue de faire pencher le pot du côté de la gueule de l’arche. Alors les grands crochets tirent le pot par le haut de la fleche pour le renverser, le coucher, si l’on peut ainsi dire, sur le pavé de l’arche, ce qu’on appelle abattre le pot. Moïse se met en-dedans du pot pour le soutenir, crainte qu’il ne soit abattu trop vivement & qu’il ne frappe contre le pavé de l’arche. On voit dans les ouvriers 1, 2, 3 (Pl. XXVIII. vignette) l’action de moïse & des deux grands crochets.

Lorsque le pot est abattu, plaçant les crochets à son jable, on l’attire doucement sur le devant de l’arche, de maniere qu’il présente son ouverture à la gueule de l’arche, & on ôte le sergent. Alors on balaie le pot pour en ôter la poussiere, & en savoir le bon ou mauvais état.

On approche le grand chariot dont on enfonce les cornes jusqu’au fond du pot. On souleve un peu le pot ; & lorsqu’il est ainsi chargé sur les cornes du chariot, retirant celui-ci en arriere, on retire le pot hors de l’arche.

Le chariot est conduit par neuf hommes, un au bout de la queue qui dirige le mouvement de l’outil & la manœuvre ; deux à chacun des trois boulons, & un à chaque roue pour les retenir, les accélérer ou changer la direction du chariot, en retenant l’une plus que l’autre.

On mene le charriot sous l’antre & on approche le pot de la tonnelle avec un mouvement bien réglé, les ouvriers qui sont aux roues opposant leurs efforts à la pente du terrein ; à mesure qu’on approche de la tonnelle, on baisse le pot, & on le fait entrer sous la tonnelle sans toucher à l’âtre, aux piés droits, ni au ceintre ; on le pousse assez avant pour que le bord supérieur ait passé le ceintre de la tonnelle ; alors on retire le chariot, & on amene la fourche.

On passe les cornes de la fourche sous le bord du pot, & on le releve entre les deux sieges. La dent-de-loup qu’on fait passer par le tisar de l’autre glaie, accroche le bord du pot de son côté, le maintient droit & l’empêche de s’abattre de nouveau. L’action de la dent-de-loup donne à la fourche le tems de prendre le pot par le jable. On l’enleve jusqu’à la hau-

teur du siege sur lequel on fait poser le bord de son

cul. Alors la dent-de-loup devenue inutile, se retire.

La barre d’équerre passe par l’ouvreau à trejetter correspondant au pot qu’on place, entre dans le pot, & les ouvriers qui s’en servent peuvent, en tirant à eux, soutenir le pot que sa pesanteur entraineroit entre les deux sieges.

Pendant l’action de la barre d’équerre la fourche abandonne le pot, & le reprenant plus loin du siege, est en état de le porter plus avant : la fourche abandonne encore le pot, & la barre d’équerre le soutient ; ainsi desuite, jusqu’à ce qu’il soit assez avant sur le siege pour s’y soutenir de lui-même. Alors l’action de la barre d’équerre devient nulle, & c’est le moment de mettre en œuvre les deux barres croches.

L’une passe par l’ouvreau du milieu, & toutes deux agissant comme leviers, favorisent l’action de la fourche, en appellant le pot au mormue[1].

Le pot est bien placé lorsqu’il coupe l’ouvreau du milieu par la moitié, & qu’il ne laisse de distance entre lui & le mormue, que l’épaisseur d’un rable de tiseur.

Lorsqu’on retire un pot du four, c’est précisément la même opération que lorsqu’on l’y met : seulement les outils agissent en ordre & en sens contraires. La fourche travaille la premiere, & au lieu de pousser le pot au mormue, elle l’attire entre les sieges. La dent-de-loup au lieu de le soutenir, le pousse pour l’abattre, &c.

Des qu’on a pris dans l’arche les pots dont on a eu besoin, s’il en reste encore on refait l’arche, & on laisse baisser le feu par gradation, jusqu’à ce qu’il soit réduit à celui de la lunette.

On a aussi le plus grand soin de refaire promptement la glaie du four, d’abord que l’opération est finie.

L’opération de mettre des cuvettes neuves au four est bien moins compliquée. (Pl. XXX. vignette.) On tire la cuvette sur le devant de l’arche avec les grands crochets ; on la met sur une pelle de tôle, & un homme tenant la queue de la pelle, aidé d’un gambier, la porte à l’ouvreau, la pose sur la plaque ; le chariot à tenaille la prend & la place.

On peut aussi porter la cuvette en mettant les cornes de moïse au fond de la cuvette, & portant le moïse lui-même chargé de la cuvette, jusque sur la plaque où on pose la cuvette.

A la vérité, on ne peut alors poser la cuvette sur son cul, mais on l’y retourne en la soutenant avec tel outil que ce puisse être, pour empêcher qu’elle ne tombe avec trop de force sur la plaque.

Lorsqu’on a pris dans l’arche les cuvettes dont on a besoin pour conserver celles qui restent, on replace la tuile de l’arche, on la marge, & on reduit le feu à celui de la lunette.

Le verre qui se répand dans le four, soit lors des opérations, soit par la casse de quelques vases, se sallit, & devient jaune ou noir par le mélange des cendres. Il prend alors le nom de picadil. Lorsque le picadil est trop abondant, il va jusques sur l’âtre des tonnelles, & gêne la chauffe. Alors on prend le parti de le tirer hors du four, & c’est la seule opération qui nous reste à décrire.

On ouvre une tonnelle, on puise dans le bain de picadil avec des poches de fer (fig. 4. Pl. XXXI.) qui ont six pouces de diametre sur environ autant de profondeur, & environ onze piés de manche. On vuide la poche sous l’antre au devant de la tonnelle qu’on croise d’une buche un peu grosse, pour empêcher le picadil de céder à la pente du terrein & de redescendre dans le four.

  1. On voit, Pl. XXIX. vignette, l’action de la fourche, des barres, croches, & de la barre d’équerre.